50 lauréats ont bénéficié en 2021 du soutien à un projet artistique, à la suite de la commission dédiée qui s’est déroulée le 14 avril. 

François Bellabas

MOTORSTUDIES_ESCAPE FROM L.A.

MOTORSTUDIES (MS) est une entité tentaculaire. Son nœud central est une banque d’images capturées à Los Angeles, ville abordée pour sa valeur hautement symbolique, par le biais du photographique et par le prisme de l’automobile. Depuis le siècle dernier, l’un comme l’autre sont tributaires des avancées technologiques, qui influencent notre rapport au monde en transformant les codes et les valeurs de temps et d’espace. Ma recherche plastique et théorique s’en trouve ancrée sur la machine, autant questionnée dans sa représentation qu’utilisée comme outil de production, de stockage et de diffusion. Si MS éprouve la mutation de l’ère industrielle à l’ère de l’information-temps réel, Escape from LA (EFLA) en est l’expression directe, sous une forme partagée et augmentée. Aux contacts d’artistes, chercheurs et techniciens invités, MS_EFLA se concentre sur ce nouveau potentiel imaginaire à l’œuvre dans MS, et des applications qu’en font le cinéma, le jeu vidéo, la publicité. Fort de ces réflexions élargies à la représentation du monde par ses outils mêmes, MS_EFLA exploitera les régimes de physicalité des images, au travers le développement d’œuvres plastiques plurielles : des image-objets en 2D, en volume et en virtuel. Il se projettera dans des formats de présentations idéales, que permettent notamment trois référentiels interconnectés que sont le réel R, la réalité augmentée AR et la réalité virtuelle VR.

Mathis Berchery

LES YEUX RIVES

Le travail de recherche-création pour LES YEUX RIVES est né de la découverte du Journal du Rio Negro de Pierre Restany aux Archives de la Critique d’Art.

Avec cette installation-performance, il s'agit de penser et rejouer en miniature le voyage de Restany avec Sepp Baendereck, Frans Krajcberg et André Paluch en 1978 à bord du navire Robson-Reis, qui donna lieu à l'écriture du Manifeste du Naturalisme Intégral, comme une poursuite logique du Nouveau Réalisme, en dehors de la ville et face à l'incommensurabilité de la nature en Amazonie. Le projet vise à montrer les conditions de voyage et les outils perceptifs et conceptuels qu’avaient Restany et ses compagnons pour produire ce manifeste, et de quelle manière ces écrits résonnent aujourd’hui, alors que la forêt amazonienne brûle, que les peuples indigènes luttent pour leurs traditions et leur liberté d’habiter la terre comme ils l’entendent, que l’effondrement écologique demande d’interroger les manières «occidentales», modernes, d’être en relation, de consommer, de percevoir, de représenter.

L'installation est l'écrin de la performance, envisagée comme un paysage entre ville et forêt, traversé d'un cours d'eau, tel une séparation et un milieu de passage entre deux «mondes», deux rives figurant « la relativité Natura-Urbs » et la fracture moderne (Une écologie décoloniale, Malcolm Ferdinand, Seuil, 2019). Des formes seront créées qui viendront le modifier, le perturber, et des objets, images, boissons seront partagés sur le cours d'eau avec le.la spectateur.rice, engageant ainsi sa propre responsabilité d'en profiter et de s'interroger sur l'éthique et l'histoire que charrient ces éléments passagers. Des images seront tournées tout au long de l'année 2021 : captations de cours d'eau, de mers, en des lieux, heures et lumières diverses. Elles seront projetées sur l'eau, se succéderont en fondus lents, telle une expérience hallucinée du temps et du changement.

Jean Bonichon et Lidia Lelong

Les Bonilong

La série Les Bonilong est le deuxième volet d'une famille de sculptures déjà existantes, Les Lelichon. Les patronymes Lelichon et  Bonilong naissent de l’assemblage de nos propres noms. Alors que les Lelichon évoluent dans un environnement rural, les Bonilong voient le jour dans nos zones pavillonnaires standardisées. Architecture conventionnelle, espaces verts apprivoisés, aménagements normalisés sont les sources de l’invention de cette série. Néanmoins, les formes et matériaux ne seront pas conservés en leur état premier. Le choix des matières et des savoir-faire sera identique dans sa qualité chez les deux ensembles. Seront réemployés le travail du placage, l’assemblage ébéniste, la maroquinerie enrichis de nouveaux médiums comme la céramique, la porcelaine, le bois chantourné et tourné, le fer forgé. Ce qui distingue également la deuxième famille tient dans la volonté de réaliser des objets aux formes visuellement molles et aux couleurs moins tranchées. Ce parti-pris vient d’une volonté antagoniste d’aller contre les formes rigides et conventionnelles propre aux cités dortoirs. Seule la gamme colorimétrique de ces lieux sera conservée. Les formes bonhommes de galbe, de rondeur, de courbe...associées à la douceur des matériaux dans leur traitement et aux couleurs pastels doteront les Bonilong d’une image tendre et débonnaire. Comme chez les Lelichon, la série de sculptures sera l’objet d’activations publiques. À taille humaine, elles sont imaginées pour être portées.

Flora Bouteille pour le duo Flora Bouteille et Cassandre Langlois

Together Until_What ?

Together Until__ _ What? est un projet artistique conçu par le duo Flora Bouteille (artiste/performeuse) et Cassandre Langlois (chercheuse/commissaire d’exposition) sous la forme d’un bureau d’études. En se construisant autour de temps réguliers de recherches et de créations en des lieux divers, il se dédie à l’expérimentation de dispositifs et à la production de connaissances sur les arts performatifs. Il tente de donner une nouvelle place à la performance, au sein - et au-delà - des structures déjà existantes du White Cube et de la Black Box, en désirant un espace plus poreux, découlant, en partie, d’une réflexion sur la manière dont l’art et la vie cohabitent l’un à l’intérieur de l’autre. Si nos modes d'existences doivent être radicalement repensés, les modalités de production, de diffusion et d’exposition de l’art semblent, elles aussi, nécessiter d’être re-visitées. En ce sens, le projet fait également appel à des stratégies performatives afin d’expérimenter de nouvelles coopérations dans le champ de la para-institution. Flora Bouteille utilise les médiums de la sculpture, l’écriture, et de la vidéo pour réunir performeurs et public dans des performances impliquant le consentement à « être » une partie de l’œuvre comme condition de son déroulement. Cette approche vise à révéler les conditions d’existence des œuvres dans leur champ, et nous inviter à l’action ou à la réflexion. Dans ses performances elle s’interroge sur l’emploi que fait l’artiste de l’espace public et politique qu’il occupe, et sur la manière dont s’y partagent le pouvoir, le savoir, et le sensible. Croyant profondément en la capacité de l’œuvre d’art à redimensionner notre sensibilité, elle conçoit ses performances comme des « exercices », travaillant nos habitus, notre histoire et ouvrant la porte du cabinet mental. Ce sont des expériences qui nourrissent sa recherche, approfondie selon une méthode qui considère qu’une œuvre d’art a la même « qualité » qu’un travail scientifique. Elle s’appuie notamment sur la psychosociale, la pensée de Gilbert Simondon, et son expérience de performeur lors de conférences avec Jacques Rancière pour tenter d’établir les conditions d’une expérience individuante pour le spectateur qui questionne les limites éthiques et morales de ce que peut être une œuvre aujourd’hui.

