Jérémy LAFFON

Chlorophénylalaninoplastomecanostressrhéologoductilviridiscacosmographigum (de la famille de l'arbalétrier poracé)
Exposition
Arts plastiques
Galerie Isabelle Gounod Paris 03

Selon Roger Caillois dans le livre Des jeux et des hommes, il existe six caractéristiques essentielles du jeu : la liberté, le cadre spatial et temporel, l’incertitude, l’improductivité, les règles, la fiction. Si le "travail" artistique de Jérémy Laffon substitue dans ses créations une éthique dérivative du jeu à une vérité de la science, à une morale de la sainteté, à une vulgaire tautologie de l'art, s'il s'approprie ces six composants, il produit paradoxalement des œuvres car c'est l'artiste qui fait le jeu. chlorophénylalaninoplastomecanostressrhéologoductilviridiscacosmographigum (de la famille de l'arbalétrier poracé) : Jérémy Laffon poursuit son exploration buissonnière de la plasticité du chewing-gum qu'il s'approprie jusqu'à épuiser les potentialités esthétiques du matériau. Cette construction-accumulation appartient au genre reconnu de la sculpture d'objets-marchandises Pièce montée 1. Il joue à travers elle les "sculptectes" et met en œuvre les tablettes chlorophylles pour lutter contre la gravité dans tous les sens du terme. Cette pratique de "chewingtecture", à l'image de la matchitecture, requiert du temps de labeur, de l'énergie, de l'attention, une rigueur extravagante et un zèle de mise en forme baroque. Tout ici est une question d'équilibre et de chimère. Les dessins de la série Siffler en travaillant se font à la main. On retrouve le vocabulaire classique du dessin (traits, lignes, courbes, composition...) et son crayonnage mais on fait face à une transgression des règles de formation académique. Il n'est pas ici un outil élémentaire mais un procédé principal d'expression. Il se fait ici sans modèle, résultat d'une gestuelle et d'un dispositif où il est question de naviguer aux instruments, le geste allégorique du crayon qui tourne en rond. Et qu'on ne se trompe pas sur le tropisme du pseudo-aléatoire, l'artiste nous interprète ici le double jeu de l'accidentel, car il est possible d'acquérir un réel savoir-faire, voire de la virtuosité par la pratique à la toupie. Le dessin reste "jeu de main" et plaisir. Dans le triptyque de dessins issu d'une série de réalisations sur papier Rumeur et Papillotes, on retrouve un autre alter-ego de Jérémy Laffon : le Ping Pong Master Player (PPMP), plus précisément un article de sa ligne de productions où il joue avec le feu dans une sorte de rituel à la fois objectif et délirant. Le protocole consiste à placer sur une feuille de papier des papillotes constituées d'une balle de ping-pong enveloppée dans du papier d'aluminium. Ces papillotes fumigènes sont placées sur le papier à dessin comme des pions sur un échiquier. Puis elles sont chauffées une à une avec une flamme laissant des traces de fumée de leur combustion. Certains pions tombent sous la pression de la chaleur emportant dans leur chute leurs voisins. Ces perturbations créatrices défont la grille et réservent des zones de blanc sur le papier. Le dessin offre une image vaporeuse et mystérieuse. Les deux vidéos Alone in the studio et Symphony #2 semblent vouloir représenter cette part manquante du faire et du temps perdu, le moment privé de l'atelier. Alone in the studio donne à voir un simulacre de vidéo-surveillance délirante où on voit l'artiste en apprenti sorcier défier les lois du réel. Symphony #2 est un plan fixe sur un tableau d'outils de bricolage accrochés au mur. Les objets sont comme surpris dans leur oisiveté, à bringuebaler en cliquetant dans un courant d'air, chorégraphie visuelle et mécanique mettant en scène des acteurs de la création. Même quand ils sont au repos, ceux-ci font une œuvre. La pièce sans titre prolonge l'exposition dans la pyrotechnie avec d'autres balles que le ping-pong. La piste d'un enregistrement audio-numérique correspondant à l'onde sonore d'un tir armé (?), d’un éternuement (?), d’une explosion de ballon de baudruche (?), est ici transposée en douilles de calibre 22 offrant au regard la représentation d'une déflagration bien rangée. Le mot de la fin sera donné en contrepoint par l’œuvre BBUNG, onomatopée coréenne signifiant le bruit d'une petite explosion ("pop") ou encore "bluff"... transcrite phonétiquement, écrite typographiquement dans une police en douilles. Pourquoi le mot de la fin ? Car cet éclat de langage s'avère plus facile à retenir et prononcer que "chlorophénylalaninoplastomecanostressrhéologoductilviridiscacosmographigum". Luc Jeand’heur, 2011

