Léa Lebricomte

Résidence et exposition
Exposition
Arts plastiques
Station Mir Caen
Le parachute doré est un parachute réalisé a l'échelle 1, tel un authentique parachute. La toile et le cordage on été remplacés par un tissus d'or et un cablage de filins dorés. Il est présenté dans l'espace, gonflé et déployé comme en plein vol et non avachi au sol aprés l'atterrissage. Il est revendiqué en tant que sculpture. Il représente le déplacement d'un corps dans l'espace, donc le mouvement. Il est organique, c'est une enveloppe qui suppose la collision avec les éléments, une orthèse du corps qui fait appel a la perception des sens. Le parachute est une voûte flexible freinante, une capsule de ralenti qui parle à la fois de la chorégraphie, de l'architecture mobile, de la sculpture et du performatif in situ dans une mise en abîme physique et mentale. C'est la coquille de l'espace à l'échelle humaine! En dorure, son panache éblouissant se réfléchit dans l'environnement créant une ambiance spaciale magique. Le parachute doré est d'abord la figure sémantique du privilège abusif et scandaleux des compensations et indemnisations d'une logique ultra capitaliste. Il incarne le symptôme de la crise mondiale économique. Entre la tentation et le désastre, il sécurise. Il plane en zone de non-droit dans la surenchère frénétique du CAC 40 et des stock-options. Il représente l'outrance des gratifications odieuses. Il est le "cul d'sac" de la valeur "astronomique", conséquence ultime d'une croissance effrénée jusqu'à la nausée aux dépends de toutes entreprises collectives. Des "capitaux flottants" aux "monnaies flottantes", le parachute doré, tel un "objet volant de Damoclès" , devient l'emblème du rapace, le "condor du rendement" qui présage la chute de l'empire... le comble de la prime! Si le mythe d'Icare est lié au désir de voler, il aborde d'abord le désir de l'homme d'aller toujours plus loin, au risque de devoir se retrouver face à face avec sa condition de simple être humain.... ( Icare est connu principalement pour être mort après avoir volé trop près du soleil avec les ailes de cire imaginées par son père Dédale ). Le parachute doré tente de ralentir la chute afin d'amortir le choc brutal imminent d'un chaos global provoqué par le sacre de l'individualisme. Du vol au vol, le miroitement de la pièce" parachute doré" se pose ici, comme "réflecteur d'attention", d'alarme. Une aubaine! Il se ré-active comme objet modifié positif devenu sensible pour embellir, rendre merveilleux, illuminer. Il est grand temps de transformer nos comportements... "La qualité des choses n'est qu'un leurre si elle n'émane pas de la qualité des êtres. La création d'un nouveau style de vie inaugure l'abolition de la société marchande par la société vivante" . Raoul Vaneigem. L'objet convertit est parachuté dans le contexte de l'art tel un méta-ready-made enrichi, tendu, gonflé, un volume d'une envergure gracieuse et irradiante. Le volume pneumatique est désigné pour être largué, lâché, abandonné et exhibé dans les galeries, centres d'art, musées, biennales, foires. De l'appropriation à sa mutation, la parachute doré détourné devient une para-sculpture à la fois concrète et fictionnelle. Cette para-sculpture rappelle l'ornement précieux et la sacralisation des retables, des enluminures, des dorures de statuaires à la feuille d'or, des icônes. Elle pointe aussi l'exaltation de richesse ou de dévotion, le culte du kitsch de luxe ou bad, (bibelots de Lourdes, du Mont St. Michel, etc...) et bien entendu dans la situation contextuelle de l'art contemporain, le bling-bling, la starification, la vanité en diamants de Damien Hirts ou les stucs de Jeff Koons. Si le "parachute doré" , éloge du Jump-art, parodie le mauvais goût clinquant et flamboyant des palaces de Dubaï tout en jouant du pseudo-nirvana pop de Bollywood, c'est d'abord dans son évanescence et sa fragilité scintillante que la sculpture se déploie telle une présence silencieuse, en suspend, cristalisée, évoquant le mouvement et son flux aérodynamique. La pièce inerte semble osciller du parabolique à la parabole. Elle suggère à la fois l'attraction gravitationnelle, la dynamique/masse de l'énergie des courants, la force de la dérive, le flottement, la plongée et le glissement dans l'air. L'air des éléments fondamentaux comme l'air du temps... Le parachute doré est une allégorie. Entre physique et alchimie, nature et artifice, l'objet d'or peut faire référence à la sensibilté pure d'Yves le monochrome, son architecture de l'air comme ses échanges de trans-économie (projection de poudre d'or dans la seine). On imagine ainsi la parabole du saut dans le vide d'Yves Klein, retraitée, arnachée, prothésée autant pour freiner la chute que pour faire durer le plaisir. Pour parer à la catastrophe comme pour se parer d'attributs alchimiques et mythologiques, l'objet ainsi magnifié est enrichi d'une plus-value poétique et sa beauté en devient troublante. Si le parachute peut suggèrer