Periphery of the Night

Exposition personnelle Apichatpong Weerasethakul
Exposition
Film, vidéo
Institut d'art contemporain Villeurbanne
Apichatpong Weerasethakul , "Power Boy (Villeurbanne)", 2021

  © Kick the machine – Apichatpong Weerasethakul

L’IAC de Villeurbanne accueille une monographie d’envergure, d’une ampleur encore inédite pour une institution publique française, de l’artiste et cinéaste thaïlandais Apichatpong Weerasethakul (né en 1970 à Bangkok), Palme d’or à Cannes en 2010, pour son film Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures.


Avec Periphery of the Night, Apichatpong Weerasethakul propose pour l’intégralité des espaces de l’IAC un projet immersif composé d’une vingtaine d’œuvres, incluant des pièces inédites. Le parcours, jalonné de chambres obscures, multiplie les supports et les dispositifs de projection, façonnant autant d’environnements initiatiques où s’exerce un véritable art de la dilatation. Porté par le rythme envoûtant des vidéos, leurs jeux d’ombres et de lumières, le tissu sonore pénétrant qui les accompagne, le visiteur est invité à circuler de l’une à l’autre dans un état de conscience altéré, à la lisière entre la veille et le sommeil.

Complément d'information

C’est cette lisière, cette « périphérie » nocturne que l’artiste explore, lui qui a passé son enfance en bordure de la jungle. La périphérie de la nuit : un espace-temps distinct et pourtant à portée de main, à quelques encablures du jour. D’emblée, chez Apichatpong Weerasethakul, la beauté plastique, objet du regard, est prolongée par un sens poétique plus large, qui touche notamment au langage : cette tendance littéraire à la métaphore imprègne ses œuvres, de l’intérieur comme de l’extérieur – l’artiste accompagnant régulièrement ses vidéos de poèmes ou de récits allégoriques. L’image ne peut rendre compte de tout ; il faut l’ouvrir, la confronter à d’autres manières de percevoir, afin que se répercutent plus finement en nous les couleurs, les micromouvements, la lumière et les sensations qui animent ses vidéos. La mise en espace de son travail, loin de nous rendre passif•ive•s, nous donne à pratiquer cette sensorialité exacerbée, nous en fait physiquement épouser les contours.

Ainsi, il s’agit d’expérimenter à notre tour cette forme élargie de l’attention, à la fois aiguë et délicate, que l’artiste accorde à ses proches et à son lieu de vie, saisissant parmi des fragments de quotidien une beauté étrange, parfois comique ou dérangeante. Ses « journaux vidéo », réalisés avec la petite caméra qu'il garde constamment près de lui, témoignent d’une empathie vibrante, qui pénètre tout ce qu’elle touche, jusqu’à rendre confuses les limites entre ce qui relève de soi et de l’autre. On y rencontre celles et ceux qui l’entourent, amis humains et animaux (à l’image de sa boîte de production Kick the Machine, qui juxtapose sur son site internet les rubriques « people » et « animals »). On y retrouve des visages familiers (Sakda, Jenjira), les comédiens croisés ailleurs, dans ses longs métrages, à peine dissimulés sous le masque de personnages de fiction.  

La douceur incomparable du regard qu’il livre sur ces êtres coexiste avec l’amertume liée à la situation politique thaïlandaise, évoquée explicitement au détour de plusieurs vidéos. Mais au-delà des références au pouvoir et à l’armée, c’est au cœur de sa quête sensorielle que s’enracine le geste politique d’Apichatpong Weerasethakul : pour lui, la caméra est capable de mettre au jour, en effleurant le réel, une communauté invisible, le réseau des forces qui courent entre les êtres et les choses, entre les différentes formes de vie (animales, végétales, spectrales). La technique et le spirituel s’amalgament au cœur d’un même processus de révélation, qui prolongerait notre cinéma intérieur, cet « appareil de projection » auquel l’artiste compare l’esprit humain. Dotée de cette capacité à sonder et à faire émerger l’invisible, l’image en mouvement apparaît comme le refuge des liens secrets, un sanctuaire fragile qu’il s’agit de préserver des agressions extérieures. Les corps assoupis qui peuplent les vidéos de l’exposition seraient les gardiens de cette mémoire virtuelle, basculant de rêve en rêve pour échanger leur savoir et entretenir sa vitalité*.

En nous plaçant sur le seuil de ces échanges, Periphery of the Night nous engage dans des pistes rêveuses, qui s’incarnent dans une vaste galerie de rythmes et d’énergies, parfois très éloignés du calme diffus et de la langueur caractéristique des films de cinéma. Au moyen de dispositifs singuliers (rétroprojection, projections suspendues, filtres holographiques), il s’agit de modifier notre horloge biologique, au point de nous faire éprouver d’autres cadences et de nous transformer, aussi soudainement et discrètement que change l’atmosphère, lorsque la lumière s’évanouit au gré d’un mouvement de rideau, d’une brise à travers les arbres, ou lorsque le soleil bascule de l’autre côté de l’horizon.

* D’après l’ouvrage de Érik Bordeleau, Toni Pape, Ronald Rose-Antoinette et Adam Szymanski, Fabulations nocturnes : Écologie, vitalité et opacité dans le cinéma d’Apichatpong Weerasethakul, Open Humanities Press, 2017

Partenaires

Le projet est porté par l’Institut d’art contemporain (IAC) Villeurbanne, en partenariat avec la Galerie Kurimanzutto (Mexique) qui représente l’artiste.

Horaires

Du mercredi au vendredi de 14h à 18h & le week-end de 13h à 19h

Fermeture estivale du 2 au 24 août 2021

Tarifs

Plein tarif
- 6.00€
La date à laquelle le tarif devient valide
Tarif réduit
- 4.00€
La date à laquelle le tarif devient valide

Adresse

Institut d'art contemporain 11 rue Docteur Dolard 69100 Villeurbanne France

Comment s'y rendre

L’Institut d’art contemporain est situé entre le quartier de la gare SNCF de Lyon Part-Dieu et les Gratte-ciel de Villeurbanne.

Dernière mise à jour le 13 octobre 2022