Global Sunset

Exposition
Arts plastiques
La Vitrine Paris 11

- Global sunset, 2008. Caisson lumineux, 1,20 x 1,80 cm. Coproduction ENSAPC, Cergy et Galerie Chez Valentin, Paris.

De retour d'une résidence à New York en 2007 et après une exposition personnelle la même année dans sa galerie Toxic du Luxembourg, Olivier Dollinger marque une toute nouvelle direction dans son travail : des sculptures branlantes et vibratoires faites de néons déglingués et de hauts parleurs empailletés qui amorcent une squelettisation et un court-circuitage des systèmes défaillants. Pour son exposition à La Vitrine, l’artiste continue de scruter l'icône et d'ébranler les clichés. C’est ici, à travers trois nouvelles pièces inédites et produites spécialement pour l’exposition, qu’il les met à l'épreuve. Il les pousse jusque dans leur retranchement en les extrayant de leur contexte pour les réinjecter dans des espaces 2D et 3D qui ne cessent de se frictionner. Pris comme lieux communs, au sens propre comme au figuré, les éléments types choisis - le coucher de soleil et le désert américain - sont des territoires surexploités, des images en surrégime à apprivoiser pour éviter l'engloutissement. C'est en amplifiant le régime propre à ces images tombées dans le domaine public, qu'il tente de domestiquer l'archétype. Carte postale de l'extérieur, paysages en 3D à arpenter de l'intérieur, les trois pièces autonomes de l'exposition « Global Sunset » forment une image mentale à parcourir physiquement suivant plusieurs points de vue, un dispositif visuel et sonore aux réminiscences cinématographiques. La pièce maîtresse de l'exposition, dont elle porte le titre et constitue par ailleurs son unique source lumineuse, superpose des calques transparents de cinquante photographies de couchers de soleil capturées sur internet puis enfermées dans un caisson lumineux. Cette accumulation qui s'effectue au profit d'une surbrillance du soleil et de son étirement au centre de l'image, engendre l'annulation partielle des images et la délocalisation de leur lieu propre. Si la pièce procède ainsi à l'épuisement du cliché, elle convoque au même moment l'épaisseur du regard à travers une image qui enfle et se matérialise sous le coup de l'augmentation des strates et des pixels. Au premier plan de cette ligne d'horizon, trois monolithes blancs balisent le parcours au sol. Leur titre, « 37°00'00.23'' N 110°06'00.26 », reprend les coordonnées d'un point de vue sur Monument Valley que John Ford est parvenu a copyrighté et que l'artiste tente de réaménager ici. En effet, ce désert typique de l'ouest américain, sur-visité tant par les touristes que par les réalisateurs, ne compte plus les prises de vue dont il fut l'objet, de La chevauchée fantastique de Ford, aux pubs Marlboro, à la série télé Supercopter, ou encore au jeu vidéo en ligne Motor Storm d'Evolution Studio. « Ce paysage surexploité contient une mémoire des différentes modalités de l'image », déclare l'artiste, « il est le décor de l'évolution du statut de l'image-mouvement, cristallisant le passage entre l'ère du cinéma, puis de la télévision jusqu'aux jeux de rôles en ligne. » Dans l'exposition, il ne reste de ce décor naturel que ses trois principales stars devenues de simples bornes redistribuant la circulation du lieu : trois rocs à échelle réduite et inversée, désormais surplombés par le spectateur, et aux formes simplifiées. Quand à la Weight Gainer qui les recouvre (de la poudre à gonflette pour body builders), elle ne les dope pas. Au contraire, elle s'agglutine contre ses parois, produisant un effet de cloisonnement de la forme et d’analogie entre la surexploitation d'une image et le boursouflage artificiel du corps - deux éléments maintenus dans une coexistence tendue. Constituant la deuxième ligne de fuite de ce paysage, Trading Voices on Line en est aussi la bande sonore. Diffusée depuis un trou noir percé au mur, la première impression d'un son enveloppant, contraint bientôt le spectateur à se rapprocher s'il veut parvenir à décoder ce qui apparaît d'abord comme un code morse. Il s'agit en fait d'un dialogue entre deux avatars du jeu en réseau Second Life, que l'artiste est allé espionner tandis qu'ils s'adonnaient à leurs activités quotidiennes d'investisseurs en ligne. Leurs voix réelles, transmises depuis leurs différentes localisations géographiques (Etats-Unis et Belgique), se mêlent indistinctement à l'habillage sonore de la plate forme boursière, parcourue de sons pseudos naturels et poétiques (oiseaux, cascade) mais aussi de bruits de claviers simulés. « La juxtaposition de différentes sources sonores, l'indétermination de leur nature et de leur origine spatiale crée le sentiment d'un temps autre et suggère un espace presque musical où toutes les temporalités se fondent en un lieu unique immatériel », décrypte l'artiste. Dans cette drôle d'exposition en forme de millefeuille qui entrelace les couches de virtuels et de réel, de naturel et d'artificiel pour les faire s'épancher et déborder l'un dans l'autre, Olivier Dollinger place le spectateur au centre du flux, dans l'épaisseur de l'image et de l'histoire qu'elle contient.

Horaires

du mercredi au samedi de 15h à 19h

Adresse

La Vitrine 24 rue Moret 75011 Paris 11 France

Comment s'y rendre

M°7, arrêt Aubervilliers - Pantin Quatre Chemins 
Bus 170 arrêt Hôpital la Roseraie

Dernière mise à jour le 13 octobre 2022