Pale Violet  de My-Lan Hoang-Thuy

Projet soutenu par le Cnap
Exposition
Arts plastiques
Galerie Derouillon Paris 03
My-Lan Hoang-Thuy, Untitled VI (painting), 2020

La Galerie Derouillon est très heureuse de présenter la nouvelle exposition personnelle « Pale Violet » de l'artiste française My-Lan Hoang-Thuy.
Avec le soutien du Centre national des arts plastiques

Quelle que chose

« J’ai étudié la Peinture mais je ne suis pas peintre ou peut-être pas encore ! Mon domaine d’expertise est la photographie et après un certain nombre d’années de pratique, je perçois assez bien ce que c’est que de devenir photographe. Cela se résume au fait d’appuyer sur un bouton.

De même, on peut essentiellement réduire la peinture au fait d’étendre un pigment sur une surface. C’est d’ailleurs pour cette simple raison qu’il est possible de faire le lien entre les grottes de Lascaux et la peinture contemporaine.

Voilà donc ce que c’est que de faire de la peinture. Mais c’est autre chose que d’être peintre. Être peintre, c’est avoir compris quelque chose de la Peinture. En tant que non-peintre, je ne peux parler de ce quelque chose qu’en me reportant de façon analogique à ce que je comprends de la Photographie. Dans le cas qui nous intéresse, ce qu’il faut comprendre de la Peinture est difficilement exprimable. En lisant des livres sur le sujet, on peut comprendre la Peinture mais on ne comprend pas quelque chose de la Peinture. Pour ce faire, il faut se poser des questions en peinture, ce qui implique à minima, d’étendre du pigment sur une surface.

Les questions en peinture de My-Lan Hoang-Thuy sont intéressantes pour au moins deux raisons. La première a trait à l’époque : qu’est ce que faire de la peinture aujourd’hui ? Quelles sont les techniques qui sont offertes au peintre et qui sont susceptibles d’étendre encore ce que nous définissons comme la Peinture ? My-Lan utilise de l’acrylique, une résine synthétique qui enrobe les pigments et qui a pour première qualité ou défaut de sécher rapidement. A contrario, l’huile dont la siccativité est plus lente permet de retravailler la peinture dans le frais. L’acrylique sèche aussi sans craqueler grâce à l’élasticité de ses polymères.

Ces qualités sont au cœur des usages que l’artiste fait actuellement de ce matériau. La peinture, dans sa plus stricte matérialité ne s’étend pas ici sur un support, elle est considérée comme le support lui-même. C’est à la fois un saut technique et conceptuel dont on peut faire remonter la généalogie hexagonale jusqu’aux expansions du sculpteur César qui a n’en pas douter, avait bien compris quelque chose de la Sculpture.

L’autre paramètre technique propre à sa peinture est un usage décomplexé de l’imprimante dans le droit fil des expérimentations d’un Wade Guyton. C’est l’image imprimée sur la peinture qui renvoie celle-ci à son statut de fond. Car la peinture, même quand elle n’est pas à l’huile, cherche toujours à remonter à la surface ! Ce mouvement ascendant crée la tension qui habite ces peintures de petit format.

Auparavant, dans les précédentes séries de l’artiste, les rôles étaient clairement définis : l’acrylique était matière et l’impression était image. Aujourd’hui l’acrylique s’agrège en motifs et en formes, elle dit déjà bien plus de choses en Peinture. On peut y retrouver un écho contemporain de la petite peinture Nabi de Paul Sérusier, intitulée Le Talisman. Bref, la peinture, tout en continuant de faire matière, fait image.

Ce qui nous amène à la seconde raison qui fait que les questions en peintures que pose My-Lan sont intéressantes. Il y a d’autres images qui habitent ces peintures : des corps féminins nus qui s’étirent comme des liquides sur du verre, à la surface de ces images en acrylique. Ce corps qui se répète est celui de l’artiste, sans qu’il soit pour autant question d’autoportrait. Comme pour les premières photographies en noir et blanc de Cindy Sherman c’est avant tout la disponibilité immédiate de ce corps qui en fait l’intérêt. C’est donc un matériau, au même titre que l’acrylique. Cette figure ne l’emporte pas sur la matière et, tandis que nous avons l’habitude qu’une image ancre la peinture dans la figuration, ici, tout semble plus flottant. La peinture et l’impression hésitent à s’unir en une composition ou a rester concurrents pour la conquête de notre regard.

On pourrait donc conclure de cette façon : dans le cadre des peintures de My-Lan, la peinture acrylique pose à ces images de corps imprimés la même question que l’écran de mon téléphone aux images des sites pornographiques que je consulte.

Sans connaitre l’exacte teneur de cette interrogation, je sais pourtant qu’il s’agit d’une bonne question en Peinture. »

Aurélien Mole

Complément d'information

Vernissage le 15 octobre 2020

Horaires

Du mardi au samedi de 14h à 19h

Tarifs

Entrée libre

Adresse

Galerie Derouillon 38 rue Notre Dame de Nazareth 75003 Paris 03 France
Dernière mise à jour le 28 septembre 2020