Lustrer - Paul Mpagi Sepuya
PAUL MPAGI SEPUYA
LUSTRER
June 03 - July 29, 2023
11-13, rue des Arquebusiers, 75003 Paris
La Galerie Peter Kilchmann Paris est heureuse de présenter LUSTRER de l'artiste Paul Mpagi Sepuya, basé à Los Angeles. Il s'agit de la toute première exposition personnelle de l'artiste à Paris et de sa deuxième exposition avec la Galerie Peter Kilchmann.
LUSTRER est le dernier volet du projet DAYLIGHT STUDIO / DARK ROOM STUDIO (2021 – aujourd’hui) de Sepuya. Son regard anachronique sur la photographie d’atelier d'Europe occidentale et d'Amérique du 19e et du début du 20e siècle tisse des interactions et des réflexions toutes à la fois ludiques et intenses, apportant également une perspective noire et queer contemporaine aux origines du désir qui s’épanouit dans le médium. L'exposition réunit des œuvres issues de plusieurs séries cependant connectées parmi : Daylight Studio, Twilight et Dark Room Studio, tout en introduisant de nouvelles œuvres : Silver, Flowers et Garden Prints.
Lorsque Sepuya déménage de studio pendant le printemps 2021, il amorce des recherches sur les décors qui se déploient dans les premiers ateliers photographiques. Il se met ainsi à accumuler des objets dans son nouveau studio : des antiquités européennes et africaines, des reproductions contemporaines postmodernes, des outils de jardinage du début du XXe siècle, des tapis et des coussins ainsi que de l'argenterie, tous s’exhibant sur les larges rideaux de velours noirs en toile de fond. Néanmoins, il ne s’agit pas pour l'artiste d’élaborer une sorte de reconstitution historique, plutôt de privilégier une forme de jeu qui témoigne de l'impossibilité de la nostalgie. La quantité de ces objets et leurs références, s'éloignent de l'esthétique utilitaire contemporaine qu’ils trouvaient dans son précédent projet Dark Room ; ils permettent ici une exploration plus poussée de la chambre noire en intégrant des éléments des décors d’ateliers en lumière naturelle.
Cette toile de fond est aussi celle sur laquelle Sepuya conduit des études photographiques sur les arrangements d'objets, les modèles ainsi que des compositions "didactiques" telles que "Camera Lesson" et "Daylight Studio Session", où l'artiste est alternativement instructeur technique d'un sujet ici et modèle ailleurs. La photographie An Ethiopian Chief de F. Holland Day, réalisée en 1897 avec l'artiste et modèle noir J. Alexandre Skeete, est une source d'inspiration toute particulière pour Sepuya. J. Alexandre Skeete était un ami de Day, homme riche et blanc, qui le photographiait pour rendre hommage à l'empereur Menelek II. À revisiter ainsi des sujets photographiques historiques s’offre la possibilité de réinterpréter leur dynamique et ce que la perspective photographique occidentale limitante a pu manquer d'enregistrer d’une manière appropriée dans son propre hémisphère et dans d'autres.
L'exhibitionnisme, l'objectivation, l'identité sexuelle et l'autoportrait se manifestent simultanément à travers les motivations espiègles des différents participants : ils sont amis, souvent collègues artistes ou, à l'occasion, étrangers anonymes. L'artiste quant à lui, passe du rôle de modèle devant l’objectif à celui d'opérateur derrière l'appareil photo, ramenant ainsi à un niveau démocratique la dynamique du pouvoir entre lui et ceux qui participent de son travail. L'appareil photo apparaît ainsi dans les photographies comme un symbole d'autoréflexion en même temps qu’il place le regardeur à l'extérieur de l'image.
L'impact et les traces de ces actions sont rendus visibles dans les meubles placés d’une manière désordonnée, les coussins déformés et les surfaces de miroir tachées. Sepuya intègre ces miroirs de grand format pour contrebalancer les compositions de ses clichés et refléter leur cadre. Se créent alors des boucles de perspectives à plusieurs niveaux et des angles de vue supplémentaires qui permettent au spectateur de surprendre l'atelier de l'artiste et ses sujets.
