Magali Jacques - Aki Lumi

Complément d'informations

Magali Jacques présente une série de photographies intitulée Plateformes qui sont autant de prises de vue dont nous n'avons jamais conscience et qui pourtant enregistrent nos moindres errements. A la manière de la caméra vidéo, haut perché, un oeil nous regarde en coin, comme pour mieux "dénicher" nos égarements ou nos "sorties de route". Les passages fugaces parfois surpris par l'appareil photo-camera soulignent le vide de l'espace urbain. Ces espaces où l'homme est de transit semblent trahir des non lieux, là est sûrement un paradoxe du lieu d'échange. La disposition par séries de huit photographies renforce d'autant l'impression de se trouver face au mur d'écrans du poste de surveillance vidéo. Néanmoins, devant ces écrans et malgré l'immatérialité de la vidéo, nous sommes comme face à un tableau. L'image est picturale, avec des perspectives, le rythme est donné par les diagonales et les couleurs ont des effets de glacis.


A première vue les oeuvres photographiques d'Aki Lumi Systems/Elements sont de sobres paysages urbains. Toutefois elles font naître un trouble chez celui qui regarde. Ces images sont-elles hyper réelles ou bien irréelles? Il semble que ce soit entre ces deux; une seconde réalité ? Quelle réalité capte l'appareil photo ? Là, les variations des temps de pause et un précieux travail à l'ordinateur sur la couleur, poussée jusqu'aux limites de la monochromie, font advenir des paysages ou des éléments d'architecture "sur-réels". En effet, le Temps n'impressionne pas au sens photographique, il agit à la manière d'un "effaceur" du vivant, ou encore comme un révélateur d'absence, à l'instar même de la photographie qui est là pour témoigner de ce qui n'est plus.
La ville se montre en morceaux dépourvus d'inscriptions temporelles et géographiques propre à sa création : des façades d'immeubles, des parkings, des routes, des espaces indéfinissables mais caractéristiques de la ville moderne. L'homme a créé l'univers, mais ce dernier tend de plus en plus à être autogène, la ville tend à sa propre reproduction à l'identique -ex nihilo- elle est de plus en plus indépendante de l'homme. Ainsi, alors même que les villes ont mis des siècles à être érigées, il semble qu'aujourd'hui celles-ci s'érigent seules. La ville est un domaine extensif, toujours en mutation.
Aki Lumi pense la ville comme un réseau, son travail photographique joue des analogies entre les réseaux humains, les réseaux informatiques et les réseaux urbains, ils sont des "objets fractals", à l'image les uns des autres.

Conférence jeudi 28 novembre à 18h30 sur le statut de l'image photographique contemporaine par Jean Lauxérois, philosophe.

A l'heure où le numérique et la vidéo sont partout omniprésents, les artistes contemporains explorent ces nouveaux matériaux et créer des oeuvres "mixtes" dont le statut indéterminé amène à repenser la notion d'oeuvre d'art. Quel art est la photographie? Unicité de l'oeuvre ou image multiple? Comment exposer la photographie? Quelle est la nature des oeuvres vidéo, des projections?
Débat, échanges avec des artistes plasticiens.


L’AIR DU TEMPS

Dans l’air du temps circule désormais l’idée qu’il y a de « nouvelles images » - images numériques, images de synthèse... - dont la technique transformerait plus ou moins radicalement et la nature de l’image et la nature de l’art qu’elles peuvent mettre en oeuvre.
Pour autant, la notion de « nouvelle(s) image(s) » ne laisse pas d’être problématique. Sait-on bien, d’abord, ce que serait exactement la nature de « l’ancienne », ou des « anciennes » ? Les caractéristiques techniques suffisent-elles à définir leur différence ? La commodité du « nouveau » ne dissimule-t-elle pas notre inaptitude à penser la multiplicité des images et les passages entre leurs différents régimes, à penser aussi, plus radicalement, tant la dimension de la technique que la nature même de l’Image ?
En passant donc au revers des « nouvelles images », on se proposera, notamment autour du concept d’ « analogie », d’instruire la question de l’image technique. Pour montrer qu’au-delà des ruptures qu’elle a pu créer, l’affaire reste moins celle du médium que celle de son usage, et que l’image a d’abord trait à la manière dont le temps s’y inscrit : à la manière dont elle laisse ou non circuler « l’air du temps ».
J. L.