... the lost part is now completed...

Exposition
Arts plastiques
Passerelle Brest

Les œuvres documentaires vidéo et les installations de Gitte Villesen, artiste danoise, s’apparentent aux portraits, dans le sens où ils explorent la forme, montrent des individus ou des groupes dans leur contexte socio-culturel.

Ces protagonistes ne sont ni des héros ni des victimes de circonstances. Gitte Villesen porte plutôt un regard sur leurs gestes quotidiens, leurs habitudes et rituels dans un environnement socio-politique donné, entre normalité et déviation. Sa pratique artistique, qui évite toutes généralités sociales, est basée sur la documentation des échanges et des rencontres, comme la forme spécifique de l’interaction sociale.

 

L'exposition au centre d'art passerelle présente, également, une production récente de Villesen, qui a entrepris plusieurs voyages en Gambie depuis 2008. Sa rencontre avec le musicien gambien Amadou Sarr est le point de départ de ce travail. Ensemble, ils ont entamé une coopération qui les conduit au sein du tissu social de la culture de Sarr, à travers les pratiques magiques de Juju.

Gitte Villesen élargit sa coopération par l'enregistrement de conversations avec trois femmes liées à Sarr : sa troisième femme Mariama Senghor, sa mère Mariama Corr à qui elle demande de réaliser les rideaux de son installation et sa grand-mère Yenden Joff.

 

Gitte Villesen suit une éthique de travail dans sa documentation qui peut être décrite succinctement avec les mots de l'écrivain Ursula Le Guin : « L'histoire n'est pas seulement la mienne, ni racontée par moi seule »

 

Yenden Joff : An important story, 13’

Dans  ce film, Yenden raconte comment elle a perdu quatre de ses enfants avant même qu’ils ne sachent marcher. Avec les gens de son village, elle a participé à une série de cérémonies pour changer sa mauvaise fortune. Les cérémonies se sont déroulées avec un Juju fabriqué à partir d’une demi-calebasse décorée de perles, un objet qui reste toujours aussi important pour elle. Amadou et Yenden expliquent que les villageois n’ont pas compris pourquoi les bébés étaient morts et certains même ont pensé que c’était peut-être elle qui les avait tué. Quand elle a eu, 20 ou 25 ans plus tard, deux autres enfants qui ont survécu, cela a fait sa reconnaissance et a surmonter sa malchance dans la région et bien au-delà. A la fin du film, elle parle de la gloire et l’argent qu’elle a reçu en racontant son histoire. 

 

Mariama Corr : Since You Ask, I Will Give It to You, 13’

La seconde vidéo porte sur Mariama Corr, connue et respectée pour ses connaissances en Juju et ses pouvoirs de guérison. Son père (le mari de Yenden) et son mari étaient marabouts. En dépit de son sexe, elle a tenu à recevoir les connaissances de son père, transmis traditionnellement de père en fils. Since You Ask, I Will Give It to You est la réponse de son père quand elle lui a demandé son savoir.

Quand Mariama était jeune, elle a visité la Gambie et le Sénégal en tant que chanteuse. Dans la vidéo, elle chante pour la première fois depuis son mariage au début des années 80. Quand elle était jeune femme, elle ne voulait pas se marier parce que cela l’empêcherait de continuer à chanter. Quand elle s’est finalement mariée, elle a mis fin à sa carrière de chanteuse.

Son père et son mari lui ont fabriqué un Juju. Son père avait pour mission de lui donner la célébrité et de la protéger du mal (un Juju qui ne fonctionnerait que si elle ne fréquentait pas les hommes), et son mari de faire en sorte que « son esprit ne chante plus ». Son mari est mort six mois avant qu’elle ne chante pour nous et elle a dû considérer sérieusement  si cela n’était pas un manque de respect si peu de temps après sa mort.

 

Mariama Senghor : He Has to Have Knowledge,16’

La troisième vidéo porte sur Mariama Senghor, troisième femme d’Amadou et fille de Mariama Corr. Nous avions parlé de ses connaissances de guérison et la magie du Juju lors de la précédente visite de Gitte Villesen, mais elle voulait lui poser d’autres questions encore. Entre autres, elle avait dit que durant son enfance son père était capable de voir son « Rabb ». Amadou traduit « Rabb » par un diable spécial et Bakary Diaby, qui a traduit le Wolof pour Gitte Villesen à son retour à Berlin le traduit plutôt comme un ange gardien jaloux.

