ERRO

« On est cerné par les images, il est impossible de leur échapper. » La formule est d’Erró lui-même. Elle lui colle à la peau comme à celle de n’importe quel visiteur de son atelier. Dire que celui-ci en est plein à craquer est un euphémisme. Il en déborde. Il y en a partout, aux murs, au sol, sur les tables, dans les tiroirs, en pile, en vrac, etc. Des images imprimées, découpées, peintes, dessinées. L’atelier d’Erró ressemble à une caverne d’Alibaba qui offre à voir une image du monde où tout se télescope, où tout est sens dessus dessous, où règne un joyeux et paradoxal capharnaüm organisé.
Depuis plus de soixante ans qu’il entasse, amasse, stocke, classe et exploite les images dont se repaît le monde moderne, Erró s’est non seulement constitué un réservoir comme un puits sans fond mais il s’en sert pour composer une œuvre fleuve qui draine la plupart des faits, des gestes et des acteurs qui font l’histoire. La petite comme la grande. Une œuvre unique en son genre, faite de références mythologiques, politiques, culturelles, médiatiques, etc. Si la bande dessinée dont elle s’inspire y est notamment considérée comme un des beaux-arts, la peinture s’y affirme, selon les propres mots de l’artiste, comme « un moyen de tenter de découvrir la signification d’un monde confus ».
En fait de confusion, l’art d’Erró est requis par un regard implacable sur le monde extérieur, tour à tour critique, ironique et onirique, voire follement amoureux, porté par l’envie de l’embrasser au plus large, toutes nations, toutes cultures, toutes langues confondues. Les images qu’il nous donne sont chaque fois une somme qu’il nous livre brute de coffre et avec laquelle il nous invite à nous débrouiller sans rien nous imposer. Erró ne se veut pas « l’interprète du monde ou de la pensée », il se pose simplement en « une sorte de chroniqueur des événements courants », « un reporter qui livre des significations nouvelles, et non un script ».
Composée d’une trentaine d’œuvres, de la fin des années 1950 jusqu’à aujourd’hui, l’exposition de l’Espace Paul Rebeyrolle n’en est pas pour autant une rétrospective. En convoquant tant le machinisme, l’art, le pouvoir, l’argent, l’ordre social que la longue marche de Mao, elle témoigne de la permanence d’une attitude créative et non d’un style ainsi que de la pertinence d’une œuvre qui ne cesse de se nourrir à l’écho du monde. Sans jamais se tarir.
L’exposition fera l’objet d’un catalogue édité par l’Espace Paul Rebeyrolle.
Tarifs :
Plein tarif: 6 € / Tarif réduit et groupes: 3 € / Gratuit pour les moins de 12 ans / Entrée gratuite le premier dimanche du mois (sauf septembre)