OÙ Lieux d’Expositions pour l’Art Actuel
OÙ lieu d'exposition pour l'art actuel
Carte Blanche à Les Capucins – Solenn MOREL
Exposition
Arts plastiques
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Marseille
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Carte Blanche à Les Capucins – Solenn MOREL (Directrice du Centre d’Art Embrun 04)
Exposition de Céline VACHÉ-OLIVIERI
Dans le cadre d’un partenariat avec Les Capucins (04) et Solenn Morel, Le Quartier (Quimper), Triple V (Paris) , Les Ateliers (Clermont-Ferrand ), Salon de Montrouge, Middelmarch (Bruxelles)
OÙ lieu d’exposition pour l’art actuel
Espace d’expérimentation et d’exposition, de résidence atelier/logement
Complément d'information
TEXTES
Céline VACHÉ-OLIVIERI
STATEMENT DE CÉLINE VACHÉ-OLIVIERI
Witold Gombrowicz écrivait dans la préface de La Pornographie: «Être un homme cela veut dire ne jamais être soi-même». J’ai toujours supposé qu’il voulait sans doute aussi parler des femmes.
C’est ce principe d’incertitude que je prolonge dans mon travail. Une gymnastique, un grand écart. Une longue préparation mais pas de règles ni de méthodes, juste cette conscience aiguë de l’aspect transitoire des choses, de leur cours ou flux, de leur «devenir-présent». Cette attitude engage alors une réflexion sur l’identité des choses, leur valeur, leur originalité. Elle implique de se positionner soi-même dans un état de latence, dans un intervalle et de ne pas vouloir prendre le pouvoir.
Le travail prend alors des formes très diverses, allant de l’objet à la sculpture, l’image, la vidéo, l’installation, sans hiérarchie. Les formes développées ont essentiellement pour modèles des éléments architecturaux, urbains, géométriques, ou issus du monde végétal, de la culture populaire, des objets trouvés, appartenant donc intrinsèquement à l’espace public. Le motif, d’apparence polymorphe, qui n’est pas unique, est pour moi un moyen abstrait de détruire la subjectivité, et d’annuler les notions d’originalité et d’authenticité. Il arrive aussi que je mette en place des projets collaboratifs où s’installe la possibilité d’un «devenir autre», d’un travail entre les deux, d’une négociation: une attitude où l’on cesse d’être auteur. Enfin, pendant le temps de l’exposition, je tente de privilégier des installations où «sample et le mix» ont produit leur effet de brouillage des sources, des installations en latence, suggérant toujours d’autres possibles, où le statut même des pièces est questionné (les socles sont les sculptures, les images sont les volumes, les volumes sont montrés sous forme d’images (posters, sacs, bâches…)…
En résumé: plusieurs point de départ, pas de début ni de fin; remettre en question les idées de pouvoir, de hiérarchie, et de perception; cultiver le doute en se mettant toujours en mouvement.
«Ce qui compte, disait Gilles Deleuze dans Dialogues, c’est le devenir- présent: la géographie et pas l’histoire, (…), l’herbe qui est au milieu et qui pousse par le milieu, et pas les arbres qui ont un faîte et des racines. Toujours de l’herbe entre les pavés.»
CVO, 2016
TEXTE DE SIMON BERGALA, membre du Collège Critique du 60e Salon de Montrouge, 2015
La rencontre avec le travail de Céline Vaché-Olivieri est une traversée dans la totalité. Une totalité qui ne se partage pas entre du général et du particulier. Le tout foisonnant, proliférant d’un monde en transformation permanente, la perception n’en est en rien dissociée, elle court, vit au fil de ce mouvement, sans début, sans fin, sans projet ni finalité. Les mots ne nous disent pas tout, pastèques, rouge, vert, foulard, mobilier, bracelets brésiliens, paysage, terre. Ils nous détournent du nœud de la chair du monde et de notre propre corps, là où la perception se fomente, tissant toujours de nouveaux liens entre matière brute et langage.
Si on retrouve de manière continue la céramique au fil du travail de Céline Vaché-Olivieri, celui-ci se présente d’abord et essentiellement comme un agencement de formes et de gestes les plus divers. La pensée qui traverse et construit ce travail n’est pas celle d’un médium en particulier, c’est une pensée plastique qui joue de relations entre des pratiques identifiables, sculpture, peinture, photographie, céramique, objets et images trouvés.
Loch Ness, monticule de faïence émaillée de couleur aquatique et minérale, repose sur une reproduction de peinture de paysage. Le lac pittoresque se déploie à l’horizontal sur le plan d’un bloc de chêne qui repose sur le sol.
Suivant la perception et le désir, ces agencements d’objets et de pratiques rencontrent sans jamais les cristalliser en instances, matière, image, objet, étendue. Chaque élément conserve une relative autonomie tout en étant pris dans un faisceau de relations, comme les îles d’un archipel ont chacune un lieu, une identité, celle-ci se définissant dans ses relations à la totalité.
What it could be est un assemblage composé de panneaux de contreplaqué surmontés d’un fagot de branches que l’on découvre faites de grès émaillé. Desfigures abstraites colorées sont peintes sur les plans de contreplaqué, laissant en réserve une partie des motifs naturels du bois. La perception des différents éléments ne cesse de basculer de leurs dimensions constructives, fabriquées, aux motifs naturels et inversement.
D’une exposition à l’autre, certains éléments e déplacent, un même objet peut se découvrir seul ou pris dans un agencement dont aucun médium, aucun langage, ne peut devenir l’index. Ces dialogues s’étendent aux gestes d’autres personnes, comme pour l’exposition FEU(X),que Céline Vaché-Olivieri a entièrement réalisée en association avec d’autres artistes, trois fois quatre mains (huit donc au total).
