Anna Mark

Présentée à la suite d’une exposition personnelle au Musée d’Art et d’Histoire de Meudon et avant une exposition au Centre d’Arts Plastiques de Royan (avec Robert Groborne et Lucien Hervé) la troisième exposition d’Anna Mark à la Galerie Marie Helene de La Forest Divonne réunit un impressionnant ensemble de Gouaches rouges très récentes (2012-2015), ainsi que des Reliefs, Dessins, Gravures et Livres, une cinquantaine d’œuvres choisies sur trente ans.

Dans ses Reliefs, ou bas-reliefs, Anna Mark a choisi un langage sculptural. Elle n’a cessé d’être peintre mais elle a posé les pinceaux. Avec un couteau, une petite truelle, Anna Mark dessine avec la matière - et avec l’ombre - pour rapprocher des architectures et non pour faire surgir des volumes, des couleurs, des formes ou des corps. Ses Reliefs de poudre de marbre disent la solidité de la pierre, ils captent patiemment la lumière dans la déclinaison monochrome de ses transparences et de ses opacités. 

Avec l’exactitude des artistes constructivistes, Anna Mark bâtit des lieux : des murs et des pavements plus encore que des tableaux.  Aussi, avec douceur et clarté, les Reliefs d’Anna Mark portent l’énigme des commencements, à savoir les jeux des enfants qui sculptent dans le sable (des ponts, des maisons, des portes, des passages), et la résistance du passé comme la pensée de son possible enfouissement…

 Qui regarde les Gouaches d’Anna Mark y perçoit de grands changements au cours des années : le passage d’une forme frontale, centrée, au dialogue de deux ou plusieurs formes entre elles et autour d’un vide, autour d’un espace intérieur ; le passage de la dominante du noir à des couleurs de terre, puis à une gamme où la couleur parle de plus en plus haut. Depuis 2012, les Gouaches rouges (nommées d’abord Rouges de Pompéi) définissent une période nouvelle dans l’œuvre d’Anna Mark. 

 Comment habiter une couleur ? 

Ces œuvres récentes posent magistralement la question par excellence de la peinture dans ce qui n’appartient qu’à elle et irréductiblement : la couleur. Elles parlent la langue du Rouge dans toute l’étendue de son registre, elles associent la secrète plénitude des Reliefs à un vocabulaire compositionnel ouvert… L’esprit de géométrie et la densité sensible de la vie coïncident pour donner à la couleur un lieu et, pour ainsi dire, l’espace intérieur d’une couleur qui s’épanouit, qui « chante », lorsqu‘elle devient peinture…  

Les Gouaches rouges d’Anna Mark n’épuisent pas les valeurs symboliques d’une couleur, elles exaltent dans le Rouge la qualité d’existence de la peinture.

 Jean-Pascal Léger