Tom Castinel

Concrete Trees

Le projet Concrete Trees est une série de modules en béton visant à accueillir le travail d’autres artistes. Pour la réalisation de ces modules, j’utiliserai une technique artisanale très en vogue pendant la seconde moitié du 19ème siècle : le Rocaillage.

Guidé par une armature métallique, le béton est utilisé de façon ornementale et tend à imiter le minéral ainsi que le végétal. Le Rocaillage est à l’origine de décorations et d’ornements dans de nombreux jardins publics et privés. Ces ouvrages pittoresques s’expriment le plus souvent sous forme de ponts, rambardes, kiosques, fontaines. À la frontière entre sculpture et design, j'ai récemment utilisé cette technique pour réaliser du mobilier et des objets usuels. Ici, ce n’est pas tant la tentative d’imitation de la nature qui m’intéresse, mais davantage la qualité plastique du béton brut, ainsi que la fonction que j’attribue à ces œuvres. Afin d'approfondir mes connaissances techniques et historiques, j’envisage de partir à la rencontre d’artisans rocailleurs professionnel.les. Ce sera l'occasion pour moi de découvrir et recenser les différentes approches et réalisations dans ce domaine.

Par la suite, je développerai un nouveau répertoire de sculptures en Rocaillage, librement inspirées de formes vernaculaires type aire de jeux pour enfants, arbre à chat, display publicitaire. La taille, la forme, la facture de chaque sculpture seront définies selon la topologie des lieux qui les accueilleront.

La première sera réalisée dans un jardin, un espace accessible à tous, partagé entre les habitants et une association qui entretient le potager. Installé de façon pérenne, cet  espace d’exposition autonome donnera lieu à un programme d’invitation.

Cette programmation artistique découle d'un désir d'inventer mon propre cadre d’exposition, et d'offrir un terrain de jeu atypique aux invité.es.

L’idée est de permettre aux artistes et aux espaces d’accueil de s’approprier simplement ce format, cet outil, et ainsi de créer une chaîne d’invitations et d’échanges autour de ces sculptures.

Etienne Chambaud

Syrinx

Syrinx est une installation sonore générative non supervisée reproduisant les chants et les cris d’espèces identifiées d’oiseaux ainsi que leurs évolutions, leurs mutations et leurs métamorphoses au fil du temps.

Pierre Clement

Sensitive Warfare.

Il s’agira ici, de réaliser une installation d’envergure, un environnement immersif constitué de plusieurs types d’œuvres, sculptures et peintures, dialoguant les unes avec les autres. Sensitive Warfare, c’est le besoin d’affirmer aujourd’hui cette dualité très présente dans mon travail, un certain romantisme en combat permanent avec la notion de survie. Le cryptage, la furtivité, la notion de leurre, mais aussi l’optimisation des signes, des références historiques ou liées à l’actualité sont devenus pour moi un moyen d’accepter la profusion d’informations à laquelle nous sommes exposés. Nous vivons dans un monde statistique, cartographié, documenté, il reste des terra incognita, mais leur nombre se réduit jour après jour, l’homme veut connaitre sur le bout des doigts son milieu, le maitriser, le dompter. Je suis partagé entre l’envie de suivre ce mouvement et le besoin que tout cela reste mystérieux. Je passe mon temps à me raconter des histoires à partir de ces choses bien réelles. Cet environnement sera le décor, mais aussi le noyau, de l’une de ces histoires.

Bastien Cosson

Peinture transitive

Je souhaite entamer une recherche autour des figures d’artistes qui ont créé des espaces de diffusion comme outil de résistance à une injonction productive répandue. J’ai en tête des artistes historiques comme Robert Filliou, Marcel Broodthaers, Philippe Thomas mais aussi plus contemporains comme Fernanda Laguna et Cecilia Pavón membres de Belleza y Felicidad à Buenos Aires ou encore André Sousa et Mauro Cerqueira membres de A certain Lack Of Coherence à Porto. Ces artistes ont une pratique qui déborde de l’atelier ; tous ont eu besoin de créer des formes classiques, mais parallèlement tous ont aussi ouvert des lieux comme des espaces mentaux leur permettant d’élargir leur création.

Mon projet de recherche se déroulerait en trois étapes :

1/ Une première approche historique de regroupement de textes autour d'artistes dont je me sens en filiation, en rencontrant des théoricien.nes et historien.nes de l’art.

2/ Une compilation d’entretiens avec des artistes qui ont monté des structures autonomes, aller à leur rencontre de Lisbonne en passant par Porto, Rotterdam, Genève, Bruxelles...

3/ J'envisage la constitution d’un recueil de toutes les discussions et textes comme une pièce-manifeste, le point de départ pour une exposition qui aura lieu à la suite de ces rencontres. Ce recueil dialoguera avec une série de peintures nouvelles, des peintures sociales, des peintures transitives.

Franck David

Girl head, échange corps contre image

Girl head, China girl, Leader lad, Leader lady, sont autant de désignations pour une situation d'invisibilité. Les femmes constituant la quasi-totalité de ces appellations qui si elles ont bien un corps — et c'est même la raison de leur emploi à l'image — n'ont pas de figure, pas d'identité.

Ces femmes employées, photographiées par les laboratoires de développement des pellicules cinématographiques, n'apparaissent sur les bobines, que selon une temporalité très courte, pas plus de trois à cinq images. Et leur apparition est conditionnée par l'adresse, ces photos ont pour fonction de servir à l'étalonnage du film pour sa projection d'où la présence des mires. Le seul projectionniste est à même de voir ces femmes dont les images sont placées en toute fin ou tout début de bobines.

