Veilleurs de nuit

Exposition
Arts plastiques
L'Yonne en scène Monéteau

Claude Lévêque -La Nuit- collec Frac Pays de la Loire - adagp - photo Stéphane Bellanger

De même pour la forêt ou la montagne, la nuit fut progressivement reconnue comme un territoire à part à explorer artistiquement de manière autonome. L’univers des ombres fut alors perçu comme le décor d’un autre versant de nos vies, un lieu soustrait aux rythmes ordinaires des obligations sociales et souvent un espace propice à une méditation métaphysique. Si la nuit conduit notre inconscient à projeter les images voluptueuses de nos désirs secrets, dans son ambivalence, elle convoque aussi nos angoisses existentielles et nos pires cauchemars. L’imaginaire trouve plus volontiers refuge dans nos espaces noctambules. Ainsi les peintures flamandes attentives aux détails d’une réalité quotidienne s’opposèrent, en leur temps, aux mises en scènes dramatiques noyées dans les ténèbres. Plus tard, à l’instar de Vincent Van Gogh, qui avait su extraire de la nuit noire les vibrations lumineuses des astres se reflétant dans les eaux du Rhône, Paul Claudel affirmait à son tour que « lorsqu’on est suffisamment attentif la nuit, on peut s’apercevoir que les étoiles font du bruit. » En nous invitant à l’écoute des constellations, le poète rejoignait, ainsi que le peintre, la cohorte de ses aînés romantiques dont les variations Nocturnes, musicales ou littéraires, s’étaient enchaînées durant tout le XIXe siècle, sous les plumes de Beethoven, Musset, Chopin, Hugo ou Schubert. Après les valeurs religieuses accordées à la nuit, et ses inversions cléricales peuplées de sabbats et de scènes sépulcrales, l’obscurité était devenue le domaine mélancolique voué à la réflexion intérieure des êtres. A la suite des textes fondamentaux de Sigmund Freud sur la psychanalyse, en revendiquant l’intensité créatrice des rêves, les Surréalistes en revinrent aux parts sombres des êtres lorsque dans le sommeil, ou l’écriture automatique, l’esprit s’échappe des barrières morales, se livre aux transgressions, aux bouleversements identitaires ou hiérarchiques, confisque toutes les logiques acquises pour se libérer des contraintes physiques de la pesanteur, de la matière, des espaces et du temps… Entre autres, dans l’exposition du Centre d’art de l’Yonne, l’artiste Jean-Jacques Rullier retranscrit littéralement les rêves obsessionnels qui lui ont été confiés. De son côté, Virgile Novarina sauve de l’oubli des bribes de phrases résiduelles, saisies dès son réveil dans une écriture encore somnolente, et s’adonne à des performances où son sommeil devient un spectacle livré au regard des passants d’une rue ou des visiteurs d’une exposition. Pour déstabiliser le spectateur et le renvoyer à sa vulnérabilité, l’obscurité est nécessaire à Claude Lévêque, tant pour y mettre en scène des lumières et des sons que pour y révéler la violence des sentiments et du mal-être. D’autres noctambules les rejoindront, pour un parcours artistique aux frontières de la nuit...

Partenaires

Conseil Général de l'Yonne, Conseil régional de Bourgogne, Ministère de la Culture - Direction régionale des Affaires culturelles de Bourgogne

Horaires

Tous les jours de 11 h à 18 h

Adresse

L'Yonne en scène 20 Rue de Madrid 89470 Monéteau France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020