Biographie

Né en 1985 vit et travaille à Harlem (New York)
Réalisateur multi-facettes, cinéaste et photographe ; sa photographie de rue est révélatrice de l’histoire visuelle à son maximum. L’artiste Khalik Allah est connu pour ses photos prises dans les rues. Sans concessions, il montre une Amérique et des vies qu’une grande partie de la population ne veut pas voir. Cette recherche et ce constant besoin de se frotter à la réalité lui ont permis de signer des clichés d’une grande beauté et force. Dans Field Niggas, un film de couleur vibrante avec une qualité granuleuse, les estampes cinématographiques de Khalik documentent la vie de la 125e rue et de Lexington Avenue à Harlem (New York City). Shooté uniquement de nuit, on navigue dans un monde qu’on ne connaît pas via des rencontres et des portraits sincères d’hommes et de femmes anonymes. La pauvreté, la folie, les addictions, la peine… Sa caméra nous montre ces existences ravagées sans tomber dans le misérabilisme. Sa vision n’est pas comme les autres, avec le gros grain de ses photographies prises dans les ténèbres, sans flash, en se fondant uniquement sur la lumière disponible à partir de néons.
Son film Field Niggas a reçu une mention spéciale du FID 2015.
Extérieur nuit, au coin de la 125e et Lexington Avenue, Harlem. Khalik Allah, photographe dans la lignée de Bruce Davidson, y filme ceux qu’il rencontre, leurs récits jetés, scandés, leurs invectives, les gestes, capte les corps et les visages. Noirs dans leur très grande majorité. L’image qu’il obtient ne ressemble en rien à celles que peignent d’ordinaire les medias de ce monde nocturne de sans logis, de junkies, pauvres des pauvres qui au mieux indiffèrent et plus souvent font peur. Couleurs saturées, usage du ralenti, profondeur des contrastes : Khalik Allah donne à ses personnages une beauté fascinante. D’une figure à l’autre se dessine un portrait collectif, épique, où voix et corps disjoints construisent l’espace polyphonique d’une destinée commune. Ces Field Niggas apparaissent dès lors comme un écho contemporain aux field negroes évoqués par Malcolm X, ces esclaves qui refusaient toute allégeance ou proximité avec leurs maîtres, par opposition à la minorité des house negroes. Lecture encore actuelle ? Tel est l’enjeu autant que le programme du film, alors que les récents meurtres de noirs par des policiers blancs – qui les justifient par la peur – rappellent que les États-Unis n’en ont pas fini avec le racisme. La vidéo de la mort d’Eric Garner, corps étranger dont la laideur jure au milieu de ce monde nocturne et quasi maniériste construit par Khalik Allah, trouve alors tout son sens dans un film qui proclame avant tout la fragilité de ceux à qui il donne la parole. N. F.

« Tout sur moi est de Dieu. Ce sont des offres de guérison à l’esprit dans le monde du temps. Rentrons maintenant ensemble. Ce qui suit est la Photographie d’un fils de l’homme / ses paroles et ses vidéos. Rien réel peut être menacé. La louange est à notre Père céleste. » Khalik Allah
Q : Comment êtes-vous passé de la photographie au film ?
K. A. : Le film est un langage direct. L’émulsion traduit exactement ce que je veux exprimer, que s’opposer à un capteur qui aurait à le traduire.
Q : De quoi parle votre travail ?
K. A. : Je photograhie seulement la nuit. Je tiens à rappeler aux gens que nous sommes dans l’espace (le territoire).
« Allah rend compte de Harlem avec une telle honnêteté et une telle révérence pour les gens que son travail chevauche la frontière de l’engagement subjectif/objectif. Allah s’implique dans le compte-rendu, pas juste photographiquement, ou dans ses films, mais aussi dans la vie de ses personnages. Allah s’identifie à ceux qui errent dans la rue à 4h du matin. Le marginal qui fume du K2 (un mélange d’herbes, d’épices ou de plantes broyées sur lequel est vaporisé un composé chimique similaire au THC) et existe dans l’ombre. C’est dans cette ombre que se tapit Allah, un initié qui regarde et trouve de la beauté dans ce que la société considère comme étant le contraire du beau. » L’œil de la Photographie, juin 2015

« Dans le portrait, la photographie peut nous faire regarder d’autres personnes que nous préférons ne pas regarder. Nous pourrions avoir toutes sortes de raisons pour lesquelles nous ne voulons pas les regarder, certaines bénignes, d’autres pas. Mais je veux croire que nous devons beaucoup à ces photographes qui nous font regarder de toute façon, que nous le voulions ou non. Plus précisément : les photographes qui nous donnent la possibilité de regarder, la possibilité d’apprendre un petit quelque chose, la possibilité de réaliser à quel point la culture/société dans laquelle nous sommes embarqués, contient un peu plus que le peu de bulles dont nous préférons nous entourer. Qui est, après tout, le signe d’une culture saine : elle veut se développer, pour inclure plus, plutôt que moins. » Into the Light Khalik Allah propos recueillis par Jörg M. Colberg

 

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Dernière mise à jour le 2 mars 2020