C'est donc bien de faire image qu'il s'agira ici dans ma proposition. Restaurer cette visibilité qui manque et par là-même une parité défaillante. Je souhaite identifier et retrouver ces femmes, pouvoir les nommer, et par son aspect hautement cinématographique, j'en suis venu à considérer comme moyen pour ce, de faire appel au service d'un.e détective privé.e spécialiste en personne disparue. Une fois retrouvées, refaire aujourd'hui ces mêmes clichés mais cette fois avec un corps marqué par le temps écoulé et un regard face objectif. Et plutôt que de dupliquer les mires d'origines, je souhaite les transposer par des œuvres d'art contemporain, d'abstraction géométrique. Enfin réinsérer ces nouveaux clichés dans leur fonction première d'étalonnage au sein du circuit cinématographique.

Jean-Charles de Quillacq

L’odeur du travail

Bientôt, j’aurai confectionné un liquide artificiel synthétisant ma propre sueur. Il me sera permis d’en générer des litres. Je souhaiterais poursuivre ce projet et arriver à intégrer ce liquide dans de nouvelles formes plastiques plus ou moins sculpturales, poreuses et à demi fluides, qui pourraient véritablement le transpirer. J’expérimenterai différents matériaux et testerai de nouvelles techniques de travail. Je cultiverai également quelques bactéries, attachées à certaines odeurs en particulier que mes sculptures dégageront. Par extension, je m’intéresserai à l’indus- trie du parfum, des déodorants, au matériel que l’on développe en réponse à cette sécrétion corporelle, aux substances et aux textiles dont la technologie permet aux corps de respirer.

Alain Declerq

Leaks

Leaks est un projet de film et d'installation. Diffusé sur une table de réunion dans laquelle sont incrustés des écrans, le film Leaks se présente comme une suite de séquences formant un film d'une heure environ. Il présente en parallèle les auditions d'une commission d'enquête et des rushs vidéo d'un agent de renseignement.

Kévin Desbouis et Camille Alena

Salt Bath

Salt Bath est un projet de film mené en collaboration par Kevin Desbouis et Camille Alena. Ce film met en scène une ville en proie à une horde de vampires dont la présence génère de nouveaux systèmes relationnels, économiques, attentionnels, ainsi qu’une redistribution du langage. La présence des vampires, leurs discours et leurs actions dévoile une érotique nouvelle basée sur le crime, la poésie, le jeu, qui met à mal un mode de vie soudainement confronté à la représentation d’une altérité radicale. Le film se concentre sur les liens de contamination, d’attirance, d’incompréhension, de rejet, que développent les vampires et les non-vampires, et ce au travers de la trajectoire d’un personnage quittant progressivement son rôle initial de témoin pour se faire acteur et complice des situations qu’il traverse.

Nicolas Deshayes

Gargouilles

Le projet que je souhaite réaliser explore la relation entre le corps humain et la production industrielle mécanisée de pièces prothétiques médicales. Il joue sur la nature hybride des matériaux utilisés dans ce domaine.

Le projet se déroulera en trois étapes : une période de recherche et d’expérimentation par l’intermédiaire d’une résidence au sein d’une entreprise du Puy-de-Dôme, une période de mise en œuvre des savoirs acquis par la production de nouvelles séries d’œuvres, puis leur diffusion dans le cadre d’une exposition monographique.

A l’issue de cette résidence, j’aimerai développer nouvelle série d’œuvre qui convoquerait des travaux autour de la notion d’organes et de peau (flux, matières, poils).

Réalisée en fonte de bronze, ce corpus fera référence au corps humain, mais aussi à l’histoire de la métallurgie et à la coulée des métaux présente sur le territoire où elle sera produite, ainsi qu’à la minéralogie du rocher. Ici l’écorce terrestre deviendra cuir chevelu. Ces œuvres prendront l'apparence de blocs de chair prélevées pour révéler une topographie stratifiée et sa croute capillaire. Chaque bloc sera percé d'aiguilles qui auront à la fois l'apparence de poils émergents, de follicules pileux, mais aussi de pièces capables de suggérer des éléments fonctionnels performants, tels que la forêt, renvoyant au processus robotisé, mécanisé de l’histoire de la réalisation de ces œuvres.

Marie-Pierre Duquoc et Nicolas Gautron

Jeu(x) de sociétés

Jeu(x) de sociétés (titre provisoire) est une œuvre multiple et éditoriale, un jeu, des jeu(x), coopératif(s) et introspectif(s), un dispositif plastique, performatif, ludique et poétique, un protocole de recherche, d'enquête et de rencontres, un processus de co-création, collaboratif et contributif itinérant, un dispositif artistique et documentaire qui interpelle nos formes sociales et invite à élaborer collectivement d'autres imaginaires du futur, une œuvre in progress.

Bérangère Fromont

Adventices 1,2,3

"On habite ce que l'on peut : la faïence, la baignoire, le hlm, le trottoir, on construit une cabane. Du début à la fin on utilise l'amour comme survie collective." Fièvreuse plébéienne. Elodie Petit

Au 19 ème siècle l'homosexualité est inventée comme crime et maladie mentale en Europe. En 2018 alors que le mariage et les lois protègent désormais, les actes violents homophobes ont augmenté en France de 34,3 %. L'homosexualité déclenche toujours autant de haine et de rejets. Mon travail sera axé sur la représentation de l'homosexualité féminine qui se trouve à l'intersection de plusieurs discriminations. Sous représentée , invisibilisée dans l'art comme dans la société contrairement à la culture gay. Fantasmée, déformée, colonisée, la représentation des lesbiennes dans ma jeunesse se résumait à quelques personnages de violentes tueuses en série ou des filles calibrées pour exciter les hommes dans le cinéma pornographique. Le temps est venu de fabriquer nos propres archives et nos propres récits. “Fais un effort pour te souvenir ou à défaut invente” écrivait Monique Wittig. Adventices 1,2,3 est né d’un désir de combler les manques dans les représentations des minorités sexuelles et identités “queer”, de reprendre une place dans l’espace public en même temps que dans l’histoire de l’art. Lutter contre l’effacement, l’invisibilisation en utilisant la photographie à la fois comme medium de la révélation, et de l’archive. Mon approche de ce sujet est à la fois intime et politique. Photographie et poésie avec les textes d’Elodie Petit se mêleront pour tisser ensemble un nouveau récit, notre récit.

Hadrien Gerenton

The Magnetic Wells

Les déserts peuvent être vus comme le théâtre d’opération anonyme et silencieuse. Par définition un désert est une zone de terre où les précipitations sont rares et peu abondantes, et où, par conséquent les conditions de vie sont hostiles pour la faune et la flore. Leurs spécificités géologiques et climatique extrêmes rendent la vie des espèces plus compétitives.

