Sigurdur Arni Sigurdsson

Chercheur d’ombre. L’ombre intimement liée à la lumière est présente en filigrane tout au long de l’œuvre de Sigurdur Arni Sigurdsson. Leur dialogue révèle les artifices liés à toute représentation de la réalité. Michel Foucault présente Edouard Manet comme l’inventeur ou le réinventeur du tableau objet, » le tableau comme matérialité, comme chose colorée que vient éclairer une lumière extérieure et devant lequel ou autour duquel vient tourner le spectateur«. Sigurdur Arni Sigurdsson réalise des tableaux objets où la matérialité de la toile nue participe à la construction même, d’un espace virtuel. L’œil s’immisce entre ces plans multiples, des couches pigmentées à la toile brute, un temps abusé dans sa perception. Il n’y a plus d’espace de représentation pour l’objet, Il semble hors champ, seule son ombre projetée apparaît, témoin d’une source lumineuse et d’un regard extérieurs possibles. Les plaques de verre percées par différents cercles accentuent la dématérialisation de ce tableau objet, traversé par la lumière; c’est l’ombre de vides que nous observons sur le mur. Le format du tableau carré ou rectangulaire éclate à son tour. Des disques colorés, perpendiculaires au mur, à peine visibles, réceptacles des lumières naturelle et artificielle, projettent des ombres colorées d’intensités lumineuses variables. Sigurdsson jongle avec le point de vue du regardeur dans un espace ponctué par la couleur immatérielle et changeante, révélatrice de la lumière de l’instant. Et le voyageur, de dialoguer avec son ombre : L’ombre : Dois-je donc flatter ? Le voyageur : Je pensais que l’ombre de l’homme était sa vanité : mais celle-ci ne demanderait pas : « Dois-je donc flatter ? » L’ombre : La vanité de l’homme, autant que je la connais, ne demande pas non plus, comme j’ai fait deux fois déjà, si elle peut parler : elle parle toujours. ( Humain, trop humain, tome II Nietzsche.)