Frédéric Coché, le goût des frontières

Arts plastiques
Galerie La Ferronnerie Paris 11

Frédéric Coché
No man's land, 2014
huile sur toile, 100x120 cm

 

Le goût des frontières

Un pseudo fossé marquant la limite d'un village préhistorique à Talheim, en Allemagne. Une ligne frêle de 50cm de profondeur où l'on trouve des ossements humains étrangement mutilés: les crânes sont perforés, on y suçait la cervelle de captifs étrangers avant de dessiner avec leurs corps la limite du chez soi.

 La violence inter humaine semble apparaître avec la notion de frontière: aucune fresque peinte par des chasseurs cueilleurs ne montre de scènes de guerre: on y voit des hommes armés, mais ils chassent des animaux. Elles n’apparaîtraient donc qu'avec la sédentarisation, et les premiers villages voient rapidement apparaître des fossés et des murs d'enceintes. Toutes les fouilles archéologiques nous répètent que ces murs sont criblés de flèches, que les villages étaient incendiés, les corps violentés. La violence ira en croissant.

 

  Du dedans au dehors. Entrer en contact avec l’Autre. Sortir ce qu’on a dans le crâne (ou celui de son prisonnier), franchir les frontières, et briser les tabous? La première ville est construite par Caïn, le premier meurtrier. Rome est fondée par un assassin, le dessinateur de ses limites.

Avec la violence inter humaine, l'image, même si elle reste dans les cavernes, change. La notion d'espace se précise, se limite par des ornements, se structure, se hiérarchise. Bien plus tard, après le trauma du percement du limes, la grande frontière de l'empire romain, et le viol de sa cité sainte, la peinture change encore. On y théorise la profondeur et la (in)pénétrabilité du support, qui deviendra même une notion clé de la théologie médiévale (la profondeur négative d'Augustin, par exemple). La peinture couvre, c’est une couche qui permet de préserver le spectateur de l'aveuglement en voilant une force in-regardable: les fresques de Saint Apollinaire in Classe, celles de Fra Angelico et de Fra Bartolomeo au couvent San Marco. Le peintre peint une tenture, un rideau, un mur. Nous avons donc le trait qui limite et la couche qui protège. Qui montre en voilant, et le trait qui rend intelligible en organisant par la séparation. Une fois en marche, cette mécanique semble inaliénable au développement humain, nécessaire à l'éducateur et à ses stades,  à l'écrivain et ses chapitres, au scientifique et à ses domaines, au philosophe et ses catégories, au politique et ses frontières. Il semblerait qu’il nous en faille sans cesse plus.

                                Frédéric Coché, Benilloba, septembre 2014

 

 

Complément d'information

Frédéric Coché sera également présenté à slick ATTITUDE, 20-26 octobre, stand 16,
Galerie la Ferronnerie, Pont Alexandre III, Paris

Commissaires d'exposition

Autres artistes présentés

Dominique Dehais, octavio Blasi, Aymeric Vergnon d'Alançon, Eva Bergera, Yoan Béliard, Sanna Kannisto, Déborah LeTexier, Richard Müller, Laurent Fiévet, Fabienne Oudart, Jacqueline Taïb, Jérôme Touron, Juha Nenonen, Marie-Amélie Porcher, Ien Lucas, Ruth-Maria Obrist, Warffemius

Horaires

mardi-vendredi 14h à 19h samedi 13h à 19h

Adresse

Galerie La Ferronnerie 40 rue de la Folie Méricourt 75011 Paris 11 France
Dernière mise à jour le 13 octobre 2022