Le Poulet Dominical

Exposition
Arts plastiques
Galerie Patricia Dorfmann Paris 04
" Tout est l? pour la c??ration : le mobilier baroque et la table dress? sous le lustre ?incelant et, au centre de celle-ci, l'incontournable poulet r?i. " (Maya Blache, psychanalyste. Paris, mars 2003.) Techniques: velours ras? marquetterie, dessin sur papier.

Complément d'information

Le Poulet Dominical

Maro Michalakakos nous convie ?un repas de famille, un de ces repas du dimanche o?se retrouvent parents et enfants et qui font la d?ectation des " petits bourgeois ", c'est le rituel d'apr? la messe ou le rituel en place de messe. Tout est l? pour la c??ration : le mobilier baroque et la table dress? sous le lustre ?incelant et, au centre de celle-ci, l'incontournable poulet r?i.
Entrons plus avant dans cet univers si familier.
La table est ronde mais de ce type qu'on nomme gu?idon (gu?is-donc !) et par lequel on ?oque les esprits. Sa stabilit?est assur? par un socle puissant par sa taille et sa couleur, triangulaire comme si ?aient pos? l?d'embl? les fondements de la famille, la trinit?de cet office du dimanche : le P?e, la M?e, l'Enfant, triangulation oedipienne d'o?surgit la volont?de puissance phallique du p?e, et le pied central de la table, son axe et son support. Le plateau rond, f?inin donc, mais d'une f?init?lisse et glac? ; point de nappe ici, on montre tout, la femme n'est pas voil?, elle est surface parfaite, aucune tache, que ce soit celle de la faute, de l'?otion ou du temps, ne pourra y laisser sa marque, son interrogation ou son exclamation. Et dans la zone ronde et sombre du centre, le poulet r?i incis?(?d?aut d'excision) dans la chair du plateau, m?aphore lubrique du sexe f?inin, le sexe mort de la m?e offert en sacrifice pour les siens. " Ceci est mon corps... ". M?aphore implicite de la C?e o?le fils de Dieu se fait femme offerte sur un plateau, ?la lumi?e crue d'un lustre qui donne ?l'ensemble la sensation d'un bloc-op?atoire ?fin d'autopsie.
O?se trouve donc le mal qui ronge cet amour inconditionnel qu'enfants et parents se sont jur? ?
D'autres ??ents du mobilier surgissent comme points d'exclamation dans cette histoire sans parole :
- c'est un miroir-psych?tendu de velours rouge o?l'artiste a incrust? taill?au bistouri deux mains ?hauteur sp?ulaire du sexe. Deux mains qui cachent, entre pri?e et r?ignation, deux mains en position de modestie comme celles inoccup?s de ces vieilles femmes grecques assises et silencieuses, mains pos?s jointes sur le tablier : les efforts de toute une vie ont abouti ?ce geste qui dans une pudeur ambivalente souligne l?o?se trouve le manque.
- C'est une tenture de velours rouge, lourde et sensuelle presque organique o?deux mains sous-tendent une ?ection tandis qu'une troisi?e au bout d'un bras comme venu du ciel brandit un pistolet absent.
Jouissance dyadique, mais c'est bien de jouissance phallique dont Maro Michalakakos veut nous entretenir ici. Cette jouissance dyadique parce qu'entre deux craintes : celui d'un p?e pris pour Dieu qui accuse de son index point?et qui peut tuer, celle de la femme m?e par le velours rouge exprim?et qui peut d?orer, jouissance dyadique d'Eros et de Thanatos.
- C'est un fil ?ectrique enrob?de velours rouge, un lien charnel qui s'accomplit en ouroboros " renouvellement perp?uel qui repasse sans cesse par la m?e phase de mort-r?urrection et qui permet d'atteindre ?cet indiff?enci?qui se tient au-del?des couples d'oppos?s ".
(e)pris(e), ne dit-on pas d'un homme qu'il a pris une femme comme on " prend au pi?e " ? Prise m?e, prise femelle, silhouette f?inine ?m?e le sol, prisonni?e de la circularit?du lien, sans jambe pour fuir, sans bras pour se d?ier, femme prise au pi?e de son amour mais aussi femme que l'amour peut diff?encier de la cruelle diff?enciation : OUROBOROS.

Le rouge et le blanc associ? comme contraires et compl?entaires avant l'apparition du spectre scientifique. OEuvre au blanc, oeuvre au rouge, travail du f?inin dans l'Alchimie M?i?ale ; rouge sang de la virginit?sacrifi? sur le premier drap blanc conjugal ; rouge du sang de la blessure ou l'intrusion chirurgicale sur le blanc de la chair ; rouge sang de la vie qui se rit de la mort blafarde et enfin rouge du vin rouge sur le pain blanc de l'Eucharistie. Mais pour quel Dieu ce sacrifice ? L'Amour.

L'oeuvre de Maro Michalakakos nous parle d'amour ; ou plut? nous questionne sur l'amour.
Par le jeu des textures contrast?s : la chaleur du bois, la froideur de la lumi?e ; le lisse, le rugueux, le plan, le h?iss?; celui des formes : l'arrondi, le dress?; des couleurs : le rouge, le blanc, le dor? les d?linaisons du brun du solaire ?l'archa?ue ; des th?es : l'agap?r?nion, d?union.
Son oeuvre est incisive, ?la mesure du " hors-cadre " o?elle rase le velours au bistouri et o?elle d?oupe la chair du bois pour y incruster le symbole.
C'est une interrogation opini?re m?hodique et sereine qui veut par la coupure interroger sur le lien et sa rupture, sur le conformisme n?rotique qui rompt avec la pulsion et la laisse en jach?e, sur le " tout humain " de l'Eros et sa coupure / castration : la diff?enciation sexuelle, sur l'amour jusqu'au d?embrement, le don jusqu'au sacrifice.
Agap?autour de la table, orgie sous la table : double discours de l'Eros dans son acception dionysiaque, mais du Dionysos de Nietzsche, celui qui se dresse en face du crucifi?avec lequel il nourrit pourtant des liens occultes, ne fut-ce que par le sacrifice et o?il a comme par?re Ariane, celle qui ne l?he jamais le fil (lien) avec la vie.

Maya Blache, psychanalyste
Paris, mars 2003.
Galerie Patricia Dorfmann, 2003

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Maro MICHALAKAKOS

Horaires

du mardi au samedi de 14h ?19h

Accès mobilité réduite

Oui

Adresse

Galerie Patricia Dorfmann 61 rue de la Verrerie 75004 Paris 04 France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020