Comme dans le travail de Sarah Tritz, ces agencements hétérogènes trouvent un
modèle condensé dans le travail de la céramique. La terre, à laquelle sont données formes et couleurs en surface, contient ce potentiel de devenir objet, devenir image. Mais même une fois devenue objet, la matière informe que fut la terre avant son travail hante toujours ce que l’on voit, elle dévoile sans jamais les résumer les liens entre matière, geste, image; l’action qu’est la perception.
Simon Bergala, membre du Collège Critique du 60e Salon de Montrouge, 2015
TEXTE DE PEDRO MORAIS
Combat de boue et de feu
La géométrie artisanale des motifs sur bois de Céline Vaché-Olivieri, empruntés à l’architecture et aux signes urbains, est mise en tension avec les formes gourmandes, organiques et sexuées de ses céramiques. Ses œuvres intègrent le prosaïque, le grotesque, le mou et le dur, la plasticité des mots et la chute, à rebours de toute logique autoritaire. Après avoir participé au Salon de Montrouge en 2015, elle est invitée dès samedi à la galerie Triple V à Paris, avant de participer à des expositions à la galerie Anne Barrault (Paris) et dans les centres d’art Le Quartier (Quimper) et Les Capucins (Embrun).
Peut-on associer l’actuel engouement autour de la céramique à un effet de mode ? La remise en question des frontières entre l’art contemporain et les arts appliqués ou décoratifs ne date pas d’hier. Pourtant, le renouveau des débats autour du féminisme et du post-colonialisme a imposé une réécriture de l’histoire de l’art canonique pour intégrer l’apport novateur d’artistes négligé(e)s ou de cultures extra-occidentales dans des pratiques et matériaux dits mineurs. Premier « art du feu » (avant le verre et le métal), présent dans la plupart des sociétés humaines, la céramique permet de penser à l’échelle globale et de réévaluer la question de l’utilitaire et du décoratif (cherchant à intégrer l’art à la vie quotidienne). Céline Vaché-Olivieri est entrée en céramique comme on entre en lutte : sa première pièce, après de nombreux ratages, était une cagoule intégrale faite de traces de doigts en terre cuite, à la fois un outil de dissimulation et une signature par l’empreinte. C’était à l’école des Arts Déco de Strasbourg, dans l’atelier d’Elsa Sahal, où elle découvre la céramique bigarrée du Californien Ron Nagle ou celle d’Erik Dietman, le saut de l’humour au morbide. « La terre a un côté sale, presque scatologique, qui devient précieux avec l’émail, dit l’artiste. C’est vertigineux d’imaginer que cette pratique va du Néolithique, où le bol remplace les crânes où l’on buvait, jusqu’à l’utilisation de la céramique dans les fusées, car elle ne fond pas au- dessous de certaines températures (dépassant même le métal) ». Ce fut aussi une période marquée par sa lecture de Jacques Soulillou (Le livre de l’ornement et de la guerre, Parenthèses, 2003) : « L’ornement peut être copié, il n’est pas unique, il peut aider à réfléchir au langage abstrait en termes de grammaire, résume l’artiste, Impur, polymorphe, le motif ornemental n’établit pas de hiérarchie et s’oppose aux notions d’originalité et d’authenticité ». Cela dit, les formes géométriques artisanales de ses premières céramiques empruntent à la signalétique urbaine, aux barrières empêchant de s’asseoir ou de stationner, ou à des motifs architecturaux repérés lors de déambulations (ses « trophées d’armes » réalisés à l’issu d’une journée). Tandis que d’autres céramiques semblent lorgner vers une dimension rabelaisienne, arborant des motifs gourmands et organiques : pastèque, rouleau de printemps, brocolis (« ce sont des fractales, de la géométrie végétale »), ou foie (« à une époque, on a cru que cet organe luisant était le siège des rêves car on y voit notre reflet, tandis que je lui donne un caractère grossier »). L’ambivalence entre les motifs abstraits, où le modernisme paraît imprégné de street culture, et le rapport au désir, qui donne envie de manger des matières que l’on sait inertes, est parfaitement traduite dans une série de posters photo : sur des morceaux de marbre rougeâtre (de la viande ?), l’artiste peint des impeccables polyèdres. Dans les expositions de Céline Vaché-Olivieri, il y a aussi des formes phalliques, des colonnes conquérantes, des briques de terre cuite peintes en couleur ciel qui s’approprient la conquête de l’espace de la sculpture masculine classique – un désir souterrain renvoyant à l’univers littéraire de Joan Didion ou Nathalie Quintane, à qui elle emprunte certains titres d’expositions. Le pouvoir de la fiction à faire exister des formes fantasmées est évoqué par l’artiste dans Loch Nech : le monstre devient une ridicule masse informe de céramique posée sur la reproduction d’un lac en peinture. Le désir de voir peut aussi se manifester selon une logique inverse : en préférant la projection mentale aux formes matérielles figées. Dans une sorte de coup de théâtre par rapport à son travail précédent, Céline Vaché-Olivieri a réalisé la série « Contrebande » renfermant ses pièces dans des tissus attachés selon la technique japonaise furoshiki. Nous ne saurons pas ce qui est à l’intérieur, sauf à condition de faire disparaître la forme actuelle et, de surcroît, la machinerie du désir. L’artiste Isamu Noguchi prévenait déjà qu’il fallait se méfier de la céramique car elle peut imiter n’importe quel matériau. En bonne collectionneuse de cailloux, Céline Vaché-Olivieri sait que le précieux peut coïncider sans emphase avec le presque rien.
