Rocket Engine

Depuis les travaux du mathématicien Norbert Wiener il est admis que la nature se désagrège, conformément au second principe de la thermodynamique. Pour pallier à cette entropie naturelle, l’homme construit, assemble et synthétise élé­ments et substances modifiant irrémédiablement notre rapport au monde. Pour son premier projet, Balle neuve transforme ce phénomène énergétique en exposition. Partie d’une équation simple, une exposition de groupe, une même liste d’oeuvres dans des dimensions, des configurations, des architectures affirmées et différenciées, se déployant dans le temps et l’espace, Rocket engine ou la métamorphose des agrégats fonctionne littéralement comme un « moteur-fusée », une force motrice élémentaire qui assure le réamorçage des oeuvres. Visible successivement dans les lieux d’exposition de La Vitrine (Paris) et de Zoo Galerie (Nantes) et suivant un for­mat d’exposition flash, Rocket engine ou la métamorphose des agrégats permet une construction évolutive du cadre de l’exposition, et la dynamique d’enchaînement des présentations participe à la vitalité de l’expérience. Les artistes partagent une volonté de favoriser le terrain de l’expérimentation, ils réfléchissent et testent les matières dans des productions qui rendent compte de manière inventive et subversive de traces de processus et de la mémoire d’actions. Les espaces requièrent de chaque artiste une dilution, une expansion, voire une reconstruction ; une ré-orga­nisation formelle qui assure paradoxalement la conservation des oeuvres. Ainsi Anthony Bodin joue avec l’imaginaire du plein et du vide, Emilien Adage détraque les lumières du lieu et influe par là même sur tout ce qui l’entoure. L’étrange cocotte minute sous pression de Justin Meekel nous rappelle la sub­jectivité de toute forme. Les peintures murales d’Athene Galiciadis et de George Henry Longly se déploient selon des dimensions variables et façonnent les surfaces. À l’inverse la photographie du sol à échelle 1 de Camille Laurelli et La grosse sublime de Fanette Muxart se fondent dans les espaces peuplés par les étranges créatures lumineuses de Fabrice Croux. Pour prolonger cette expérience, Balle neuve éditera un ouvrage contenant une présentation écrite et imagée des deux versions de l’exposition. Les huit artistes de Rocket Engine contribueront à cette publication par des projets spéciaux visant à étendre l’espace physique de chaque lieu dans la temporalité de l’imprimé.