UNTITLED UNTILTED

Les mots sont le matériau de prédilection de Philippe Cazal. Il les collecte dans le flux continu des productions mass-médiatiques autant que dans le fonds populaire du langage courant — manchettes de journaux, lieux communs, expressions toutes faites, slogans et autres messages publicitaires — pour leur donner sinon leur redonner, via des protocoles de déconstruction typographiques et chromatiques étrangement familiers, une nouvelle charge symbolique. Quelle que soit la manière dont il met ces mots en page, Cazal s’applique toujours, essentiellement, à les détourner de leur fonction première, de leur usage habituel, de leur sens usuel. Quelle que soit la forme de présentation in fine adoptée par l’artiste pour présenter ses travaux — posters, affiches, adhésifs, photos, objets, néons... —, le lecteur est renvoyé sans le savoir aux origines mêmes de l’écriture, lorsque pour séparer les mots, sujets, verbes et compléments, il n’y avait encore ni espace ni ponctuation, lorsque le savoir lire et le savoir écrire étaient encore l’apanage d’une érudite minorité. En octobre 2006, la Villa du Parc avait déjà invité Cazal à signer une nouvelle “mise en page” de la véranda. Résultat : « NIV RAI NIF AUX » et « MO NO LO GUE », deux courts lettrages bichros, collés en mode PLV de part et d’autre de l’entrée du centre d’art. Du 08 février au 12 avril 2008, la Villa du Parc a choisi cette fois d’offrir au « sémiurge » Cazal la possibilité d’intervenir dans l’ensemble des espaces d’exposition avec ses mots et associations de mots cryptés. Résultat : [ UNTITLED UNTILTED ], un laboratoire où se déconstruit le mythe de la société dite de communication, sachant que chaque époque a des vocables dont elle fait grand usage, que celui de communication est au nombre de ceux dont l’utilisation est aujourd’hui la plus inflationniste et le sens le moins fixé, que toute production de Cazal surfe sur la vague de l’aphorisme de Wittgenstein selon lequel les mots n’ont pas ou plus de sens mais seulement des usages.