Manifester En l'état, une enquête poétique
Franck Gérard, <i>Manifester En l'état, une enquête poétique </i> - Marseille, rue Méry, deuxième arrondissement - commande publique du Centre national des arts plastiques, 2013.
Manifester En l’état, une enquête poétique de Franck Gérard s’inscrit dans la suite de l’appel à projet passé en 2011 par le CNAP dans le cadre de la relance de la commande publique photographique.
Franck Gérard se plonge dans la vitalité et la richesse de la vie marseillaise, de ses intensités et ses temporalités, au gré des promenades, des dialogues avec les gens. Il observe des éclats poétiques au quotidien, à travers la manière dont chacune et chacun de ses concitoyens transforme la ville par ses gestes, ses pratiques de l’espace. Cette commande est présentée pour la première fois dans l’exposition « En situations » au Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur du 26 septembre au 20 décembre 2014.
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EN L'ÉTAT
« En l’état, 13 juillet 1999 - Aujourd’hui est un corpus composé de dizaine de milliers d’images.
Une tentative de décrire le monde, une sorte « d’encyclopédie » de mes errances, de mes rencontres au sein de la rue. La méthodologie appliquée est simple ; se laisser porter à travers les espaces, le plus souvent urbains, par son regard, par la marche. S’ouvrir le plus possible à l’extérieur. Etre un « voyant ». Cette forme de dérive obsessionnelle m’a conduit à la fabrique compulsive d’images que je mont(r)e sous forme d’expositions, de projections, de conférences « performées », ou encore de promenades commentées dans la rue…
À partir de cette banque d’images, répertoire de situations, de gestes, d’incidents (…), j’invente des récits, je recrée des fictions et je métaphore l’espace. » (Franc Gérard)
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LE PROJET
Franck Gérard arrive à Marseille en septembre 2012, invité à arpenter le sentier de randonnée GR 2013, par Marseille-Provence 2013. Martigues, Port-de-Bouc, Aubagne, Marignane…, où il ne rencontre presque personne. Puis les quartiers Nord de Marseille.
Entre-temps, le Centre national des arts plastiques l’inscrit dans son processus de commande publique de photographie.
Son projet initial de suivre le GR 2013 s’en trouve ainsi modifié. En effet, à la suite de rencontres faites à Marseille, l'artiste prend conscience que son travail ne peut que se déployer dans cette cité. Il s’applique alors à suivre son regard mais encore plus les êtres humains qu’il croise au hasard des rues ; connexions qui sont essentielles dans le processus de son travail.
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ESPACE PUBLIC
La commande évolue ainsi que les concepts qui l’accompagnent.
Du projet écrit, l’auteur se confronte (« se cogne » même) au réel qui finit par modeler ses actes.
Le concept d’espace public peut paraître à première vue évident mais de nombreux frottements coexistent à travers différentes zones, commerciales, religieuses, privées ; l’idée même que notre corps soit privé l’interpelle. Par exemple, les « sans-domicile fixe » font parfois, malgré eux, « l’apologie » de cette notion puisque ils vivent au sein même de la rue. Le téléphone mobile entraine aussi des modifications, crée des « bulles privatisées ».
Tout se confond, et le danger de la privatisation nous guette, de cet espace collectif qui nous appartient symboliquement parlant.
Ainsi, cette commande est, en quelque sorte, prétexte à une enquête, poétique, au hasard des croisements de l’artiste dans la ville. D’anecdotes en situations, de situations en discussions, le territoire s’y est déplié devant lui. Il prend conscience que son implication dans la rue est un manifeste de son travail, de ce qu’il est ; En l’état face aux personnes qu’il croise. Ainsi, il distribue des séries de cartes postales de son travail ou colle ses propres affiches sur les panneaux d’affichage public.
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RENDRE SON TRAVAIL « PUBLIC »
Le projet initial prévoyait l’invention d’une « vitrine » contenant l’ensemble des éléments de cette enquête. Progressivement, une structure s’est imposée à l’artiste après qu’il ait vu des ferrailleurs, des SDF, des adolescents, des mères de famille, des Roms … avec des caddies.
Ces chariots de supermarché souvent abandonnés et repris pour différents usages, liés en général à toutes sortes de transports, sont l’exemple même d’un élément qui passe de l’espace privé (le supermarché) à l’espace public. Franck Gérard modèlera dans la rue et en direct cette structure, ce caddie avec les objets qu’il y trouvera.
Cet élément, cet objet trouve sa place au milieu de l’exposition dans le Frac Provence-Alpes-Côte d'Azur où il sera mis « En situations », accompagné de neuf cartes postales et de six affiches, choisies parmi les milliers d’images réalisées dans le contexte de la commande.
Tirées chacune à 1000 exemplaires, elles sont laissés à la disposition du public. Vingt images et un film prendront la relève pour tenter de décrire ces deux ans d’expérience.
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UNE CONFÉRENCE PERFORMÉE
Pour boucler cette commande, des images et des anecdotes se déploieront au sein d’une « conférence performée » de plusieurs heures, qui sera réalisée le 12 décembre 2014 au Frac Provence-Alpes-Côte d'Azur.