Cette sorte d’incompatibilité  avec l’idée de conquête des territoires  - due à sa rudesse- tend à considérer les déserts comme des lieux propices à la naissance de nombreux mythes et fantasme. Même si aujourd’hui la plupart sont toujours inhabités, et toujours considéré comme hostile, les activités humaines s’y sont développées de façon exponentielle. Les progrès technologiques et mécaniques on facilite l’implantation d’industries capables de prélever leurs ressources à un rendement maximal. Au travers de ce projet je souhaiterais développer une enquête de deux mois, dans les déserts du Southwest américain, en particulier la région du Texas qui borde le désert du Chihuahua, qui est le plus grand désert chaud d’Amérique du Nord. Le Texas de L’Ouest est un catalyseur d’image d’ images immédiates, presque universelles, tant la culture occidentale s’en est fait le véhicule : immensité de ses terres arides, sa relation mystique a la nature, ainsi territoires d’une conquête pétrolifère. Sa diversité culturelle ainsi que sa relation complexe aux mythes et légendes viennent enrichir mon intérêt pour cette partie du globe.

Marie-Ange Guilleminot

Touchez-voir

Je souhaite créer une œuvre film/performance activant un dispositif artistique initial « Touchable » destiné aux aveugles et provoquer une rencontre avec notre histoire collective en créant un itinéraire sensible à travers l’une des plus belles collections d’Europe de vêtements et d’accessoires (Palais Galliera Musée de la mode de la Ville de Paris.). Elle reposera sur une expérience de l’invisible lors de performances gestuelles, d’improvisation, de défilé « autrement » déployés par des personnes aveugles et malvoyantes. Les vêtements, les touchables, pourront être essayés. Ainsi pour le petit costume du Dauphin, sa réplique pourra être portée par un enfant. J’ai choisi de filmer cette activation d’une pièce exceptionnelle à Hyères, la Villa Noailles offrant le cadre idéal de cette rencontre. L’esthétique de ma recherche est basée sur la performance gestuelle trouvant parfois ses origines dans mes rencontres avec l’Extrême-Orient, le Japon, elle use de la force subtile dont toute idée de permanence sait confondre les extrêmes. Ainsi il est question: d'objets, de leurs usages, de tenues vestimentaires, d'apparence ou d'image persistante, au regard de nos limites à percevoir. Par ailleurs, La Méca FRAC Nouvelle-Aquitaine qui s’intéresse au public en situation de handicap pourrait être un des partenaires de diffusion de l'œuvre film/performance.

Julia Huteau

Luminance

Luminance  Une grandeur additive et mesurable, une sculpture colorée par un jeu de lumière en mouvement. Le principe de la photographie rassemble les composants majeurs du projet Luminance : Quelle quantité de lumière pendant combien de temps ?

La recherche Luminance est d’abord constituée d’un volume, une forme en terre extrudée, qui s’étire. C’est un rythme, une temporalité, ou encore une étendue qui se matérialise.  Est-ce que le temps est un mouvement dans un espace, un avatar dans la durée ? Le physicien et philosophe Étienne Klein énonce ce questionnement parmi d’autres concepts temporels. Le projet Luminance est une proposition de figuration de la durée, une occasion de penser et d’observer d’autres phénomènes. 

Il s’agit aussi d’explorer la couleur par le mouvement de la lumière. De questionner les relations entre un volume et un environnement. Ajouter l’onde lumineuse aux éléments céramiques bruts accentue le mouvement créé et amorcé par la pâte argileuse. La synthèse additive des lumières augmentera le volume : la forme devient animée, s’éloignant encore un peu plus de l’objet. Elle nous fera accéder à de nouveaux pans du sensible et permettra de faire émerger d’autres questions.

Le projet de recherche Luminance est une aventure. Il cherche à rendre le temps visible par la matière, l’éclairer autrement pour le donner à voir : voilà des mouvements dans l’espace qui ouvre de nouveaux horizons.

Olivier Huz

Le design comme bruit

En 1953, Ray et Charles Eames réalisent le film «A Communications Primer» dans lequel ils explorent la théorie de la communication énoncée par Claude Shannon et Warren Weaver quelques années plus tôt. Développée depuis le point de vue de l’ingénieur, leur ouvrage décrit un modèle de communication généraliste basé sur la transmission d’information et s’appuie largement sur son aspect le plus technique. Un détail dans le film des Eames constitue le point de départ de mon projet: le «bruit» qu’il est nécessaire de réduire dans le processus de la transmission d’information est représenté à l’aide d’étoiles qui rappellent le logotype de leur agence de design. Cette figuration d’un phénomène indésirable sous les traits du design suggèrerait-elle que le designer interfère lui aussi dans cette transmission? Dans le diagramme, si on identifie bien le médium, nommé «canal de diffusion», il manque précisément le designer graphique, dont la place semblerait ainsi être proche de celle occupée par le bruit. Plutôt que d’envisager cette position comme problématique et contre les tenants d’une présence invisible de la typographie, il sera question d’étudier des objets graphiques de toute sorte qui assument cette proximité, quitte à user du bruit et l’amplifier au besoin. Il n’est toutefois pas question de confondre tout à fait bruit et designer graphique, mais d’observer comment ce dernier peut l’utiliser comme un outil pour donner une voix sociale et politique à la construction du sens.

Virginie Ittah pour le duo Ittah Yoda

Chronos

À l’aube d’une nouvelle ère, celle de la société post-anthropocentrique où la nature humaine se doit d’être réinitialisée, le projet CHRONOS questionne la séparation de l’objet et du sujet ainsi que la scission même entre culture et nature au regard de notre interdépendance avec les autres êtres. CHRONOS, une installation immersive, véritable espace de liaison du monde réel et virtuel sera composée de plusieurs sculptures connectées à une œuvre de réalité virtuelle. Les sculptures présentes dans l’œuvre VR et dans l’installation seront issues de formes hybrides à la rencontre de nos formes digitales et de reconstruction 3D provenant de la flore et la faune sous-marine.

Nous souhaitons dans le cadre du nouveau projet CHRONOS explorer de nouvelles techniques de la photographie par le biais de la photogrammétrie et de la reconstruction en 3D d’images sous-marine.

Le résultat sera de nouvelles formes hybrides à la rencontre du réel et du virtuel intégrées dans notre prochaine œuvre VR et également imprimées via lithographie et impression UV.