Pedro Morais, 2016
CV
Céline VACHÉ-OLIVIERI
Vit et travaille à Paris
http://www.celinevache-olivieri.com/
celine.vache.olivieri@gmail.com
29 rue des orteaux- PARIS 20 _ FRANCE
SOLO SHOW / DUO
2015 FEU(X), collaborations avec Antoine Barberon, Estelle Deschamp, Colombe Marcasiano, Galerie Marine Veilleux, Paris
2014 Play It As It Lays, Espace culturel F.Mitterand, Beauvais Crâne chaud, Les Vestibules de La Maison Rouge-Fondation Antoine de Galbert, Paris
2012 Stationnement alterné à cheval trottoir chaussée, avec Estelle Deschamp, La Permanence, Clermont-Ferrand
GROUP EXHIBITIONS
2016 Oeil de Lynx et Tête de Bois / That Cool Decline, Occidental Temporary, Villejuif / Dévaler la montagne, virevolter dans les herbes, Centre d’art Les Capucins, Embrun / Nouveau!, Galerie Anne Barrault, Paris / Les Vases Bleues, Project Room – Le Quartier, Quimper / Monstres et Madones, Triple V – Louise Weiss, Paris / Ici la fraise est rouge, Les Ateliers, Clermont-Ferrand / Silver Cover, Centre d’art contemporain Passages, Troyes
2015 Tout doit disparaître, La Maudite, Paris Phénomènes naturels, Pauline Perplexe, Arcueil 11 rue de l’aqueduc, Galerie Nord, Paris BUTTER SIDE UP, La Couleuvre, St-Ouen 60ème Salon de Montrouge, Le Beffroi, Montrouge Retro-prospective, Middelmarch, Bruxelles
2014 La Poutre et la Loutre, Moly-Sabata, Sablons Clarence le lion qui louchait, Centre d’art Les Capucins, Embrun L’effacement des cartes (ou les index cachés), Les Instants Chavirés, Montreuil
2013 Made in Friche #6, La Friche Belle de-Mai, Marseille Le Cabinet Fantôme, une exposition d’atelier, Île-Saint-Denis Andrew?, La Galerie Centre d’Art Contemporain, Noisy-le-Sec
2012 Drop Zone, Place Saint-Michel, Bordeaux Nouvel arrivage 3, Espace d’art contemporain Camille Lambert, Juvisy-sur-Orge
2011 Particules, Particeps, Palissade (PaPaPa), Galerie Arko, Nevers XVI Biennale internationale de céramique contemporaine, Couvent des Cordeliers, Châteauroux Objection, Ceaac, Strasbourg Commettre, Le 6B, Saint-Denis
2010 Et si tu n’existais pas, Galerie Tinbox, Bordeaux
2009 Mise à l’œuvre, Musée de l’Œuvre Notre-Dame, Strasbourg Showroom, La Chaufferie, Strasbourg
2008 Sommerausstellung, Akademie der Bildenden Kunste, Stuttgart La Reine de la forêt, Galerie des Projets, ESAD de Strasbourg Edges & Corners, Galerie des Projets, Strasbourg
RESIDENCIES
2014 Ecole d’art du Beauvaisis, Beauvais
2011 Faïencerie Georges, résidence organisée par la Galerie Arko, dans le cadre de l’exposition PaPaPa, Nevers
2010 La Générale en Manufacture, Sèvres
GRANTS
2013 Aide à l’installation, DRAC Île-de-France 2011 Aide à la création, DRAC Alsace
PUBLICATIONS
2015 Code Magazine 2.0 #10
2014 Catalogue d’exposition Play It As It Lays, Ecole d’art du Beauvaisis
2012 TANDEM #3 Catalogue d’exposition Nouvel Arrivage 3, Communauté d’agglomération Les Portes de l’Essonne
2010 Quand on veut écrire, il faut avoir du vocabulaire #1, kurt-zine n°1 Catalogue d’exposition Mise à l’œuvre, Editions des Musées de Strasbourg L’Album factice, Revue européenne de l’illustration, sous la direction de Guillaume Dégé, Editions des Musées de Strasbourg
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OÙ
CONTACT Les Capucins
Centre d’art contemporain Les Capucins Espace Delaroche 05200 EMBRUN
Téléphone : 04 92 44 30 87
EQUIPE
Solenn Morel Directrice
solenn.morel@lescapucins.org
Sandrine Moracchini Responsable de la médiation et de la communication
sandrine.moracchini@lescapucins.org
PARTENAIRES
Le Centre d’art contemporain Les Capucins reçoit le soutien de la Ville d’Embrun, de la Région Provence-Alpes Côte d’Azur, du Conseil Départemental des Hautes-Alpes, de la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Provence-Alpes Côte d’Azur – Ministère de la Culture et de la Communication.
À PROPOS
From
BOTOX(S) réseau d’art contemporain Alpes & Riviera
http://www.botoxs.fr/lieu/les-capucins/
Ce centre d’art contemporain est né en 2009 avec le projet européen SMIR (eSpaces Multimédia pour l’Innovation et la Recherche) financé dans le cadre de la «coopération territoriale européenne» du programme ALCOTRA (Alpes Latines Coopération Transfrontalière). Avant d’intégrer la chapelle des Capucins fraichement restaurée, il développe ses activités – expositions et conférences – hors-les-murs.
En octobre 2012, une nouvelle programmation voit le jour. L’état renouvelle son soutien en partenariat avec la région Paca, le département des Hautes-Alpes et la commune d’Embrun.
Le centre d’art contemporain Les Capucins propose quatre à cinq expositions par an (dont une hors-les-murs) qui sont issues de projets spécifiques, considérant le lieu, son architecture, son environnement et son histoire.