Au XIXe siècle, le studio en lumière naturelle était l'endroit désigné par le photographe pour l'exposition des photographies, en tandem avec la chambre noire où les tirages étaient développés puis produits. La chambre noire est également le lieu désigné de l'exploration sexuelle et de la socialité queer, un endroit où les sens sont conditionnés par les lumières rouges ambrées (safe lights) pour éveiller le toucher et la vision. Avec "Daylight Studio", "Twilight Studio" et "Dark Room Studio", Sepuya introduit ces conditions changeantes de lumière comme de potentielles combinaisons et recombinaisons de types d'images qui peuvent être réalisées en studio. Les images de Dark Room Studio sont réalisées en longue exposition à la lueur de ces lumières rouges et sont souvent produites sur aluminium sous la forme de tirages par sublimation thermiques profondément saturés.
Les Garden Prints sont des tirages sur papier salé réalisés à partir d'instantanés pris par l'artiste lors de l'aménagement du jardin de sa maison de Los Angeles. Ils font référence aux photographies de jardin d'Hippolyte Bayard. Le jardin de Bayard, comme ceux de nombreux autres praticiens et amateurs de la première heure, était le lieu de nombreuses premières photographies en raison de l'abondance de lumière qu'il offrait. En travaillant à son propre jardin, l'artiste contemple comme certaines formes de labeur peuvent également prodiguer du plaisir, ainsi que l'entretien de relations sociales profondes rendant son travail possible sont récompensées.
Les photographies les plus récentes comprennent des arrangements avec et l'usage de l'argenterie. Elles créent donc un lien historique avec l'activité manuelle du polissage de l'argent, un processus traditionnellement laborieux, ainsi qu’avec les émulsions d'argent qui sont un élément crucial dans le développement de la photographie. Le polissage de l'argent et l'application de l'émulsion argentique dans la chambre noire font apparaître une image, soit en éliminant la ternissure, soit en provoquant une réaction chimique qui révèle l'image exposée. Toucher, conditionner et modifier dans un geste répétitif la surface de l’objet pour atteindre sa clarté est au premier plan de l'esprit de l'artiste lorsqu'il travaille sur ce nouveau corpus d'œuvres. Le titre LUSTRER appelle aussi la riche histoire de Paris. L'argent y jouait un rôle prédominant dans les cercles aristocratiques et la bourgeoisie certes, mais aussi en tant que cette ville était le berceau des débuts de la photographie. Dans ces séries, Paul Mpagi Sepuya crée une riche variété de photographies de studio contemporaines qui transforment les références historiques, chacune entérinant la profondeur de l'approche conceptuelle des thèmes historiques qu'il sélectionne.
Complément d'information
LUSTRER est présentée en même temps que PUSH/PULL, une exposition personnelle d’œuvres de la même série qui ouvrira le 11 juin 2023 à la Galerie Peter Kilchmann à Zürich, Maag.
Paul Mpagi Sepuya (né en 1982 à San Bernardino, CA) vit et travaille à Los Angeles. Ses œuvres font partie des collections du Museum of Modern Art, des musées Whitney et Guggenheim, du Studio Museum à Harlem, du ICA Boston, du Getty Museum et du MOCA à Los Angeles, du IMMA Dublin, du Stedelijk Museum à Amsterdam et de la Tate London, entre autres. Son travail a été commenté dans le New Yorker, le New York Times, Art in America et a fait la couverture du numéro de mars 2019 d'Artforum. Sepuya a récemment fait l'objet d'une exposition individuelle à la Deichtorhalle, Hambourg (2022) ; au Festival of Photography, Melbourne, AU (2022) et a participé à des expositions collectives au MOCA, Los Angeles, US (2022) ; au Barbican, Londres (2020) ; au Whitney Museum, New York ; Guggenheim Museum, New York, et au Getty Museum, Los Angeles (toutes en 2019) ; au Museum of Modern Art, New York ; Museum of Contemporary Art, Chicago (toutes les deux 2018) ; au New Museum, New York (2017) ; et bien d'autres encore. Une rétrospective des œuvres de 2008 à 2018 était présentée au CAM St. Louis et au Blaffer Art Museum de l'université de Houston, accompagnée d'une monographie publiée par le CAM St. Louis et la fondation Aperture. Il est professeur associé par intérim en Media Arts à l'université de Californie à San Diego.
L'artiste sera présent lors du vernissage.
Une rencontre/discussion avec l'artiste et Florian Ebner, chef du Cabinet de Photographie du Centre Pompidou, aura lieu le vendredi 23 juin à 19 heures.
Horaires
Vernissage: Samedi 3 juin de 17 h à 20 h.
Horaires de la galerie: Mardi-Samedi de 11 h à 19h.