It's like a jungle sometimes. It makes me wonder how I keep from going under (bis)

Matthieu Clainchard
Exposition
Arts plastiques
Triangle - Astérides Marseille
Dans The Message, attribué à Grand Master Flash & The Furious Five, le rappeur Melle Mel décrit pendant 7 minutes avec un réalisme désabusé sa vie au quotidien dans le New York des années 80. En rupture par rapport à la musique hip-hop de l’époque, qui se voulait plutôt un exutoire festif à la misère encore teintée de ségrégation des ghettos blacks, The Message inaugure le tournant politique d’un mouvement musical qui décide de se nourrir de son contexte de production plutôt que de l’ignorer pour le rendre invisible. Cette position où la lucidité l’emporte sur le spectacle en le subvertissant de l’intérieur est le point de départ de la première exposition personnelle de Matthieu Clainchard depuis la cessation de son activité au sein du collectif Bad Beuys Entertainment. L'exposition est composée comme une représentation parcellaire d'un paysage à forte connotation urbaine. Ce cadre familier permet à l'artiste d'utiliser la ville en tant que représentation générique, objet physique ET virtuel qui serait à la fois un lieu, une durée, un espace mental et un lieu de culture : historique, sociale, politique. La construction de cette occurrence « ville » sur un plan purement imaginaire mêlant différentes dimensions, temporelles, spatiales, philosophiques, emprunte clairement au mécanisme de la science-fiction (objet familier mais étranger à la fois). Cet artifice permet à Clainchard d'articuler différent niveaux de discours et de représentations, et de poser l'hypothèse de l'existence de perceptions « transdistinctionnelles ». Discourant sur le corps social, les médias, les systèmes politiques et administratifs, la grande et la petite histoire, la place des artistes et des cultures alternatives, Clainchard cherche à disséquer la construction des corps et des espaces sociaux tout en affirmant l'imaginaire à la fois comme porte de sortie et fiction agissante. En effet, nombre de ses œuvres font référence à, voire n'existent que dans des environnements hors white cube. Elles fonctionnent alors comme une sorte de brouillage, par rapport aux situations auxquelles elles se confrontent. Ce brouillage peut aller du simple commentaire à la modification intrinsèque du contexte dans lequel il intervient, construisant de larges pans de réalité, dans des processus proches de ceux utilisés par des artistes tels que Marcel Broodthaers (et son Musée d'art moderne département des Aigles), Paul Devautour (et ses producteurs fictifs tels David Vincent, le Cercle Ramo Nash ou Nancy Crater) ou encore Philippe Parreno (notamment avec The boy from Mars). On notera d'ailleurs que comme chez les artistes précités, la forme des œuvres chez Clainchard n'est qu'une résultante de processus d'apparition complexes, d'où un aspect déceptif de type WYSIWYG et/ou ready-made récurrent et revendiqué. L'utilisation obligée de vocabulaires formels préexistants issus d'histoires des arts variées se fait dans la conscience du storytelling les accompagnant et une méfiance envers la notion de « style » en général. Prenant également acte de la modification du statut de l'auteur quel qu'il soit en ce début de XXIe siècle, l'exposition convoque de façon assumée les œuvres d'autres artistes dans la construction de cette grande image dont Clainchard se retrouve au final l'auteur principal. Jouant le jeu de l'affrontement entre autonomie et appartenance à un propos collectif, les œuvres se font les avocats d'un propos engagé sur le sens des images, les notions de manipulation et de souveraineté, d'autant plus que la plupart d'entre elles entretient déjà un rapport plus ou moins direct avec ces problématiques. Loin des discours éculés et vendeurs sur les utopies et à rebours d'un structuralisme conservateur, c'est à un brainstorming enthousiasmant et protéiforme, nourri de multiples théories actuelles, des cultural studies au storytelling en passant par les philosophies du risque (Ulrich Beck) et de l'accident (Paul Virilio) que nous convie Clainchard, sur le refrain entêtant de The Message: It's like a jungle sometimes, it makes me wonder how I keep from going under... Dorothée Dupuis Matthieu Clainchard est artiste et commissaire d’exposition, mais on connaît davantage ses activités au sein de collectifs d’artistes : Bad Beuys Entertainment (fondé en 1999 – dissous en 2007) dont les actions visaient à développer de nouvelles formes de sculpture sociale en résonance avec la culture urbaine, et Le Commissariat fondé en 2006 avec trois autres artistes et commissaires pour développer une pratique de l’exposition sur un mode plus ouvert et spontané. Son œuvre plastique s’appuie sur ce qui est déjà là et privilégie les ready-mades et les assemblages/remix. Il s’intéresse avant tout à la question du contexte et cherche à en pointer les dysfonctionnements. Lorsqu’il présente des objets, des images ou des situations, il génère des “fictions réelles”. Non pas des histoires en forme mais des formes produisant des histoires où la question de la subjectivité est sans cesse remise en cause. Le quotidien urbain est son champ d’action. L’artiste met en évidence le jeu des simulacres sur lesquels se fonde l’idée de communauté et d’appartenance (les marques, la télé, le cinéma, Disney...). Keren Detton

Autres artistes présentés

Matthieu Clainchard, Fayçal Baghriche, Lewis Baltz, Yves Bélorgey, Stanley Brouwn, Dector & Dupuy, Vincent Ganivet, Liam Gillick, Peter Halley, Dennis Hopper, Colombe Marcasiano, Benjamin Seror, Veit Stratmann, Raphael Zarka...

Partenaires

Ville de Marseille, Conseil Général 13, Conseil Régional PACA, DRAC Paca, Système Friche Théâtre, Mécènes du Dud, Maison de ventes Damien Leclère, Marseille 2013 / Ateliers de l'Euroméditerranée, les amis du Palais de Tokyo, DRAC Île de France, Lycée Hôtelier Bonneveine, Mevaco, Radio Grenouille, La Station; La Villa Arson, Musée d'art contemporain de Marseille, Collection Agnès b., Collection Marc et Josée Gensollen, Galerie Xippas, Galerie Thomas Zander, les artistes

Horaires

Vernissage le vendredi 17 avril 2010 à 18h Ouvert du mardi au samedi de 15h à 19h Nocturne le vendredi de 19h à 22h Visite guidée le samùedi à 17h

Accès mobilité réduite

Oui

Adresse

Triangle - Astérides Friche la Belle de Mai 41 rue Jobin 13003 Marseille France
Dernière mise à jour le 13 octobre 2022