Les artistes sont invités à travailler sur place, et engager des collaborations avec des associations et des artisans locaux. Cette implication du côté de la production, couplée à un travail de prospection important, permet au centre d’art de se positionner, non pas comme un simple relai de ce qui a déjà été exposé, mais au début de la chaine de diffusion. En montrant en primeur des oeuvres inédites, il valorise ainsi son activité aussi bien du côté du public amateur que des professionnels de l’art.
Parallèlement aux expositions et évènements artistiques (performances, lectures, concerts, projections vidéo…), Les Capucins proposent des rencontres avec des professionnels de l’art ainsi que des projections de films documentaires.
Un accompagnement individuel est par ailleurs systématiquement proposé à chacun des visiteurs des expositions, qui n’est jamais laissé seul (sauf s’il le souhaite bien sûr) face aux œuvres présentées.
Cette rencontre ne prend pas la forme d’une visite à proprement parlé mais plutôt d’un échange, le plus souvent informel, autour des problématiques soulevées par l’exposition. L’idée n’étant pas de proposer une grille de lecture toute faite mais d’engager une discussion ouverte et spontanée. Le centre d’art entend rendre ainsi ses projets accessibles à un public élargi, des initiés aux simples curieux.
A commencer par les plus jeunes, c’est pourquoi il met en place un programme de sensibilisation d’art contemporain en partenariat avec les établissements pédagogiques de la ville d’Embrun et des communes limitrophes. Cette initiation se traduit par des visites des expositions, des ateliers d’arts-plastiques et depuis 2015, une résidence d’artistes en milieu scolaire.
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Texte Du Centre d’Art les Capucins à propos de l’exposition Dévaler la montagne, virevolter dans les herbes
Charlie Jeffery, David de Tscharner et Céline Vaché-Olivieri
Au début de nos échanges, Céline Vaché-Oliviéri, Charlie Jeffery, David de Tscharner et moi-même, une image s’est rapidement imposée, celle du virevoltant, communément appelé tumbleweed, cette plante nomade qui quitte sa racine une fois sèche pour se laisser porter par les vents, là où les terres sont les plus arides, particulièrement dans les déserts américains. Elle évoquait une idée de liberté, de mouvement, d’autonomie qui convenait parfaitement à la manière dont le projet progressait, empruntant des chemins de traverse plutôt que des lignes droites. Aucun de nous n’était pressé en effet de restreindre le champ des possibles, de se figer dans une position définitive. D’ailleurs la mobilité est une constante chez ces trois artistes ; leurs œuvres se fixent rarement dans des dispositifs accomplis mais rejouent au contraire leurs conditions d’apparition à l’occasion de chaque nouveau projet. Elles prennent la forme d’agencements, d’éléments montables et démontables à souhait, tels des jeux de construction dont le potentiel d’association est inépuisable. L’essentiel se passe donc sur place. Ils y ramassent, récupèrent une grande partie de leurs matériaux, qu’ils mêlent parfois à des pièces ou des fragments de pièces préexistantes.
Ils voyagent ainsi avec peu de choses. Cette légèreté revendiquée, peut paraître anodine, anecdotique ou encore simplement pragmatique, mais elle participe de cette tradition « des artistes aux œuvres portatives, eux-même portatifs, légers à l’image de leurs dérèglements et dont la mobilité, la curiosité sont comme deux reproches adressés au caractère insupportable parce qu’intransportable de certaines œuvres. » [1], selon les termes de Jean-Yves Jouannais citant Jacques Rigaut dans son essai Artistes sans œuvres. En cette période, où quelques interventions monumentales pimentent la scène parisienne, rivalisant de moyens spectaculaires et de prouesses techniques, Dévaler la montage, virevolter dans les herbes entend en constituer l’anti-thèse.
Il y a ainsi la question du dépaysement qui fait son apparition, celle d’un territoire nouveau que l’on appréhende sans préjugés, sans formes toutes faites et pré-définies. En l’occurrence Embrun et ses montagnes incarnant dans l’imaginaire collectif un formidable terrain de jeu mais aussi le refuge de forces mystérieuses et incontrôlables. Dévaler la montagne, virevolter dans les herbes, repose ainsi sur une forme d’humilité, de légèreté dans la reconnaissance de l’espace à investir. On prend le temps de le découvrir et de composer avec ce qu’il propose ; sans passage en force. Au delà du territoire, le dépaysement, ici, se joue aussi au sein même de cette petite communauté à trois créée pour l’occasion. Céline, Charlie et David n’ont en effet jamais travaillé ensemble et pourtant ils abordent ce projet avec l’intention de réaliser une exposition véritablement collective, en échangeant les uns avec les autres, en imbriquant leurs réalisations et non en juxtaposant simplement des pièces autonomes. Chacun s’adapte à l’autre, accueille au sein de son dispositif des éléments extérieurs à lui-même et inversement, investit le dehors. De la même manière qu’en errant, le tumbleweed répand sa semence tout en accrochant des résidus dans le maillage de ses tiges. L’idée de perte s’accompagne ainsi de celle du gain. L’unité est d’ailleurs très relative dans le travail de Céline, Charlie et David, chaque pièce n’étant que le fragment d’un tout en perpétuel devenir. Dévaler la montagne, virevolter dans les herbes, par la liberté à laquelle elle aspire, ses mouvements doubles, ses vas-et-viens entre intérieur et extérieur, entre chute et envol, entend recréer les conditions joyeuses d’un système suspendu et autonome qui met en œuvre le pouvoir de l’invention et de la transformation des formes et des matières.
Solenn Morel
[1] Jean-Yves Jouannais,Artistes sans œuvres, I would prefer not to, Editions Hazan, 1997, p.32.
