SOLY CISSÉ, un paysage animal

Période de chaleur, Terre humide, Plan de chasse…les titres des oeuvres de Soly Cissé traduisent sa proximité avec la nature. De son expérience première, vécue, enfant, au sein d’une nature secrète et originelle, jusqu’à l’actualité la plus désenchantée, Soly Cissé déroule le temps et l’espace, entre mémoire et réalité et s’interroge sur la place laissée à tout ce qui est vivant sur terre.

L’artiste a toujours travaillé sur un vaste territoire, qu’il soit conceptuel ou géographique – en particulier le continent africain qu’il parcourt sans cesse. La série d’œuvres récentes découle de son histoire personnelle et familiale et prend pour sujet la question de la Nature, indissociable pour lui comme pour beaucoup d’artistes contemporains de l’environnement allant de pair avec la protection animale.

Le titre de l'exposition est emprunté à l'ouvrage de Xavier de Planhol Le paysage animal : L'homme et la grande faune : une zoogéographie historique,Fayard, mars 2003.   

Soly Cissé éprouva cette relation à l’environnement, enfant, alors qu’il vivait au cœur d’une contrée sauvage avec son père, médecin radiologue, chargé de la surveillance du camp des ouvriers du barrage de Manantali. Cette région, aux confins du Sénégal, de la Mauritanie et du Mali où bêtes et hommes vivaient, jusque-alors, en osmose depuis des millénaires, marqua son imaginaire durablement.

Sur les rives du fleuve Sénégal tout comme au coeur de l’inextricable forêt, il fut témoin de la cruauté et des excès de l’homme : destructions et massacres lors de chasses rituelles, espèces en danger et dégradation de leur habitat, cultures appelées à disparaître dérégulant à terme tout un écosystème. C’est, imprégné de ce milieu premier que Soly Cissé – convoque au présent, dans ses oeuvres récentes, la faune sauvage ou domestique et la flore marine pour dire son espoir dans la marche nouvellement engagée vers un aménagement global de la planète.

Au seuil des années 2000, Soly Cissé invente une nouvelle figuration dotée d'une grande spiritualité. Dés le début, le processus est en place dans un mouvement continu de métamorphoses et d'espaces dédoublés où errent sans fin ses premières figures des ''Mondes perdus '' Elles émergent du noir, couleur chère à l'artiste à double titre : noir des ténèbres qui précédèrent l'humanité et noir d'un espace intérieur qui déclenche le processus créatif. Retournant dans le noir, celui de l'espace de la toile, elles alternent avec des personnages, comme projetés par un spot lumineux, créatures hybrides aux forces féroces ou bienveillantes qui structurent la composition par plans colorés.

De leurs affrontements surgit une certaine réalité de  la condition de l'homme.

Dans une forte diagonale, des animaux semblent en ascension, prenant le ciel de biais ou bien, dréssés sur leurs pattes arrière apportent grâce et protection. Ils témoignent de l'engagement de l'artiste ainsi que de ses doutes sur la place laissée par l'homme à la Nature et aux animaux dans le vaste espace du continent africain, jusque-là à prédominance animale.

L'étendue du répertoire de l'artiste révèle une puissance plastique doublée d'une grande érudition, par son recours à tous les supports et formats : dessins, collages, toiles monumentales, sculpture et installations. A la jonction de culturelles plurielles, Soly Cissé porte son regrad sur un monde à la géographie culturelle élargie qui doit dépasser préjugés et barrières culturelles pour adopter des valeurs de tolérance, de dialogue et de cohabitation. Ce sera un des thèmes de son exposition personnelle au Musée Théodore Monod de Dakar à partir du mois d'octobre prochain.