Une armée dans la demeure
Emilie Scheffer, Une armée dans la demeure, terre, pigments
À partir du premier septembre 2012, la maison Cantoisel accueille, une œuvre d’Émilie Scheffer.
Une armée de grenouilles s’installe dans les caves pour tenir la garde.
Le mot « armée » peut sembler offensif, il est guerrier, pour cette maison tournée vers l’accueil, l’échange et la conciliation. Conciliation depuis de nombreuses années d’univers artistiques différents, parfois aux pôles extrêmes de la recherche artistique, là où se trouvent des modes de pensées divergents.
Car en effet par la magie du regard porté sur les artistes par les maîtres du lieu quelque chose finit par se rejoindre qui annule les effets de style, les particularités de la forme, pour ne retenir que l’esprit et l’énergie d’interpellation du visible et de l’invisible, nichés dans les espaces spécifiques de la maison.
Une armée de grenouilles donc campe dans les caves : la grenouille chargée de féconder la terre en appelant la pluie dans la Chine ancienne, de représenter le monde obscur et indifférencié en Inde, que nos mémoires d’enfants peuvent facilement associer aux mystères de la cave, est symbole de résurrection et de métamorphose pour les Égyptiens. Élie l’Ecdicos fait des grenouilles le symbole de la pensée disséminée.
Peut-être un miroir du parcours atypique d’Émilie Scheffer, européenne de cœur, éclectique dans l’art et qui porte son attention sur plusieurs centres d’exploration et de connaissances à la fois, se livrant à diverses activités : les voyages et les langues, les sciences et l’art. Elle construit ainsi son chemin de vie. Son « armée de grenouilles », immobile dans les caves, messagère de bonheur pour les Celtes, veille sur ce présage. À Cantoisel, dans la pénombre, s’installe le silence des formes et le besoin de le faire partager.
Dans cette demeure la compréhension des différents parcours des artistes apporte une chaleur intellectuelle précieuse aux visiteurs : artistes dont la pureté de la forme s’atteint au prix de grands renoncements, nous faisant toucher les limites du langage et ouvrant sur une aventure visuelle loin des frivolités de ce monde et d’autres artistes dont la présence du monde sensible dans les formes nous permet de toucher l’histoire de la construction de notre humanité.
Conduire un tableau là où les mots ne sont plus opérants ou utiliser la forme comme levier d’une mémoire générique, Jany et Michel Thibault laissent à chacun, dans le parcours exigeant et poétique de la maison, le soin de vivre à notre manière ce hors-temps métaphorique de l’art.
Annie Paule Thorel, le 5 août 2012.
Tarifs :
Entrée libreComplément d'information
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