Céline VACHÉ-OLIVIERI
STATEMENT DE CÉLINE VACHÉ-OLIVIERI
Witold Gombrowicz écrivait dans la préface de La Pornographie: «Être un homme cela veut dire ne jamais être soi-même». J’ai toujours supposé qu’il voulait sans doute aussi parler des femmes.
C’est ce principe d’incertitude que je prolonge dans mon travail. Une gymnastique, un grand écart. Une longue préparation mais pas de règles ni de méthodes, juste cette conscience aiguë de l’aspect transitoire des choses, de leur cours ou flux, de leur «devenir-présent». Cette attitude engage alors une réflexion sur l’identité des choses, leur valeur, leur originalité. Elle implique de se positionner soi-même dans un état de latence, dans un intervalle et de ne pas vouloir prendre le pouvoir.
Le travail prend alors des formes très diverses, allant de l’objet à la sculpture, l’image, la vidéo, l’installation, sans hiérarchie. Les formes développées ont essentiellement pour modèles des éléments architecturaux, urbains, géométriques, ou issus du monde végétal, de la culture populaire, des objets trouvés, appartenant donc intrinsèquement à l’espace public. Le motif, d’apparence polymorphe, qui n’est pas unique, est pour moi un moyen abstrait de détruire la subjectivité, et d’annuler les notions d’originalité et d’authenticité. Il arrive aussi que je mette en place des projets collaboratifs où s’installe la possibilité d’un «devenir autre», d’un travail entre les deux, d’une négociation: une attitude où l’on cesse d’être auteur. Enfin, pendant le temps de l’exposition, je tente de privilégier des installations où «sample et le mix» ont produit leur effet de brouillage des sources, des installations en latence, suggérant toujours d’autres possibles, où le statut même des pièces est questionné (les socles sont les sculptures, les images sont les volumes, les volumes sont montrés sous forme d’images (posters, sacs, bâches…)…
En résumé: plusieurs point de départ, pas de début ni de fin; remettre en question les idées de pouvoir, de hiérarchie, et de perception; cultiver le doute en se mettant toujours en mouvement.
«Ce qui compte, disait Gilles Deleuze dans Dialogues, c’est le devenir- présent: la géographie et pas l’histoire, (…), l’herbe qui est au milieu et qui pousse par le milieu, et pas les arbres qui ont un faîte et des racines. Toujours de l’herbe entre les pavés.»
CVO, 2016
TEXTE DE SIMON BERGALA, membre du Collège Critique du 60e Salon de Montrouge, 2015
La rencontre avec le travail de Céline Vaché-Olivieri est une traversée dans la totalité. Une totalité qui ne se partage pas entre du général et du particulier. Le tout foisonnant, proliférant d’un monde en transformation permanente, la perception n’en est en rien dissociée, elle court, vit au fil de ce mouvement, sans début, sans fin, sans projet ni finalité. Les mots ne nous disent pas tout, pastèques, rouge, vert, foulard, mobilier, bracelets brésiliens, paysage, terre. Ils nous détournent du nœud de la chair du monde et de notre propre corps, là où la perception se fomente, tissant toujours de nouveaux liens entre matière brute et langage.
Si on retrouve de manière continue la céramique au fil du travail de Céline Vaché-Olivieri, celui-ci se présente d’abord et essentiellement comme un agencement de formes et de gestes les plus divers. La pensée qui traverse et construit ce travail n’est pas celle d’un médium en particulier, c’est une pensée plastique qui joue de relations entre des pratiques identifiables, sculpture, peinture, photographie, céramique, objets et images trouvés.
Loch Ness, monticule de faïence émaillée de couleur aquatique et minérale, repose sur une reproduction de peinture de paysage. Le lac pittoresque se déploie à l’horizontal sur le plan d’un bloc de chêne qui repose sur le sol.
Suivant la perception et le désir, ces agencements d’objets et de pratiques rencontrent sans jamais les cristalliser en instances, matière, image, objet, étendue. Chaque élément conserve une relative autonomie tout en étant pris dans un faisceau de relations, comme les îles d’un archipel ont chacune un lieu, une identité, celle-ci se définissant dans ses relations à la totalité.
What it could be est un assemblage composé de panneaux de contreplaqué surmontés d’un fagot de branches que l’on découvre faites de grès émaillé. Desfigures abstraites colorées sont peintes sur les plans de contreplaqué, laissant en réserve une partie des motifs naturels du bois. La perception des différents éléments ne cesse de basculer de leurs dimensions constructives, fabriquées, aux motifs naturels et inversement.
D’une exposition à l’autre, certains éléments e déplacent, un même objet peut se découvrir seul ou pris dans un agencement dont aucun médium, aucun langage, ne peut devenir l’index. Ces dialogues s’étendent aux gestes d’autres personnes, comme pour l’exposition FEU(X),que Céline Vaché-Olivieri a entièrement réalisée en association avec d’autres artistes, trois fois quatre mains (huit donc au total).
Comme dans le travail de Sarah Tritz, ces agencements hétérogènes trouvent un
modèle condensé dans le travail de la céramique. La terre, à laquelle sont données formes et couleurs en surface, contient ce potentiel de devenir objet, devenir image. Mais même une fois devenue objet, la matière informe que fut la terre avant son travail hante toujours ce que l’on voit, elle dévoile sans jamais les résumer les liens entre matière, geste, image; l’action qu’est la perception.
