valeur phonétique afin d’écrire les voyelles de la langue grecque : aleph, par exemple, devient alpha. Plusieurs graphies de ces lettres capitales archaïques coexistent selon les cités, leurs sens d’écriture et de lecture étant tout aussi variables, en spirale ou selon le boustrophédon, imitant le labour des bœufs dans les champs, de droite à gauche puis de gauche à droite.

Au ive siècle, la démocratie athénienne unifie les provinces en un pays et lui attribue une seule écriture : les formes des vingt-quatre lettres capitales de l’alphabet ionien se stabilisent, gravées sur des tables de pierre disposées dans l’espace public à la vue de tous, des dieux comme du peuple, pouvant être lues désormais de gauche à droite, alignées, marchant en rang. Presque simultanément, un autre style d’écriture lapidaire, issu de Grèce, passant par l’Étrurie, entame sa maturité : la capitale romaine.

C’est ici que l’Infini prend son appui originaire, s’inspirant plus précisément d’un modèle populaire entre le iiie et le ier siècle avant notre ère. Plutôt que d’aller puiser auprès de la capitale romaine impériale plus tardive, maintes fois interprétée, l’Infini énonce un parti pris en amorçant la relance d’une forme oubliée et méconnue. Toutefois, comme l’a dit le créateur de caractères Roger Excoffon, « il ne s’agit absolument pas de revenir à une source (on ne revient pas en arrière), mais de faire une somme lucide des données présentes ».

En ce sens, ce modèle est un départ, la première borne d’une route ponctuée de rencontres, de retrouvailles, de surprises, une traversée de la lettre latine ; un recommencement, comme chaque nouvelle création typographique s’évertue – ou devrait s’évertuer – à le faire. L’Infini en est le songe, le récit, la somme.