Complément d'information

Jérémy LAFFON est né en 1978 à Limoges. Il vit et travaille à Marseille.
DNSEP, Esba Marseille (2007), DNAP (2005), Licence, Université Paris I - Sorbonne(2003).

Expositions personnelles au Centre d’art le Lait-Albi (2009), Centre culturel J. P. Fabrèque, Saint-Yrieix la-Perche, Galerie LA.AC.S./La vitrine, Limoges (2008), Ecole supérieure d’Arts décoratifs de Strasbourg (2008), galerie Le radar, Bayeux (2007)…

Expositions collectives (sélection) notamment Musée d’art et d’archéologie de Guéret (2010), Le bbb – Toulouse (2010), Art-O-Rama, Friche de la Belle de Mai, Marseille 2010, Abbaye St. André, Meymac (2009, Centre d’art le Lait- Castres (2009), Video best venues, Galerie Les filles du Calvaire (2009, Vidéochroniques, Marseille 2009), Atelier La Cour Carré, Pontault-Combault (2007).

Vidéos présentées (sélection) : 27ème Festival Tous Courts, Aix-en-Provence 2009. Simultan 04, Video and Media Arts Festival, Timisoara, Roumanie 2008. One Minute Film & Video Festival (5ème édition), Aarau, Suisse. Les Inattendus (Festival de Films Indépendants), Cinémas L’Elysée et CNP, Lyon. 2007 : Instants Vidéo et numériques, C.R.D.P., Marseille. Fe.V.E. Festival de Vidéo Expérimentales, One Minute Film & Video Festival, Aarau, Suisse. Simultan 03,Video Art Festival, Théatre Maghiar Csiky Gergely, Timisoara, Roumanie. Se Repete como Farsa, Cine Falcatrua, Casa Porto das Artes Plásticas, Vitória/ES, Brésil. Vidéoformes 22 , MagmArt 07, International Video Art Festival, Casoria Contemporary Art Museum, Napoli, Italie. 2006 : Single Reel Film & Video Festival # 3 , Culture Project, New York City, Etats-Unis. Post-Festival Paris/Berlin (RIPB), dans le cadre de PULSAR 2006, Caracas, Venezuela. 2005 : 10èmes Rencontres Internationales Paris/Berlin (RIPB), Cinéma l'Entrepôt, Paris.

A venir :
- Semaine (revue hebdomadaire, édition Analogues), suite à l’exposition Que Reste-t-il ?, le bbb, Toulouse, mai 2011
- Résidence au lycée militaire d’Aix-en-Provence, coordonné par le FRAC PACA, Aix-en-Provence, de mars à juin 2011
- Exposition de fin de résidence au LMA, Aix-en-Provence, juin 2011
- Intentions Fragiles, Galerie des Filles du Calvaire, Paris, du 5 au 30 juillet 2011
- Galerie de l'Abbaye de Coat Malouen (réseau art contemporain Bretagne), Kerpert, du 29 juillet au 18 septembre 2011
- Immixition - Ouvrage collectif sous la direction de Charline GUIBERT, dans le cadre de la Résidence de commissaire Entrée Principale menée par Rond-Point Projects, Marseille (à paraître fin 2011)

Artistes

Horaires

11 - 19 heures

Adresse

Galerie Isabelle Gounod 13 rue Chapon 75003 Paris 03 France
Dernière mise à jour le 13 octobre 2022