LEVEL ONE : GUY MEES

Works 1960's - 1990's
Exposition
Arts plastiques
gb agency Paris 03

Les différentes étapes du parcours de l’oeuvre de Guy Mees (1935-2003) dès les années 60 jusqu’à ses derniers travaux sur papier confirment la clarté du programme intuitif et poétique de l’artiste.

L’ensemble réuni ici - depuis les premières dentelles des années 60 portant le titre générique Verloren Ruimte (Espace Perdu) et des oeuvres appartenant à la série des films Niveauverschillen (Différences de niveaux), des photographies Portretten (Portraits) de 1970, et des papier décou- pés également intitulé vingt ans plus tard, Verloren Ruimte (Espace Perdu) en 1983 - nous éclaire sur les intentions de Guy Mees.

Son positionnement non autoritaire et son approche conceptuelle singulière déconstruisant toute forme de hiérarchie, l’implique à libérer l’œuvre des systèmes, structure et support dans un espace libre, ouvert décalé mais toujours tangible. L’intrigue et la spécificité de son œuvre résident dans une interdépendance entre la forme construite et aléatoire où la fragilité et l’im- permanence des choses deviennent les seules règles.

Les films Niveauverschillen (Différences de niveaux) et la série des photographies Portretten (Portraits) font penser à des enregistrements amateurs, spontanés mettant en scène un groupe de trois personnes sur trois niveaux différents amovibles, un podium en bloc de béton cellulaire Ytong. Tandis que la position hiérarchique des protagonistes évolue d’après le rythme des 6 positions possibles, 123, 132, 213, 231, 312, 321, la série, les personnages et les circonstances peu- vent varier dans un processus infini démontrant la nature changeante des phénomènes et le côté arbitraire de la norme. De là sont nés les travaux sur cartons annotés “1,2,3’’, réalisés à par- tir de photographies issues de planche contact organisées d’après le tracé d’une grille comme l’ébauche d’une mathématique sensible.

Au delà du côté absurde de ces actions machinales, ces films et photographies performés par des amis et membres de la famille nous offrent un portrait intéressant de la scène de l’avant- garde belge gravitant dans l’entourage de la galerie MTL (Fernand Spillemaeckers) et X-One (Marc Poirier dit Caulier), mais aussi à l’internationale comme la série des portraits avec Nicholas Serota au MOMA Oxford en 1974.

En parallèle à ce travail photographique et vidéo, ce principe de 6 positions conduit Mees à une nouvelle exploration formelle de ces combinaisons d’après une charte chromatique de 6 cou- leurs. Il s’agit de traits aux feutres dessinés à la main et organisés en colonnes sur feuilles de papier fin (tel du papier journal) regroupées par multiple de 3. Alors que la composition d’en- semble, l’automatisme et la répétition du motif et du geste s’apparentent à un processus méca- nique proche de l’imprimerie, l’ordonnance des feuilles perd ses références et s’oriente vers une lecture purement hasardeuse.

Peu à peu les traits donneront naissance à une constellation éparse de points de couleur sur une surface de papier fin dont les motifs s’échappant parfois coïncident quasiment avec le mur et ponctuent sa paroi ouvrant la voix aux papiers découpés Verloren Ruimte (Espace Perdu).

En regard des systèmes de permutations il est intéressant de rappeler que Guy Mees et André Cadere étaient tous deux représentés à la même époque par Fernand Spillemaeckers ayant fondé la galerie conceptuelle belge MTL en 1970. L’erreur incorporée méthodiquement par Cadere dans ses barres de bois rond et les systèmes d’annotations dans les grilles devenant de plus en plus aléatoires chez Guy Mees correspondraient – ils à un désir commun de la part des deux artistes d’opérer un désordre dans l’intelligibilité d’une construction ordonnée des choses et du système social ?

Les Verloren Ruimte (Espace Perdu) en appellent également à l’idée de déconstruction du cadre, l’espace pictural se brise et révèle cet entre deux de l’interstice et du résiduel.
Qu’il s’agisse de ces faux monochromes blancs réalisés en dentelle industrielle au début des années 60 mêlant forme minimaliste à une texture sensuelle voir érotique révélant un espace intérieur et diffus ou alors ces formes plus volatiles des papiers découpés épinglés au mur datant des années 80, fragments de couleur sculptant l’épaisseur et les vides de l’architecture et ‘‘pic- turalisant’’ l’espace, les Verloren Ruimte (Espace Perdu) renvoient au commencement et à l’aboutissement de la pensée conceptuelle et poétique de Guy Mees, «(...) plein de ce dont il est le résidu, plein de sa perte».

Lilou Vidal, Mai 2017 

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Dernière mise à jour le 2 mars 2020