Ces nouvelles formes seront également les modèles pour une nouvelle série de production de sculptures en pâte de verre soufflée que nous souhaitons développer avec le Cirva à Marseille au mois de mai/juin 2021. Les sculptures faisant partie de l’installation durant les prochaines expositions contiendront le liquide microbiologique précédemment reconstitué en 3D avec l’observatoire océanologique et constituant ses formes hybrides.

Pierre Joseph

Choix des plus belles roses

Mon projet initié en 2016 #pierrejosephredouté qui a pour origine et prétexte l’homonymie qui me lie au peintre botaniste de la fin du XVIIIe siècle, a évolué de différentes façons. Son implémentation dans le référencement Google devient de plus en plus prégnant avec le temps tandis que mon intérêt pour son sujet, les fleurs, est de plus en plus sincère : de simple prétexte, il est devenu l’enjeu même d’une réflexion sur mon rapport à la nature. Les fleurs passent de sujet (objet) à sujet (personne, individu).

La généalogie de cette série que j’entends entreprendre va ainsi : Joséphine de Beauharnais constitue à Malmaison la plus importante collection de son époque de roses avec plusieurs centaines de variétés. Pierre-Joseph Redouté les recense avec des dessins qui recouvrent trois éditions. Cette diffusion des connaissances au travers de planches réalisées par des graveurs et des peintres subventionnés permettra par la suite l’avènement de roseraie comme celle de L’Haÿ-les-Roses.

C’est dans celle-ci, entre autres, l’une des plus majestueuse que je souhaite poser mon équipement photographique pour produire un recensement, une sorte de série sans fin de photographies de roses toutes différentes. La roseraie du Val-de-Marne dénombre 2000 espèces différentes…

Le principe est de photographier sur place « le maximum » de variétés de roses choisies et prélevées en m’attachant à trois lieux différents, trois roseraies : celles de Bagatelle, de Haÿ-les-Roses ainsi que celle du Château de Mesnil Geoffroy.

Bani Khoshnoudi

El Chinero, l'empreinte et l'archive de la migration

El Chinero est une colline à 140 km au sud de Mexicali, dans la région de la Basse-Californie au Mexique. Aux alentours de 1916, une centaine de migrant.e.s chinois.e.s meurent ici en traversant le désert. Que s'est-il passé ? Qui se rappelle de ces gens ? Sans aucune trace ni aucune image pour en témoigner, comment commémorer les tragédies qui ont marqué l’histoire des migrations ? Quelle place auront dans notre mémoire, dans l’histoire de l’humanité, les exilés et les migrants qui disparaissent, qui restent anonymes et invisibles ?  El Chinero est en quelque sorte un monument à ces morts au milieu de rien, sans en être un monument officiel. Un lieu de tragédie sans vestiges ni traces, sans empreintes de ce qui s’est passé, mais un site où il reste des possibilités pour faire des liens avec notre présent. Projet de recherche et d’expérimentation avec des matières photographiques, filmiques et le dessin, je voudrais combler ce « vide » par la création d’une archive expérimentale qui documente le site même.  Un travail de mémoire et une réflexion sur des thèmes qui évoquent aussi la fragilité de l’archive, sa finitude mais aussi sa nécessité. "El Chinero" est le premier projet d’une série que je développe sur des sites géographiques en lien avec des tragédies migratoires.

Laurent Lacotte

Bas-reliefs

L’aide au projet permettra la reprise et la poursuite de recherches spécifiques autour des mobiliers dits d’empêchement ainsi que la réalisation d’un nouveau corpus d’œuvres s’y afférant, dans la lignée de la série « Bas-relief » amorcée en 2017.

L’aide sera également employée à la réalisation de tirages photographiques rendant compte d’interventions artistiques effectuées dans l’espace public ainsi qu’à la conception et la production d’éléments de monstration spécifiques.

La première restitution de ce travail de recherche et de production est prévue lors de la future exposition personnelle de l’artiste à Doc!, espace de production et de programmation artistique à Paris, en septembre 2021.

Suzanne Lafont

Plays

Plays est un diaporama numérique en boucle. Il prend la forme de trois projections alignées, de dimensions équivalentes (185  x 104 cm chacune). Le titre évoque une situation théâtrale, l'action se déroulant simultanément sur trois plateaux. Chacun de ces plateaux est occupé par une trentaine de scénettes aux intrigues et thèmes divers. L'ensemble est une multitude d'actions évoquant un spectacle de variétés.

On connait ces présentoirs de cartes postales au fonctionnement rotatif vertical. Le regardeur actionne de la main le ruban d’images, les faisant entrer et sortir à son gré de son champ de vision. Par son réglage coulissant la moitié des vues que compte le dispositif se voit retenue dans l’ombre quand l’autre moitié est exposée au regard. On peut identifier dans ce jeu lié de l’apparition et de la disparition un principe cosmique élémentaire.

Le projet élargit cette mécanique céleste à trois objets. Les rencontres entre les trois mondes apparaissent inédites à chaque boucle/révolution.

Fanny Lallart

Les mots qui nous manquent

Prolongement d’un projet de collecte de paroles initié en octobre 2020 à travers une recherche documentée sous forme sonore.

Cette recherche prend appuis à travers les pensées de deux théoriciennes :

- bell hooks (1952, Kentucky)

- et Audre Lorde (1934,New York - 1992, les îles Vierges)

autour de la question à la fois pédagogique et artistique de l’auto-définition de nos modalités d’existence en tant que jeunes artistes.

Je souhaiterais effectuer un voyage aux Etats-Unis et un à Berlin pour consulter leurs archives et mener des entretiens.

Juliette Minchin

Joyeuse carcasse

"Joyeuse carcasse" est une invitation à plonger au cœur de la matière-cire en constante métamorphose. 

Utilisée dans différentes cultures pour accompagner le passage de la vie à la mort, la cire est aussi symbole d’espoir et d’éternité.  « Sculptée, fondue, allumée, moulée puis refondue, dans l’atelier de Juliette Minchin, cette cire rose est une joyeuse carcasse qui renaît d’elle-même. » - Elora Weill-Engerer.

Tantôt lisse, fripée, plissée ou fissurée ; chaude puis froide; liquide, molle ou solide; je réactiverai la cire à l’infini, la même matière sera utilisée et refondue pour des pièces successives comme une âme quitterait un corps pour un autre. Ainsi, le projet de recherche ne cessera de se détruire et de renaître comme un mandala, défini par la notion de temps cyclique. C'est au sein du champ d'expériences archivées ou réalisées que l'aspect cyclique et répétitif pourrait réveiller chez le spectateur des réflexes mystiques ou spirituels.

