Silent Spring

mor charpentier Paris 03
Théo Mercier, Recherche Studio, 2020

“ Quelques fausses manoeuvres de la part des hommes…et les arthropodes pourraient bien prendre le dessus.”
Rachel Carson, Silent Spring, 1962

Pour sa première exposition personnelle à la galerie, Théo Mercier propose une vision fantasque d'une archéologie du futur. Grâce à une chorégraphie bien orchestrée de sculptures et de peintures, il aborde, à partir d’une perspective mélancolique, les préoccupations écologiques actuelles et appréhende un temps suspendu en l’absence de l’être humain. Cette mise en scène d'un nouveau paysage est truffée de références ancestrales, de vanités et de matériaux précieux, associant le vrai et le faux dans des effets de trompe-l'oeil devenus classiques chez Théo Mercier, et confrontant les procédés de la nature à un mode de vie domestiqué. Le point de départ de ce projet se rapproche de Silent Spring (1962) de Rachel Carson, un essai révolutionnaire à l’origine d’une nouvelle conscience écologique aux États-Unis. Cependant, Théo Mercier est loin d'une dimension moralisatrice, mais propose plutôt une vision romantique qui s’appuie sur la mélancolie d’une époque révolue. Tandis que Carson craignait un printemps futur où le chant des oiseaux ne serait plus entendu, Théo Mercier fantasme sur le silence que les humains laisseraient derrière eux s’ils venaient à disparaître. L’étage supérieur de la galerie est occupé par une collection d'agates surdimensionnées. Cette série de peintures colorées perturbe notre perception de la matière et brouille les limites d’une représentation aux proportions réalistes. Le simulacre de ces minéraux gigantesques s’amuse autant des systèmes de valeur et d’appréciation, que de notre capacité à exploiter la nature. A proximité, un théâtre de sculptures se dresse devant le visiteur. Présentées comme des structures totémiques, des empilements de pierres archaïques, celles-ci sont constituées d’éléments variés témoignant d’une présence humaine: fragments de corps, offrandes votives ou même des déchets. Comme beaucoup d’oeuvres de l’artiste, elles véhiculent à la fois une idée d'équilibre et de fragilité pour créer autour d’elles une séduisante tension visuelle. Un monde souterrain envahit l’étage inférieur, le champ de fouille d’un passé futur. La notion de strates archéologiques est particulièrement manifeste dans Déjeuner sous l'herbe —clin d’oeil volontaire à la peinture de Manet—, une série de natures mortes sculpturales composées d’objets usuels transposés en fossiles fantastiques. A partir d’une gamme étonnante de matériaux —béton, onyx et véritables agates— les oeuvres se livrent à une esthétique du déchet rappelant quelques exemples classiques telles que les mosaïques antiques donnant l’illusion d’un sol non balayé. Ces objets ont été produits par des artisans mexicains, à partir des techniques pré-hispaniques utilisées pour la conception de masques et d’objets rituels. Nous sommes confrontés à l'idée d'une réalité figée dans le temps, révélant les restes de la civilisation actuelle. Une question se pose: s’agit-il là des reliques que nous voulons laisser derrière nous? Nous envisageons finalement que les actions quotidiennes de chaque individu sont aussi significatives et pertinentes qu’une politique menée à grande échelle.

Complément d'information

Le samedi 5 septembre de 14h à 18h sera présentée à la librairie Yvon Lambert —14 rue des Filles du Calvaire, Paris— la nouvelle monographie de l'artiste, La possession du monde n'est pas ma priorité (2020), publiée par les Editions Dilecta.

Artistes

Adresse

mor charpentier 61 rue de bretagne 75003 Paris 03 France
Dernière mise à jour le 28 août 2020