Simon Bergala, membre du Collège Critique du 60e Salon de Montrouge, 2015
TEXTE DE PEDRO MORAIS
Combat de boue et de feu
La géométrie artisanale des motifs sur bois de Céline Vaché-Olivieri, empruntés à l’architecture et aux signes urbains, est mise en tension avec les formes gourmandes, organiques et sexuées de ses céramiques. Ses œuvres intègrent le prosaïque, le grotesque, le mou et le dur, la plasticité des mots et la chute, à rebours de toute logique autoritaire. Après avoir participé au Salon de Montrouge en 2015, elle est invitée dès samedi à la galerie Triple V à Paris, avant de participer à des expositions à la galerie Anne Barrault (Paris) et dans les centres d’art Le Quartier (Quimper) et Les Capucins (Embrun).
Peut-on associer l’actuel engouement autour de la céramique à un effet de mode ? La remise en question des frontières entre l’art contemporain et les arts appliqués ou décoratifs ne date pas d’hier. Pourtant, le renouveau des débats autour du féminisme et du post-colonialisme a imposé une réécriture de l’histoire de l’art canonique pour intégrer l’apport novateur d’artistes négligé(e)s ou de cultures extra-occidentales dans des pratiques et matériaux dits mineurs. Premier « art du feu » (avant le verre et le métal), présent dans la plupart des sociétés humaines, la céramique permet de penser à l’échelle globale et de réévaluer la question de l’utilitaire et du décoratif (cherchant à intégrer l’art à la vie quotidienne). Céline Vaché-Olivieri est entrée en céramique comme on entre en lutte : sa première pièce, après de nombreux ratages, était une cagoule intégrale faite de traces de doigts en terre cuite, à la fois un outil de dissimulation et une signature par l’empreinte. C’était à l’école des Arts Déco de Strasbourg, dans l’atelier d’Elsa Sahal, où elle découvre la céramique bigarrée du Californien Ron Nagle ou celle d’Erik Dietman, le saut de l’humour au morbide. « La terre a un côté sale, presque scatologique, qui devient précieux avec l’émail, dit l’artiste. C’est vertigineux d’imaginer que cette pratique va du Néolithique, où le bol remplace les crânes où l’on buvait, jusqu’à l’utilisation de la céramique dans les fusées, car elle ne fond pas au- dessous de certaines températures (dépassant même le métal) ». Ce fut aussi une période marquée par sa lecture de Jacques Soulillou (Le livre de l’ornement et de la guerre, Parenthèses, 2003) : « L’ornement peut être copié, il n’est pas unique, il peut aider à réfléchir au langage abstrait en termes de grammaire, résume l’artiste, Impur, polymorphe, le motif ornemental n’établit pas de hiérarchie et s’oppose aux notions d’originalité et d’authenticité ». Cela dit, les formes géométriques artisanales de ses premières céramiques empruntent à la signalétique urbaine, aux barrières empêchant de s’asseoir ou de stationner, ou à des motifs architecturaux repérés lors de déambulations (ses « trophées d’armes » réalisés à l’issu d’une journée). Tandis que d’autres céramiques semblent lorgner vers une dimension rabelaisienne, arborant des motifs gourmands et organiques : pastèque, rouleau de printemps, brocolis (« ce sont des fractales, de la géométrie végétale »), ou foie (« à une époque, on a cru que cet organe luisant était le siège des rêves car on y voit notre reflet, tandis que je lui donne un caractère grossier »). L’ambivalence entre les motifs abstraits, où le modernisme paraît imprégné de street culture, et le rapport au désir, qui donne envie de manger des matières que l’on sait inertes, est parfaitement traduite dans une série de posters photo : sur des morceaux de marbre rougeâtre (de la viande ?), l’artiste peint des impeccables polyèdres. Dans les expositions de Céline Vaché-Olivieri, il y a aussi des formes phalliques, des colonnes conquérantes, des briques de terre cuite peintes en couleur ciel qui s’approprient la conquête de l’espace de la sculpture masculine classique – un désir souterrain renvoyant à l’univers littéraire de Joan Didion ou Nathalie Quintane, à qui elle emprunte certains titres d’expositions. Le pouvoir de la fiction à faire exister des formes fantasmées est évoqué par l’artiste dans Loch Nech : le monstre devient une ridicule masse informe de céramique posée sur la reproduction d’un lac en peinture. Le désir de voir peut aussi se manifester selon une logique inverse : en préférant la projection mentale aux formes matérielles figées. Dans une sorte de coup de théâtre par rapport à son travail précédent, Céline Vaché-Olivieri a réalisé la série « Contrebande » renfermant ses pièces dans des tissus attachés selon la technique japonaise furoshiki. Nous ne saurons pas ce qui est à l’intérieur, sauf à condition de faire disparaître la forme actuelle et, de surcroît, la machinerie du désir. L’artiste Isamu Noguchi prévenait déjà qu’il fallait se méfier de la céramique car elle peut imiter n’importe quel matériau. En bonne collectionneuse de cailloux, Céline Vaché-Olivieri sait que le précieux peut coïncider sans emphase avec le presque rien.