 La mue -peau que l’on perd et qui se régénère- tant pour ses coloris de carnation que pour sa capacité à représenter l’éphémère devient le sujet de la recherche. Des structures métalliques recevront des peaux de cire chaudes, vivantes, fragiles et pérennes à la fois, pouvant prendre la forme de lambeaux de tissus. En réinterprétant des références antiques qui renvoient à des formes archétypales et en utilisant une matière liée au sacré, les sculptures s'apparenteront à des autels vivants. 

 "Joyeuse carcasse" est un projet de recherche pluridisciplinaire pouvant aboutir à une série dessins préparatoires, un projet photographique et éditorial, puis à une installation monumentale et une performance et enfin à un court-métrage. La dimension performative donnera lieu pour la première fois à un moment de partage avec le public qui sera immergé dans le processus de fabrication de l’œuvre.

Raphaël Moreira Gonçalves

Ondines_101

Je souhaite effectuer des recherches sur les technologies de communication liées au paranormal, afin de créer une installation qui mêlera sculpture, vidéo et réalité virtuelle. Cette installation, sous la forme d'une espèce de triptyque s'appellera Ondines_101 et elle consistera en un assemblage sculptural de trois parties distinctes qui s'imbriqueront entre elles grâce à un jeu de matière entre bois, écrans, plexiglas coloré, métal, tissus. La partie centrale de l'installation sera une machine, une « spirit box », qui est censée rendre possible la communication avec d'autres dimensions grâce aux ondes radios. Celle-ci aura un rôle crucial dans le processus créatif puisqu'elle contribuera à certains choix artistiques. Il s'agira alors de créer un dispositif unifié, aussi à travers une vision métaphysique du virtuel, qui tentera de mettre en lumière notre rapport à la croyance magique dans les technologies contemporaines de communication, tout en s'attachant à visiter les fantômes d'une mythologie personnelle.

Grégoire Motte

Witloof

Witloof : un drame lyrique et une installation qui met en scène l’apparition fabuleuse de la première endive. En plein milieu de la révolution belge de 1830, Jan Lammers, un paysan qui a dissimulé sa récolte de chicorée dans l’ombre de sa cave sous un tas de fumier pour la préserver de l’impôt et du pillage, découvre un beau matin, émergeant de la boue, une chose inconnue : petite pomme aux feuilles serrées, charnue et opaline. Jan la nomme Witloof, qui signifie Blanche Feuille. Alors que par le vasistas lui parvient la rumeur de la révolution, Jan demeure incapable de gagner la surface pour y prendre part. Subjugué par cette créature sans exemple, pendant trois jours et trois nuits, il la regarde, il lui parle, il lui joue des airs avec son épinette des Vosges. Lorsque les troupes hollandaises battent en retraite, Jan, qui veut rejoindre ses camarades en liesse, entreprend d’arracher Witloof du tas de fumier pour l’emporter avec lui. Ce faisant il découvre sa racine (qu’il avait oubliée), aussi tordue et louche, que Witloof est idéale.

Plus tard on systématisera la culture de Witloof sous le nom d’endive ou de chicon, avec la technique qu’on appelle le «forçage». Mais la plus grande difficulté sera d’en atténuer - tout comme dans l'esprit des révolutionnaires du bas peuple vite abandonnés après la victoire - l'amertume.

Karl Nawrot

Reclining Figure : Bone

« Reclining Figure: Bone » est un projet de caractère typographique inspiré par le sculpteur anglais Henry Moore (1898 – 1986), et plus particulièrement sa série intitulée « Reclining Figure », dont une des œuvres les plus emblématiques est déposée, depuis 1998, dans le jardin des Tuileries. À l’image de la série de sculptures – que Moore n’a cessé d’enrichir par de multiples variations tout au long de sa vie – le projet sera de réaliser un alphabet qui ne soit pas figé mais qui ne cesse de se transformer, de s’enrichir au fil du temps.

Cécile Noguès

Digital Sylvestre

En m’appropriant « le corps sans organes » réactualisé par Florence Burgat dans Qu’est-ce qu’une plante ? Essai sur la vie végétale, ma demande de soutien à un projet artistique réunit les axes issus des observations, lectures et pratiques qui sont ressorties de cette séquence inédite d’urgence sanitaire et sociale globalisée. La nature, la viralité, le règne numérique font partie d’une réalité que je veux associer dans « Digital sylvestre ». Mon projet met en place un scénario de recherche allié à des pratiques, en trois étapes : l’écriture poétique à partir de la biosphère, la traduction en terre, sa modélisation numérique et l’impression (hybride). J’irai à la rencontre du domaine des sciences naturelles, de la forêt, de la technologie 3D et de l’imagerie scientifique, et des gens qui y exercent.

Bertrand Planes

Poèmes en morse

Des balises solaires de jardin sont modifiées, elles sont équipées d’un récepteur radio miniature et leur luminosité est très fortement augmentée. L'artiste crée ainsi son propre dispositif : une source lumineuse pilotable à distance, visible de nuit à plusieurs dizaines de kilomètres et autonome en énergie.

Après une longue ascension il place la balise dans le paysage. De nuit depuis la plaine l’usage d’un interrupteur active la balise qui émet un poème en morse visible à l'ensemble des habitants de la vallée. Une photo longue pose garde la trace du message.

Yasmina Reggad

Les pays que j’habite s’étoilent en archipels

Ce projet a émergé de la formation de Solidarity Choirs, les Chœurs solidaires composés en majorité de femmes militantes actives dans les villes où est performée, depuis 2016, we dreamt of utopia and we woke up screaming. Episode 1. La radio des images qui s’écoutent. Les membres du chœur y prêtent alors leur voix dans leur langue maternelle à des figures invisibilisées de l'histoire. Ce projet poursuit la recherche menée dans l’archipel des Îles Canaries sur la radio indépendantiste en exile La Voix des Canaries Libre qui émettait depuis Alger dans les années 70. Je voudrais former un chœur intergénérationnel de siffleuses dans l’île de La Gomera. Nous composerons collectivement un manifeste qui sera performé en « Silbo gomero », le langage sifflé de l’archipel. La partition finale de ce manifeste sifflé sera alors transmise aux membres du Solidarity Choir de chaque ville où il sera invité.

Le territoire dramaturgique sonore sera inspiré de l'étude de la géopoétique d’Edouard Glissant. C’est sous l’angle des théories de la critique écoféministe postcoloniale dans/et de la phonoscène que cette recherche abordera l’histoire de la contribution des femmes aux luttes de libération à travers les notions de politique des langues (non-verbales) et de territoire (El Silbo étant considéré comme un territoire des manifestations de la colonialité du pouvoir). La transmission du manifeste final sera similaire à la méthode d’apprentissage du chant par les canaris. Sa diffusion et circulation se fera exclusivement entre militantes, dans la tradition des gestes rituels de lutte propres à l'écoféminisme.

