JULIA COTTIN — SURFACE DE CONTACT

Exposition
Arts plastiques
Galerie Eva Hober Paris 08

Pour Julia Cottin, la sculpture engendre, le plus souvent, un corps à corps. Une confrontation entre des techniques (trancher, débiter, tailler, assembler, mouler) et des matériaux pauvres et traditionnels  (bois, plâtre, pierre, terre) qui appartiennent au langage historique de ce médium. L'artiste engage un processus volontairement contraignant, très corporel qui provient des contraintes de poids, des propriétés physiques, voire de la dangerosité des volumes et des espaces ; un registre du faire qui s'apparente à une expérimentation, à un processus gestuel.

Le travail de Julia Cottin qu'il soit graphique ou en volume, en extérieur ou en intérieur, est toujours conçu à l'état de projet, avec une approche lente, liée à ses multiples recherches. Méthodiquement, elle élabore dans son atelier de nombreux croquis et maquettes, comme on le pratique pour l'architecture. Cependant  Julia Cottin s'intéresse à une architecture qui ne serait pas l'activité scientifique qu'elle est plus ou moins devenue. Pour elle, l'activité doit être proche des arts et métiers et de l'utopie.

L’œuvre qui prend, en compte la mesure de l'homme, est le résultat d'une somme d'éléments autobiographiques dissimulée qui conte les données de l'expérience de l'artiste : les influences, les accidents, les découvertes, les cheminements de la vie. 

« Tracer une ligne, c'est avoir une idée » proclame Richard Serra. Un principe retenu pour cette exposition puisque Julia Cottin a, entre deux dates fixées arbitrairement, répertorié, les simples trajets nécessaires à ses recherches dans les précédents atelier-logements de La Cité des Arts de Paris. Elle a sélectionné trois ensembles de parcours, en a réduit l'échelle, puis elle a construit artisanalement des moules en bois pour y faire couler et sécher le plâtre afin d'en fixer à jamais l'empreinte. Les œuvres obtenues ont été basculées de l'horizontalité à la verticalité pour devenir des sculptures murales qui forment d'étranges étoiles blanches d'aspects laiteuses, énigmatiques, aux branches inégales. Ici les nécessaires et éphémères déplacements dans l'atelier deviennent la matière solide de la mémoire sculpturale qui murmure ses secrets aux regardeurs et pervertit malicieusement, grâce à une théâtralité assumée, le fonctionnalisme des architectes de  l'école de Chicago qui affirmaient ce principe inflexible : « la forme suit la fonction ».

Ce qui pouvait sembler être une série de sculptures d'essence minimalistes devient alors le fantôme de l'artiste qui hante la galerie Eva Hober.

Alain Berland

Membre de l’Aica, co-fondateur du journal Particules et commissaire d’exposition, Alain Berland contribue à la revue Mouvement depuis 2008. Il est depuis 2010 programmateur pour les arts visuels au Collège des Bernardins.

Adresse

Galerie Eva Hober 156 boulevard Haussmann 75008 Paris 08 France
Dernière mise à jour le 13 octobre 2022