Marie Aerts

Être de ceux auxquels les hommes croient
Exposition
Arts plastiques
Galerie Dix9 Paris 03

Dans la lignée de ses premiers travaux, Marie Aerts poursuit sa réflexion sur le pouvoir et les relations qu’il entretient avec les hommes. Après avoir traité de l’individu à travers la figure d’un «homme sans tête », la jeune artiste française interroge le pouvoir lui-même, pouvoir entendu souvent dans sa forme extrême d’autorité. Son regard critique reste néanmoins toujours empreint d’humour et de poésie. 


Pour cette deuxième exposition personnelle à la Galerie Dix9, Marie Aerts présente un corpus d’oeuvres qui visitent les interstices du pouvoir, là où les symboles s’installent et déploient leur capacité de fascination. Au-delà de leur force apparente, l’artiste cherche la trace et s’intéresse à l’ombre portée de ces symboles, à leur côté dysfonctionnel. Elle s’y attaque à travers diverses stratégies d’altération qui lui sont chères. 

Elle revisite l’image officielle de dictateurs contemporains. Dans ces portraits peints à l’huile sur bois, tels les icônes, les protagonistes ont gardé leur tête* mais sont dépourvus du regard (Les bienheureux). Si l’oeil est « le plus despotique des sens**», on se demande si la représentation de ces hommes les yeux fermés signifie leur refus de voir, pour éviter la confrontation entre regard individuel et regard collectif et historique. Ou si l’artiste les apparente à des portraits mortuaires, sorte de destruction de l’image médiatique traditionnellement véhiculée. 

Autre symbole de pouvoir : l’argent. Jouant avec l’argot de la langue française, quand la brique désignait un million d’anciens francs, Aile du désir, est une monnaie utopique : des briques gravées d’un billet de banque. Un billet vierge de toute représentation de l’autorité, dont la valeur est basée sur le nombre imaginaire «i». 

Dans la vidéo d’animation Le Roi, il y a aussi cet aigle, roi des oiseaux et symbole de la toute-puissance, devenu ici étrange animal sans pattes ni yeux, qui vole sans direction, condamné à ne plus s’arrêter. En héraldique, l’aigle est normalement représenté de face avec ses attributs de puissance déployés que sont tête, ailes, plumes de la queue et pattes. Comme s’il faisait encore partie d’un drapeau, cet aigle acéphale, transformé ici en symbole de l’impérialisme déchu, continue son vol insensé vers le néant. 

Inspirée d’un épisode de la Révolution Française, la pièce Être de ceux auxquels les hommes croient s’inscrit dans le registre de la statuaire commémorative. Le canon de la sculpture évoque ceux de l’époque, fabriqués grâce à la fonte du bronze des prestigieuses statues royales. Avec un socle en marbre et une épitaphe gravée à l’or fin, cette stèle évoque des événements de rébellion contre le pouvoir qui n’ont cessé de traverser l’histoire. 

C’est finalement avec la vidéo Chair que Marie Aerts interroge les revers des mécanismes du pouvoir à travers deux scènes antagonistes. Une chaise vide trônant sur un socle qui tourne sur lui-même, devient l’objet d’une révolte contre l’autorité. Le lynchage du symbole témoigne d’une perte de croyance qui lie les hommes et le pouvoir. 

Un symbole qui n’est plus de ceux auxquels les hommes croient. 

 

* Marie Aerts a fait des portraits d’homme 

** William Wordsworth, dans The Prelude

Horaires

du mardi au vendredi de 14h à 19h, le samedi de 11h à 19h et sur RDV

Adresse

Galerie Dix9 19 rue des Filles du calvaire 75003 Paris 03 France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020