JÖRG IMMENDORFF

Passage
Arts plastiques
Galerie Suzanne Tarasiève Paris 03

Jörg Immendorff a fait exister un monde, celui d’images issues de la Renaissance en s‘éloignant de plus en plus du climat libertaire et contestataire des années 60. Il découvre des formes d’érudition savante jusqu’alors délaissées pour en faire une source inépuisable d’inspiration et d’énergie. Dans cette aventure compulsive, il emmène avec lui des amis : Goya, Granville, Hogarth, Dürer, Caspar David Friedrich, etc. Il délaisse l’héritage de Pollock ou de Picasso et se tourne vers Schwitters, Max Ernst, Manzoni et Broodthaers. Cet appétit érudit pour les illustrations de livres anciens sera pour lui un moyen de signifier la fonction de l’art dans l’histoire et de libérer la peinture des limites d’un plaisir esthétique complaisant.

 

A partir de 2003 la maladie neuro-dégénérative dite maladie de Charcot, diagnostiquée en 1997, au moment où l’artiste connaît une reconnaissance internationale (il a alors 52 ans), provoque la paralysie du bras gauche puis celle du bras droit, et contrarie la réalisation d’un tableau. Avec le soutien de sa jeune épouse Oda Jaune, elle-même artiste, et d’assistants, Immendorff va trouver le ressort nécessaire pour produire ses dernières œuvres. Ce sont ces derniers tableaux que l’on peut voir ici, presque tous sans titre, très différents de sa production antérieure où la présence du langage était centrale. « Celui qui ne veut pas penser, qu’il sorte d’ici en vitesse » déclamait Joseph Beuys. Son élève préféré ne va pas seulement penser, il va vouloir rêver. Du temps qu’il lui reste à vivre, Jörg Immendorff va revendiquer une peinture mentale, onirique, introspective et illuminée. Il se quitte pour mieux se retrouver. Sa peinture, proche d’une Renaissance maniériste ou des proverbes flamands, invente une surréalité à la mesure d’un désenchantement. A travers ce collage universel apparaissent des images exigées par l’histoire. Il garde en permanence à l’esprit Beuys, Penck, Fluxus, sans oublier Marcel Duchamp, Rimbaud, Stockhausen et John Cage dont il fut l’assistant à New-York.

 

Ce qui avait fait le principe narratif de sa peinture disparaît : plus de perspective, de paysage, de profondeur scénique. A la place, un extraordinaire réseau de figures apparaît au cours de ces dix dernières années, avec différentes techniques : la superposition des motifs, le découpage au pochoir, le positif / négatif des formes, l’omniprésence de l’ornement. Ce réseau compose un fond tantôt tramé, tantôt abstrait, tantôt obscurci, sans qu’on soit sûr qu’un ultime motif ne s’y cache pas. C’est comme si tout relevait d’une surimpression mentale destinée à aller au delà des apparences. Son travail, depuis les années du Café Deutschland (1977-1983), conçoit la présence de ses contemporains, hommes politiques, écrivains, artistes et autres figures de l’actualité comme autant d’allégories d’un monde qui ne cesse de se diviser et de se recomposer au gré d’un spectacle, celui de l’histoire allemande avant et après la réunification d’octobre 1990.

 

Son expérience pédagogique à la Kunstakademie de Düsseldorf de 1993 à 2003 lui sera bénéfique pour le choix de ses assistants comme aux temps des maîtres anciens. Plus tard, le recours final à l’ordinateur lui confère une lumière inattendue, cette lumière et cette nuit qu’il a toujours voulu peindre. Elève de Beuys, étudiant de Teo Otto et assistant de John Cage, Jorg Immendorff, peintre, développe un art devenu par force majeure conceptuel. Témoin et acteur de son époque, il avait participé aux actions des années LIDL avec Chris Reinecke, à la période maoïste et ses dazibaos, à la cosmogonie punk du Café Deutschland, au scénario des « non-peintres » Duchamp et Beuys de la série Café de Flore.

Autres artistes présentés

Jörg Immendorff

Adresse

Galerie Suzanne Tarasiève 7, rue Pastourelle 75003 Paris 03 France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020