Sauvagerie domestique (commissaire invitée : Anne Bonnin)

James Angus, Katinka Bock, Alex Cecchetti, Sophie Dubosc, Dominique Ghesquière, David Renggli, Gitte Schäfer, Gedi Sibony, Miroslav Tichý, Sarah Tritz, Oscar Tuazon, avec la participation de Gyan Panchal
Exposition
Arts plastiques
Ecole municipale des beaux-arts /Galerie Edouard-Manet Gennevilliers
L’exposition "Sauvagerie domestique" explore un univers à l’échelle de l’individu : la maison. Elle réunit des artistes qui investissent les décors où nous vivons et s’intéressent au monde construit et à ce qui le compose matériellement – d’où l’aspect processuel de leurs œuvres. Considérant le bâtiment ("house") plus que le foyer ("home"), l’exposition privilégie une approche matérielle du domestique. Si les artistes invités se réfèrent à la maison, l’exposition fait cependant jouer ensemble, et en contradiction, des procédures très différentes. Certains s’intéressent à l’architecture en tant que construction (James Angus, Katinka Bock, Gedi Sibony, Sarah Tritz, Oscar Tuazon) tandis que d’autres "dé-fabriquent" des objets et des matériaux domestiques (Sophie Dubosc, Dominique Ghesquière, Gitte Schäfer). La diversité des artistes invités construit un paysage contrasté dont se dégage pourtant un paradigme : celui d’une « dé-architecture »* à échelle domestique. La maison devient donc un lieu de prospection formelle, à la fois atelier et chantier. La maison est un microcosmos à multiples facettes : à la fois abri, unité architecturale, domaine intime, "sanctuaire" du quotidien et, a priori, le seul lieu où chacun peut régner en maître et construire sa vie à sa guise. Si l’exposition plonge au sein d’un réel domestique multiforme, elle sollicite aussi l’imaginaire, mais un imaginaire ancré dans la vie matérielle. "Sauvagerie domestique" propose d’explorer le monde ordinaire comme un monde sauvage, à l’instar de Henry David Thoreau entreprenant de fonder une vie nouvelle, seul et en pleine nature, mais à côté d’une ville et de la civilisation**. En effet Thoreau veut « sauver une certaine sauvagerie du quotidien » en préservant « le caractère contingent, mouvant et imprévisible de la nature »*** au sein du monde ordinaire. La sauvagerie s’impose en quelque sorte avec la force du hasard, provoquant, dans le meilleur des cas, une capacité à l’accueillir : elle devient alors une puissance de transformation de la réalité. Freud l’appelle inquiétante étrangeté, Bataille, informe, Smithson, entropie. Dans la vie calmement ordinaire, elle se manifeste comme une présence sourde, cachée comme une « bête tapie dans la jungle »**** : force en attente et force d’attente. La sauvagerie ne se réduit pas à deux aspects extrêmes d’une nature primitive, force bonne ou mauvaise, ni ne consiste à tout détruire – on ne verra pas de porte cassée ni de table renversée dans l’exposition. Par "sauvagerie", j’évoque aussi un aspect refoulé par le modernisme – les modernismes, faudrait-il dire –, comme par les divers formalismes : la vie matérielle des formes. Les formes n’étant pas figées dans leur histoire, elles ne sont pas coupées de la réalité, au contraire, elles sont vécues, regardées, habitées, abîmées, donc transformées par l’usage. L’attention à la matérialité des formes inscrit ces artistes dans la lignée d’un art processuel des années 70, tel que le pratiquaient, entre autres, Eva Hesse, Gordon Matta-Clark, Robert Smithson ou Paul Thek, qui rejetèrent une conception trop formaliste et rigoriste de la forme. "Sauvagerie domestique" manifeste la part sauvage d’un art qui se pense aussi à travers le modernisme – notre classicisme –, comme en témoignent les nombreuses références, aujourd’hui, à l’art des années 20 et 30. En portant un regard formel sur les œuvres, l’exposition insiste sur la dimension plastique du monde qui nous entoure : notre environnement étant malléable, comment modifier nos espaces de vie, donc nos formes de vie ? Alors qu’il n’existe presque plus d’endroits qui ne soient connectés à un réseau de communication, le réel semble fuir un monde globalisé. En réaction à la perception d’un réel abstrait et lointain, ces fabricateurs***** agissent au sein d’un univers proche, qu’ils construisent/déconstruisent. Ils ressemblent à des pionniers qui conquerraient un monde nouveau qu’on appelle la vie ordinaire : ces conquérants domestiques déblaient l’horizon du présent. Anne Bonnin Commissaire de l’exposition * J’emprunte le terme à Robert Smithson ** Henry David Thoreau, "Walden ou la vie dans les bois" *** Bruce Bégout, "La découverte du quotidien" **** Titre d’un roman de Henry James ***** Cf. "Fabricateurs d’espaces", IAC, Villeurbanne, 2008

Accès mobilité réduite

Oui

Adresse

Ecole municipale des beaux-arts /Galerie Edouard-Manet 3 Place Jean Grandel 92230 Gennevilliers France

Comment s'y rendre

Depuis Paris 

MÉTRO : Ligne 13 terminus Asnières-Gennevilliers-Les Courtilles + 10 min. à pied ou 3min. Tram 1 arrêt "Le Village".
RER C : Gare de Gennevilliers + 10 min. à pied ou 3min. Tram 1 arrêt "Le Village".

ROUTE : Porte de Clichy, direction Clichy centre, Gennevilliers centre puis Village.

Dernière mise à jour le 2 mars 2020