Son père a fait prendre conscience du Rabb à Mariama, qui lui apporterait protection et aide et qui l’avait choisi parce que c’était une personne gentille, spéciale. En même temps, il lui a fait comprendre comment le Rabb peut être très jaloux et pourrait la tuer, elle et son mari, s’ils ne s’occupaient pas de lui. Elle a expliqué comment son père lui a raconté qu’elle avait besoin d’un homme qui devait être fort et assez intelligent pour gérer le Rabb. Amadou a continué à nous expliquer en détail comment  cela peut affecter tous les aspects de leur vie commune, incluant également leur vie sexuelle.

Amadou termine l’interview en expliquant les différences culturelles et en racontant qu’il est difficile pour ses amis blancs de comprendre pourquoi il a trois épouses.

 

kitchen etc., 2006

Pour cette œuvre, Gitte Villesen est partie du projet de Margarete Schütte-Lihotzky « Frankfurter Kitchen », une cuisine moderne conçue en 1926 pour améliorer les conditions domestiques des femmes au foyer. Margarerte Schütte-Lihotzky a écrit en 1921 un article intitulé ”Wie kan man duch richtigen Wohnungsbau der Frau Arbeit ersparen” (comment peut-on économiser des heures de travail pour les femmes par la constructions de maisons appropriées) et pour lequel elle a utilisé un chronomètre pour calculer le temps efficace des cycles opératoires dans la cuisine. Depuis les années 20, près de 10 000 cuisines, fondées sur les idées de Schütte-Lihotzky, ont été réalisées et installées dans les maisons aux alentours de Francfort en Allemagne. Les vidéos sont le résultat d’enregistrements réalisés dans des espaces de stockage à Stuttgart où une grande quantité de « Frankfurter Kitchen » en kit sont entreposées. Les cuisines, collectées par Madame Astrid Debus-Steinberg, ont été récupérées dans des maisons situées dans et autour de Stuttgart. Madame Debus-Steinberg a reccueilli les cuisines réalisées entre 1989 et 2003, dans l’intention de retrouver celles qui correspondent au modèle original conçu par Margarete Schütte-Lihotzky. Mais cela s’est avéré être une tâche difficile car la plupart de ces cuisines ont été modifiées pour pouvoir s’adapter aux différentes tailles des pièces et aux budgets. Très peu sont conformes à la taille exacte, au format et à la couleur initiale. Au fur et à mesure de ses recherches, sa collection s’est agrandie. Mme Debus-Steinberg et Franz J. Munch, avec qui elle a débuté le projet, ont vu environ 600 cuisines, en ont démontées 300 et ont maintenant répertorié une vingtaine dans leur entrepôt. Chacune des cuisines récupérées ont été soigneusement documentées par des diapositives, des plans, des échantillons de couleur, etc. Mme Debus-Steinberg conserve tous les documents d’archive chez elle, alors que la plupart de ces cuisines ou assemblages sont entreposés dans des réserves. Un petit nombre ont été restaurées et vendues à des musées ou pour des expositions.

Les douze photographies présentées dans l’exposition sont des scans des dessins architecturaux et des photographies provenant des archives personnelles de Margarete Schütte-Lihotzky, qui sont maintenant conservées au MAK (Musée des Arts Appliqués) de Vienne en Autriche. Les archives comprennent également un film muet intitulé ”Zur Küchenfrage” (1929) qui prouve l’efficacité de la Frankfurter Kitchen, en contraste avec la cuisine traditionnelle.

Tarifs :

3€ / gratuit pour les adhérents

Commissaires d'exposition

Artistes

Horaires

le mardi de 14h à 20h et du mercredi au samedi de 14h à 18h30 fermé les dimanches, lundis et jours fériés

Adresse

Passerelle 41 rue Charles Berthelot 29200 Brest France
Dernière mise à jour le 13 octobre 2022