les préoccupations-obcessions de Panamarenko. On peut penser parfois aux fictions sophistiquées de Mariko Mori ou de Matthieu Barney. Il faudrait aussi évoquer une prolongation équivalente aux expériences antérieures comme le parachute Dream Gould, les expériences de AntFarm, les gonflables d'Archigram mais aussi du soft-art et du mouvement du"non-forme" des sculptures molles et souples de Robert Morris, Eva Esse, Flanagan, Claes Oldenburg, certain travaux de l'Arte Povera ou encore de Joseph Beuys.... A ce propos, il faut quand même rappeller que le "principe d'équivalence" expérimenté scientifiquement par Galilée a été détourné en "principe d'équivalence et de création permanente" par Robert Filliou. Les analogies de "haut vol" sont souvent déployées pour planer comme une manière de réver et s'échapper du monde réel, toutefois ici, il s'agit de planer pour jouer en lévitation sémiotique avec un point de vue critique sous-jacent pour se délester des euphories. Concernant la source de cette pièce, Il est nécessaire de situer "le parachute doré" (qui convoque la glisse), dans la suite logique du travail entamé autour de l'escargot, dans cette lignée du "temps juste", des métamorphoses du corps en "paysage vibrant" et de la mue.. "Mes performances métamorphosent mon corps en paysage vibrant pour escargots-tumeurs, collés, coagulés, luisants. Le changement de point de vue produit un glissement et révèle la vitesse réelle de l'escargot. Je veux faire apparaitre une nouvelle réalité que je revendique comme le temps juste. La peau et les artifices se révèlent sous la bave. La danse des escargots est un lent rituel de recouvrement subtile." Léa Le Bricomte. Ainsi dans le processus du travail déclenché avec l'escargot, l'idée de l'homme-escargot avec sa coquille sur le dos est d'un glissement évident. Cette fois, le recouvrement n'est plus constitué de bave mais d'or. La coquile de l'escargot est ici remplacé par le sac-harnais du parachute. Dos-fardeau comme épreuve, le sac-harnais fait basculer le champ du bestiaire chimérique vers l'hybride post-humain. L'homme-escargot devient le cyborg-femelle dream-machine avec son harnais-parachute sanglé comme une Lara-croft de l'espace. L'homme-escargot renvoi aux maison-cerveau. (réf: catalogue de la ferme du Buisson (Fabrice Hyber, Hubert Duprat, etc... ). La mutation homme-machine-hermaphrodite s'opère poétiquement. Son autonomie, son désir de dérive nous égare dans le trans-flottement magestueux des utopies-live. On plane réellement dans l'infinitude des espaces pliés. On plane entre deux airs pour se dérober aux genres. D'ailleurs, le "planorbe" est un mollusque, un escargot des eaux douces)............. Le parachute doré est bel et bien une figure sémantique démultipliable, une "machine désirante en migration". (Gilles Deleuze). Si dérober = Voler, voler dans le vide c'est aussi "s'envoyer en l'air". Son glissement sensuel et sexuel ne fait aucun doute. En interface, la robe du parachute est un jupon. De la chute libre à la chute des reins, tous les accessoires de la panoplie deviennent auto-revers. Le parachute se métamorphose en appareil de suspension sado-maso. Le sac-harnais du parachute devient bustier chic. Chaque élément du parachute rappelle les accessoires SM et bondage; Bretelles, sangles de poitrine, cuissard et mousquetons, suspentes et poignets de pression. La soie de la voilure se transforme en voilage aguichant. De la commandes manuelle et ventrale jusqu'a l'orifice de l'écoulement d'air du parachute qui devient un anus/vulve en orbite, ainsi paré, le cyborg-femelle peut provoquer tous les orgasmes atmosphériques dans les strato-vapeurs les plus étourdissantes.... On sait que dans le language Sm, le parachute est un instrument de torture sexuelle, sorte de cône de cire, métal ou latex qui s'accroche à la base du scrotum par des lanières. Etonnante analogie sémantique! "Apparat-chute libre", la jupe flottante du parachute doré ondule comme un frou-frou aéroporté dans les vibrations des désirs jusqu'au vertige. Le vol s'apparente alors au volage scandaleux.........Le golden handshake est la sculpture-glam de l'espace, l'hyperbole de l'art contemporain dans toutes ses outrances déviées, de la séduction jusqu'à sa valeur marchande exponentielle.... comme un défi sweet planant en arrêt sur image, un moule malique du cosmos. Le mystère plane...... (Tout cela sur l' air de " Parachute doré" d'Alain Souchon mixé au "monoton" d' Yves Klein ) référence: - La chute, roman d'Albert Camus- -La chute dans le temps, oeuvre de CIORAN Pour la revue PARACHUTE (magazine d'art contemporain editions@parachute.ca PARACHUTE souhaite continuer à se développer sous forme de magazine comme sous forme d'événements voués à la dissémination d'idées innovatrices en art contemporain. Aidez-nous, si vous le pouvez, avec une contribution financière et de brillantes idées!

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Dernière mise à jour le 2 mars 2020