Pedro Morais, 2016
CV
Céline VACHÉ-OLIVIERI
Vit et travaille à Paris
http://www.celinevache-olivieri.com/
celine.vache.olivieri@gmail.com
29 rue des orteaux- PARIS 20 _ FRANCE
SOLO SHOW / DUO
2015 FEU(X), collaborations avec Antoine Barberon, Estelle Deschamp, Colombe Marcasiano, Galerie Marine Veilleux, Paris
2014 Play It As It Lays, Espace culturel F.Mitterand, Beauvais Crâne chaud, Les Vestibules de La Maison Rouge-Fondation Antoine de Galbert, Paris
2012 Stationnement alterné à cheval trottoir chaussée, avec Estelle Deschamp, La Permanence, Clermont-Ferrand
GROUP EXHIBITIONS
2016 Oeil de Lynx et Tête de Bois / That Cool Decline, Occidental Temporary, Villejuif / Dévaler la montagne, virevolter dans les herbes, Centre d’art Les Capucins, Embrun / Nouveau!, Galerie Anne Barrault, Paris / Les Vases Bleues, Project Room – Le Quartier, Quimper / Monstres et Madones, Triple V – Louise Weiss, Paris / Ici la fraise est rouge, Les Ateliers, Clermont-Ferrand / Silver Cover, Centre d’art contemporain Passages, Troyes
2015 Tout doit disparaître, La Maudite, Paris Phénomènes naturels, Pauline Perplexe, Arcueil 11 rue de l’aqueduc, Galerie Nord, Paris BUTTER SIDE UP, La Couleuvre, St-Ouen 60ème Salon de Montrouge, Le Beffroi, Montrouge Retro-prospective, Middelmarch, Bruxelles
2014 La Poutre et la Loutre, Moly-Sabata, Sablons Clarence le lion qui louchait, Centre d’art Les Capucins, Embrun L’effacement des cartes (ou les index cachés), Les Instants Chavirés, Montreuil
2013 Made in Friche #6, La Friche Belle de-Mai, Marseille Le Cabinet Fantôme, une exposition d’atelier, Île-Saint-Denis Andrew?, La Galerie Centre d’Art Contemporain, Noisy-le-Sec
2012 Drop Zone, Place Saint-Michel, Bordeaux Nouvel arrivage 3, Espace d’art contemporain Camille Lambert, Juvisy-sur-Orge
2011 Particules, Particeps, Palissade (PaPaPa), Galerie Arko, Nevers XVI Biennale internationale de céramique contemporaine, Couvent des Cordeliers, Châteauroux Objection, Ceaac, Strasbourg Commettre, Le 6B, Saint-Denis
2010 Et si tu n’existais pas, Galerie Tinbox, Bordeaux
2009 Mise à l’œuvre, Musée de l’Œuvre Notre-Dame, Strasbourg Showroom, La Chaufferie, Strasbourg
2008 Sommerausstellung, Akademie der Bildenden Kunste, Stuttgart La Reine de la forêt, Galerie des Projets, ESAD de Strasbourg Edges & Corners, Galerie des Projets, Strasbourg
RESIDENCIES
2014 Ecole d’art du Beauvaisis, Beauvais
2011 Faïencerie Georges, résidence organisée par la Galerie Arko, dans le cadre de l’exposition PaPaPa, Nevers
2010 La Générale en Manufacture, Sèvres
GRANTS
2013 Aide à l’installation, DRAC Île-de-France 2011 Aide à la création, DRAC Alsace
PUBLICATIONS
2015 Code Magazine 2.0 #10
2014 Catalogue d’exposition Play It As It Lays, Ecole d’art du Beauvaisis
2012 TANDEM #3 Catalogue d’exposition Nouvel Arrivage 3, Communauté d’agglomération Les Portes de l’Essonne
2010 Quand on veut écrire, il faut avoir du vocabulaire #1, kurt-zine n°1 Catalogue d’exposition Mise à l’œuvre, Editions des Musées de Strasbourg L’Album factice, Revue européenne de l’illustration, sous la direction de Guillaume Dégé, Editions des Musées de Strasbourg
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OÙ
CONTACT Les Capucins
Centre d’art contemporain Les Capucins Espace Delaroche 05200 EMBRUN
Téléphone : 04 92 44 30 87
EQUIPE
Solenn Morel Directrice
solenn.morel@lescapucins.org
Sandrine Moracchini Responsable de la médiation et de la communication
sandrine.moracchini@lescapucins.org
PARTENAIRES
Le Centre d’art contemporain Les Capucins reçoit le soutien de la Ville d’Embrun, de la Région Provence-Alpes Côte d’Azur, du Conseil Départemental des Hautes-Alpes, de la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Provence-Alpes Côte d’Azur – Ministère de la Culture et de la Communication.
À PROPOS
From
BOTOX(S) réseau d’art contemporain Alpes & Riviera
http://www.botoxs.fr/lieu/les-capucins/
Ce centre d’art contemporain est né en 2009 avec le projet européen SMIR (eSpaces Multimédia pour l’Innovation et la Recherche) financé dans le cadre de la «coopération territoriale européenne» du programme ALCOTRA (Alpes Latines Coopération Transfrontalière). Avant d’intégrer la chapelle des Capucins fraichement restaurée, il développe ses activités – expositions et conférences – hors-les-murs.
En octobre 2012, une nouvelle programmation voit le jour. L’état renouvelle son soutien en partenariat avec la région Paca, le département des Hautes-Alpes et la commune d’Embrun.
Le centre d’art contemporain Les Capucins propose quatre à cinq expositions par an (dont une hors-les-murs) qui sont issues de projets spécifiques, considérant le lieu, son architecture, son environnement et son histoire.
Les artistes sont invités à travailler sur place, et engager des collaborations avec des associations et des artisans locaux. Cette implication du côté de la production, couplée à un travail de prospection important, permet au centre d’art de se positionner, non pas comme un simple relai de ce qui a déjà été exposé, mais au début de la chaine de diffusion. En montrant en primeur des oeuvres inédites, il valorise ainsi son activité aussi bien du côté du public amateur que des professionnels de l’art.
Parallèlement aux expositions et évènements artistiques (performances, lectures, concerts, projections vidéo…), Les Capucins proposent des rencontres avec des professionnels de l’art ainsi que des projections de films documentaires.
Un accompagnement individuel est par ailleurs systématiquement proposé à chacun des visiteurs des expositions, qui n’est jamais laissé seul (sauf s’il le souhaite bien sûr) face aux œuvres présentées.
