Tripes de Caen

Tripes de Caen : Rétrospective François Reichenbach

Nous poursuivons notre rendez-vous documentaire, en partenariat avec le cinéma Lux, à la rencontre de l’oeuvre de François Reichenbach. Une rétrospective qui nous fera (re)découvrir quelques-uns de ses films-clés des années cinquante et soixante. Ce réalisateur quelque peu oublié, à l’oeil vif et acéré, savait capter l’esprit de son temps, avec humour et poésie, gravité et ironie.
Sous le regard expert de Françoise Widhoff – qui fut la collaboratrice de François Reichenbach – notre invitée de la soirée.


• Les Marines • France • 1957 • 18 mn
« We’re going to make or to break you » aboie l’officier. Dans Les Marines, François Reichenbach suit dans la tradition du cinéma direct, les premiers mois de l’impitoyable formation des marines de l’armée des États-Unis. Les volontaires sont des hommes d’origines diverses avec un objectif en commun : devenir des soldats invincibles. L’entraînement est dur et l’humiliation programmée : à toutes les questions, on répond par « Yes Sir ! ». L’individu est annihilé, seule la force de la masse compte, car celui qui combat seul meurt. La technique de montage du film souligne la métamorphose systématique de chaque être humain en machine de combat. Uniformes, armes, coiffure et musculature sont identiques pour tous. Des gros plans montrent des gouttes de sueur sur les corps d’acier. L’observation pointue de ce concentré d’esthétique militaire réalisé par François Reichenbach a inspiré à Stanley Kubrick son film pacifiste Full Metal Jacket (1987).


• Le Petit Café • France • 1963 • 12 mn
Pour ainsi dire tombés du ciel, nous pénétrons dans un paradis terrestre. Dans la lumière de l’aurore, la caméra glisse le long d’une façade typiquement parisienne pour nous ouvrir la porte d’un petit café. François Reichenbach observe les hôtes avec acuité : un homme âgé sirote un café en lisant le journal, un jeune couple d’amoureux s’embrasse (elle ressemble à s’y méprendre à Jean Seberg dans À bout de souffle), des hommes dans la force de l’âge jouent aux cartes.


• La Douceur du village • France • 1964 • 47 mn
La Douceur du village est une leçon pour le moins instructive, il est vrai que le personnage principal en est le maître d’école de Loué, village du Nord-Ouest de la France. François Reichenbach l’élit comme son guide, qui égrène seize leçons édifiantes. Il s’agit ni plus ni moins de montrer comment l’on est français ! La saveur de cette récitation réside pour bonne part dans la prestance de la voix de cette personnalité, de sa diction mâtinée d’un accent que les Parisiens qualifieraient de campagnard. Les questions et les thèmes abordés sont aussi fondamentaux que la vache (et ses dérivés), la modernisation de la campagne (et ses automobiles, radios et télévisions), la famille (et ses nombreux enfants), les fréquentations (et ses tentations érotiques), sans oublier, entre autres, la musique (et sa fanfare dont le chef est bien entendu le maître d’école).


• La Sixième Face du Pentagone, réalisé avec Chris Marker • France • 1967 • 27 mn
À Washington, le 21 octobre 1967, a lieu la grande marche sur le Pentagone contre la guerre au Vietnam. La force de cette oeuvre est de nous plonger au coeur de la manifestation et de l’affrontement. Une certaine partie de la population étudiante américaine vient s’opposer au pouvoir politique et militaire en revendiquant la paix, mais l’impossible dialogue amène les manifestants à l’affrontement : ils entendent ainsi changer la critique sociale en acte politique.