Marie Reinert

Konzemba

KONZEMBA est une recherche qui tentera de révéler, à travers un film, des enregistrements sonores et écrits, le choc entre deux mondes : celui de récits de ressortissants congolais, sous forme de témoignages, chants et traditions orales et le monde internationalisé de la Cour Pénale Internationale, à la pointe de la modernité technologique.

Je cherche à rendre tangible la frontière de plus en plus serrée entre la technologique dite computationnelle (ses effets sur l’immobilité des corps et de nos cerveaux) et la force, la mobilité, l’énergie de la tradition orale lorsqu'elle traverse la forme chantée. Je pense ici à Brutalisme d’Achille Membé.

Sébastien Rémy

Sans titres (loss)

En 2011, dans le contexte de la crise post-électorale ivoirienne, le Musée des civilisations de Côte d'Ivoire (Abidjan) est victime d'un pillage. Cent vingt et une pièces sont volées parmi lesquelles des statuettes, des masques, des textiles, des poids à peser l’or ainsi que des bijoux. À partir d’une série d'entretiens menée avec des membres du personnel du musée, des chercheur.euses, des conteur.euse.s, et de nombreuses autres rencontres, ce projet revient sur ces événements de 2011, en même temps qu'il porte une réflexion sur le pouvoir des mots à figurer les objets spoliés. Ce projet a été lauréat des Résidences Sur Mesure de l’Institut français en 2019.

Sébastien Reuzé

Intra-Extra

INTRA EXTRA est le titre d’un montage vidéo-photo-musique s’inscrivant dans le contexte large d’une installation qui est une expérience à vivre, faisant intervenir la musique (des musiciens pour une création sonore), la photographie, le film, et où cohabitent les différents aspects de ma pratique.

Julia Rometti pour le duo Rometti Costales

Une saison analogiste

“Loin d’être appréhendé comme la production-création d’une chose nouvelle à partir d’une matière inanimée qu’informent l’art et le projet d’un agent autonome, le travail du vannier wayana se présente comme ce qui rend possible une véritable métamorphose, c’est-à-dire le changement d’état d’une entité existant déjà comme un sujet et qui conserve tout ou partie de ses attributs dans l’opération.(Descola, Par delà nature et culture, 2005)”

Notre projet s’inscrit au cœur de préoccupations élémentaires liées à notre pratique:

Comment faire ensemble, co-auteurs ou co-agents?

Comment être dans notre ensemble, sans être dans son centre?

Notre intention réside dans le désir d’expérimenter certaines méthodes et formats de production, en considérant les matériaux, les techniques, nous-mêmes, les durées, les événements imprévisibles et previsibles, comme des agents-entités participant à la création de formes. Nous entendons par “agents-entités”, des êtres, animés ou non, palpables ou non-palpables, visibles ou invisibles, quantifiables ou pas, des choses, des situations, des états, des qualités, des processus; qui interviennent dans la composition de ce qui nous entoure, un monde composé d’une infinité de différences.

Maxime Rossi

L’oiseau de feu

L’Oiseau de Feu est un projet multimédia collaboratif impliquant les élèves d'un collège à Paris, le botaniste Florian Jabbour, la chercheuse en biologie moléculaire Marie-Christine Maurel et le mime Ivan Bacciocchi.

Ce projet onirique prend la forme d’une simulation numérique d’ombres portées, avec comme point de départ diverses sources d’inspiration ayant servi aux décors et costumes créés par Chagall en 1945 pour le ballet de Stravinky.

Développé en collaboration avec une classe de collégiens à Paris, dans le cadre d’Orange Rouge, la chorégraphie augmentée sera captée par des combinaisons haptiques, et par une caméra à 360° suivant leurs déplacements, avant d’intégrer une animation digitale évolutive.

Les costumes de chiffons, perles et papier, imaginés en 1945 par Marc Chagall pour l’Oiseau de Feu, étaient inspirés par les statuettes Kachina des indiens Hopi d’Arizona. De nombreux surréalistes européens exilés du nazisme, trouvèrent refuge en terre Hopi, lors de visites dans les abris troglodytes du canyon de Coccocino. C’est dans ce même canyon, que Walt Disney avait imaginé le film Fantasia en 1940, dont le remake inclut l’Oiseau de Feu.

Evoluant parmi les ombrages et reflets de lumière du canyon (décor), eux aussi reproduits numériquement, s’animeront les ombres portées en mouvement (costumes) du ballet fantomatique exécuté par les collégiens.

Adrian Schindler

Tetuan, Tetuán, طتوان

Le film Tetuan, Tetuán, طتوان examine les traces que le passé colonial au Maroc a laissé dans la société espagnole, au moyen d'une méthodologie collaborative expérimentale. Il interrogera la production culturelle, l'espace public et l'imaginaire collectif à travers le prisme du fantôme, entendu comme écho de voix et de faits historiques passés sous silence. La Plaça Tetuan à Barcelone et le quartier Tetuán de las Victorias à Madrid, qui se sont appropriés le nom de la ville marocaine, ainsi que la salle de cinéma "Español" à Tétouan constitueront le terrain d'exercices narratifs de resignification. Le film sera réalisé de façon chorale avec un groupe d'acteur.trice.s, chercheur.se.s et activistes marocain.e.s et espagnol.e.s, établissant un espace critique polyphonique. Il sera ponctué de lectures, de déambulations et d'échanges informels au pied de monuments, dans des musées et des cafés, soutenant l'idée que l'oralité offre une résistance aux discours hégémoniques et favorise l'émergence d'autres imaginaires. En abordant l'iconographie orientaliste et coloniale, le tournage se confrontera à l'implication de la représentation dans les rapports de pouvoir et donnera lieu à une réflexion sur ses propres mécanismes. L'enjeu sera d’élaborer un processus de travail horizontal qui redéfinira la répartition des rôles dans la conception d'un film, l'exposant à l'inattendu propre à toute rencontre.

 

Chloé Serre

Agency_la vidéo

Agency_la vidéo est une déclinaison du projet Agency initié en résidence à La Galerie, centre d'art contemporain de Noisy-le-sec pendant laquelle Agency_le jeu et Agency_la performance ont été produits. Il s'agira à travers cette vidéo de questionner le concept de storytelling en convoquant Agency_le jeu et Agency_la performance.