Cette rencontre ne prend pas la forme d’une visite à proprement parlé mais plutôt d’un échange, le plus souvent informel, autour des problématiques soulevées par l’exposition. L’idée n’étant pas de proposer une grille de lecture toute faite mais d’engager une discussion ouverte et spontanée. Le centre d’art entend rendre ainsi ses projets accessibles à un public élargi, des initiés aux simples curieux.
A commencer par les plus jeunes, c’est pourquoi il met en place un programme de sensibilisation d’art contemporain en partenariat avec les établissements pédagogiques de la ville d’Embrun et des communes limitrophes. Cette initiation se traduit par des visites des expositions, des ateliers d’arts-plastiques et depuis 2015, une résidence d’artistes en milieu scolaire.
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Texte Du Centre d’Art les Capucins à propos de l’exposition Dévaler la montagne, virevolter dans les herbes
Charlie Jeffery, David de Tscharner et Céline Vaché-Olivieri
Au début de nos échanges, Céline Vaché-Oliviéri, Charlie Jeffery, David de Tscharner et moi-même, une image s’est rapidement imposée, celle du virevoltant, communément appelé tumbleweed, cette plante nomade qui quitte sa racine une fois sèche pour se laisser porter par les vents, là où les terres sont les plus arides, particulièrement dans les déserts américains. Elle évoquait une idée de liberté, de mouvement, d’autonomie qui convenait parfaitement à la manière dont le projet progressait, empruntant des chemins de traverse plutôt que des lignes droites. Aucun de nous n’était pressé en effet de restreindre le champ des possibles, de se figer dans une position définitive. D’ailleurs la mobilité est une constante chez ces trois artistes ; leurs œuvres se fixent rarement dans des dispositifs accomplis mais rejouent au contraire leurs conditions d’apparition à l’occasion de chaque nouveau projet. Elles prennent la forme d’agencements, d’éléments montables et démontables à souhait, tels des jeux de construction dont le potentiel d’association est inépuisable. L’essentiel se passe donc sur place. Ils y ramassent, récupèrent une grande partie de leurs matériaux, qu’ils mêlent parfois à des pièces ou des fragments de pièces préexistantes.
Ils voyagent ainsi avec peu de choses. Cette légèreté revendiquée, peut paraître anodine, anecdotique ou encore simplement pragmatique, mais elle participe de cette tradition « des artistes aux œuvres portatives, eux-même portatifs, légers à l’image de leurs dérèglements et dont la mobilité, la curiosité sont comme deux reproches adressés au caractère insupportable parce qu’intransportable de certaines œuvres. » [1], selon les termes de Jean-Yves Jouannais citant Jacques Rigaut dans son essai Artistes sans œuvres. En cette période, où quelques interventions monumentales pimentent la scène parisienne, rivalisant de moyens spectaculaires et de prouesses techniques, Dévaler la montage, virevolter dans les herbes entend en constituer l’anti-thèse.
Il y a ainsi la question du dépaysement qui fait son apparition, celle d’un territoire nouveau que l’on appréhende sans préjugés, sans formes toutes faites et pré-définies. En l’occurrence Embrun et ses montagnes incarnant dans l’imaginaire collectif un formidable terrain de jeu mais aussi le refuge de forces mystérieuses et incontrôlables. Dévaler la montagne, virevolter dans les herbes, repose ainsi sur une forme d’humilité, de légèreté dans la reconnaissance de l’espace à investir. On prend le temps de le découvrir et de composer avec ce qu’il propose ; sans passage en force. Au delà du territoire, le dépaysement, ici, se joue aussi au sein même de cette petite communauté à trois créée pour l’occasion. Céline, Charlie et David n’ont en effet jamais travaillé ensemble et pourtant ils abordent ce projet avec l’intention de réaliser une exposition véritablement collective, en échangeant les uns avec les autres, en imbriquant leurs réalisations et non en juxtaposant simplement des pièces autonomes. Chacun s’adapte à l’autre, accueille au sein de son dispositif des éléments extérieurs à lui-même et inversement, investit le dehors. De la même manière qu’en errant, le tumbleweed répand sa semence tout en accrochant des résidus dans le maillage de ses tiges. L’idée de perte s’accompagne ainsi de celle du gain. L’unité est d’ailleurs très relative dans le travail de Céline, Charlie et David, chaque pièce n’étant que le fragment d’un tout en perpétuel devenir. Dévaler la montagne, virevolter dans les herbes, par la liberté à laquelle elle aspire, ses mouvements doubles, ses vas-et-viens entre intérieur et extérieur, entre chute et envol, entend recréer les conditions joyeuses d’un système suspendu et autonome qui met en œuvre le pouvoir de l’invention et de la transformation des formes et des matières.
Solenn Morel
[1] Jean-Yves Jouannais,Artistes sans œuvres, I would prefer not to, Editions Hazan, 1997, p.32.
Commissaires d'exposition
Artistes
Partenaires
Dans le cadre d’un partenariat avec Les Capucins (04) et Solenn Morel, Le Quartier (Quimper), Triple V (Paris)
, Les Ateliers (Clermont-Ferrand
), Salon de Montrouge, Middelmarch (Bruxelles)
Horaires
Horaires et jours d’ouverture jeudi-samedi _ 16h-19h sur rdv, et plus selon les événements in situ – T.:06 98 89 03 26
Adresse
OÙ Lieux d’Expositions pour l’Art Actuel
58 Rue Jean de Bernardy
13001 Marseille
France
Comment s'y rendre
OÙ lieu d’exposition pour l’art actuel
58 rue Jean de Bernardy 13001 Marseille
Espace d’expérimentation et d’exposition, de résidence atelier/
M1 : Réformés Canebière / T2 : National
Dernière mise à jour le 13 octobre 2022