Le storytelling est une stratégie de narration mise en place à des fins communicationnelles et plus spécifiquement promotionnelles. Utilisé pour créer une identité à une entreprise, humaniser une marque, il est aussi l'égide de la self promotion et de ce fait du success story. Désormais accessible à tout un chacun par la fonction « story » disponible sur les réseaux sociaux, il se personnifie et trouve son apogée dans le nouveau « statut» d'influenceu.r.se  qui corrèle popularité et placement de produit.

Agency est un projet en trois volets, questionnant ces nouveaux modes de communications publicitaires qui envahissent nos quotidiens pernicieusement. Agency_le jeu est un jeu de société coopératif dans lequel une équipe de scénaristes doit créer le meilleur storytelling. Agency_la performance, inspirée des Ted conference, dévoile LA méthode A.G.E.N.C.Y qui vous aidera dans vos futures créations de storytellings. Agency_la vidéo, mêle Agency_le jeu et Agency_la performance afin de questionner la façon dont nous habitons le monde à travers la parole marchande.

Louise Siffert

We have decided not to die

Je propose de faire une recherche approfondie des environnements construits par les architecte.s, artistes et poètes Arakawa et Gins au Japon. Cette recherche sera essentielle pour la génération des chorégraphies et de scénographies qui seront ensuite mise en scène dans mon film WE HAVE DECIDED NOT TO DIE. Dans leur projet «Reversible destiny», les artistes pensent le corps comme un «corps architectural», une plateforme à travers laquelle le monde ne nous préexiste pas mais est formé par nous. Iels estiment qu’une révision en profondeur de l’architecture et de l’esthétique redéfinirait ainsi la vie et ses limites. On peut se demander ainsi: Ne serait-il pas bon, voire étonnant, d’avoir enfin la possibilité de choisir d’être ou non mortel.le.s? Une architecture peut-elle perturber nos processus de pensée en perturbant notre expérience corporelle et nous permettre ainsi de voir les choses différemment ? Arakawa et Gins ont matérialisé ces concepts par le biais de sites architecturaux innovateurs; le cœur de mon projet est de visiter ces sites et de faire ainsi une recherche in-situ: une observation minutieuse de comment le corps réagit, se déplace et bouge dans ces espaces si particuliers. En plus de cette recherche corporelle, je consulterai les archives du bureau d'architecture qui se trouve à Tokyo, où se trouvent les documents en lien avec un projet inachevé que je souhaite poursuivre: une éco-communauté queer qui s'appelle "Reversible Destiny Healing Fun House".

Eric Stephany

La confiance

Le projet porte le titre générique de  « La Confiance / Εμπιστοσύνη ». Il propose une investigation autour cette disposition de l’esprit et du corps à travers l’écriture chorégraphique et sculpturale d'une série d'actions qui ont pour décor exclusif des halls d’entrée d’immeubles athéniens. Le hall d’entrée est le lieu de transition où se négocie en permanence le sentiment de confiance, dans un aller-retour incessant de personnes et d’objets. La confiance innerve l’ensemble de nos relations. L’ère pandémique, les mouvements migratoires, les crispations extrémistes, la radicalisation de nos positions, nous révèlent par la négative, combien la confiance est constitutive de notre relation au monde. Désormais, nous avons peur des objets, nous nous méfions des écrans, nous nous défions des dirigeants et des institutions. On dit que la confiance se mérite. La confiance n’est donc pas simplement un rapport au risque, comme voudrait le faire croire la pensée économique dominante, mais bien un rapport au monde. Elle renvoie à l’idée qu’on peut se fier à quelqu’un ou à quelque chose. La confiance place d’emblée celui qui l’accorde dans un état de vulnérabilité et de dépendance. La confiance est politique. Elle n’est jamais neutre. Elle est fondamentale et dangereuse. Elle précède l’amour.

Sarah Tritz et Stéphanie Cherpin

Ballard in Albisola

La Casa Jorn à Albisola (Italie) a invité une dizaine d’artistes, écrivains, vidéastes et curateurs pour une résidence qui se tiendra du 23 avril au 1er mai. Cette résidence sera suivi d’une exposition à la Casa Jorn qui se tiendra du 1er mai au 15 juin.

Pour se rendre à Albisola, on emprunte « l’autoroute des fleurs » reliant Vintimille à Gênes. Au début des années 1970, tandis que Jorn construisait sa maison et que l’on inaugurait les premiers tronçons de l’autoroute, le romancier J. G. Ballard terminait sa trilogie de béton, trois courts romans qui demeurent les plus célèbres écrits par le Britannique. Personne n’a encore osé s’emparer du troisième, Concrete Island [L’Ile de Béton], qui prend les contours d’une robinsonnade urbaine. À la suite d’une sortie de route, Maitland, le héros, est projeté dans un terrain vague perdu en contrebas des échangeurs d’autoroutes.

Outre les similitudes métaphoriques que propose sa narration (le bricolage d’un monde en contrebas d’une autoroute), l’évocation du roman dans la maison de Jorn suscite un certain nombre de principes, de l’ordre du collage contradictoire: envisager le béton au pays de la céramique, amener une zone urbaine dans la station balnéaire, tourner le dos à la mer pour regarder l’autoroute, faire jouer un « roman d’anticipation du présent » (ainsi que fut décrit Concrete Island) dans « une sorte de Pompéi inversé » (pour reprendre encore les mots de Debord sur la Casa Jorn).

Brigitte Zieger

Compositions précaires

Les Compositions précaires constituent un projet de sculptures par impression 3D réalisées à partir, d'une part, d'images d'objets urbains symboliques du capitalisme et dégradés au cours de manifestations récentes, et d'autre part de slogans et de graffitis féministes, le mixage de ces deux sources, indépendantes dans la réalité, synthétisant dans cette proposition l'antagonisme idéologique et historique entre ordre patriarcal dominant et utopies matriarcales alternatives.

La technologie utilisée pour les scans d'espaces réels crée des inexactitudes, des aberrations formelles et des manques qui sont à la base du travail poétique, métaphorique et sculptural des pièces résultantes. Y sont en effet confrontés une certaine déliquescence formelle inhérente à la représentation 3D, et la vivacité et l'énergie des graffitis et des slogans restitués en creux par la même technologie.

Les volumes qui en résultent relèvent par ailleurs davantage de la peau que de la masse, et sont destinés à constituer des espaces fluides, fragmentaires, précaires, contestant l'espace autoritaire de l'exposition elle-même, et proposant au spectateur, à partir d'une approche politique de l'espace, une expérience à la fois physique, poétique, autant que conceptuelle dans son rapport à l'histoire de la sculpture.

Dernière mise à jour le 10 mai 2022