Détruire, disent-ils

Exposition
Musée de la Photographie
École européenne supérieure d'art de Bretagne-site de Rennes Rennes
Artistes : Mathieu Abonnenec (Paris), Lara Almarcegui (Amsterdam), Cyprien Gaillard (Paris), Zhenchen Liu (Paris), Clemens Von Wedemayer (Berlin) et Raphaël Zarka (Paris). Commissaire d'exposition : Patrice Joly.Cyprien Gaillard traque les ravages répétés à l’encontre de la modernité architecturale, les aberrations commises envers un ordre urbain synonyme d’une utopie enfouie. Des cités de banlieues de la région parisienne au centre ville ravagé de Détroit il constitue un vaste répertoire de ces édifices en ruine, sacrifiés aux sirènes d’un nouvel ordre immobilier et touristique. Il présente une série de photo de la cité de Pruitt-Igoe dont la destruction au tout début des années 70 signa pour beaucoup la fin de la modernité architecturale. Un autre polaroïd (que l’artiste utilise en permanence, peut-être jusqu’à la disparition totale du procédé…) montre une sculpture attenante naguère au World trade center, figurant la planète et miraculeusement épargnée par la destruction des tours, déplacée à quelques dizaines de mètres sur Battery Park. Le travail de Raphaël Zarka partage avec celui de Cyprien Gaillard la même attirance pour les cités en ruine et la destruction/destitution des monuments publics. Les photos présentées pour l’exposition montrent un chantier aux couleurs de Kaufmann et Brod, “agent” immobilier incontournable des grandes cités françaises et dont le rôle à ce titre influe directement sur la forme de la ville. En plaçant au centre de ses compositions ce nouvel acteur, “peintre” malgré lui, l’artiste pointe le rôle discret mais déterminant de la “promotion” immobilière. D’une certaine manière, le travail de Lara Almarcegui s’est “naturellement” orienté vers le coté destructeur de l’aménagement du territoire urbain après s’être intéressé à l’“exploitation” et à la “défense” des espaces vides à l’intérieur des villes : ces terrains vagues ont longuement occupé l’artiste qui en a cartographié l’existence dans un de ses premiers travaux d’envergure, à Amsterdam : sorte de cadastre à l’envers où les espaces délaissés par l’investigation immobilière et architecturale se retrouvent mis en lumière par ce retournement des valeurs. Dans le prolongement de cette logique de réévaluation, les montagnes de gravats résultant de la destruction d’îlots urbains prennent aux yeux de l’artiste une dimension purement sculpturale qui entretient une proximité certaine avec le travail des land artists américains. Un land art cependant inversé, urbain et donc anachronique, engendrant résolument des questionnements d’ordre écologique. Avec Zhenchen Liu, on passe à une autre échelle : il ne s’agit plus d’îlots, ni de blocks ou de cités, mais de destructions massives, de pans entiers de ville… La vidéo présentée, Under construction est faite de la juxtaposition d’une multitude de photos de chantiers de démolition composant au final une espèce de ruine gigantesque, apocalyptique, évoquant toutes ces villes anéanties par les bombardements de la fin de la seconde guerre ou bien encore des images d’après tremblement de terre. Ce scénario presque minimaliste est entrecoupé de reportages nous replongeant dans la réalité de la Chine du 21è siècle et la violence des pratiques de délogement et de déplacement des habitants ; tandis que se construit tout près la nouvelle cité rutilante dont on aperçoit la skyline élancée de la presqu’île de Pudong. La reconstruction / déconstruction de la Chine est également pour Clemens von Wedemeyer un motif central d’inspiration qui l’amène à instaurer des analogies avec le Metropolis de Fritz Lang : dans son film Metropolis, report from China, il tente de faire revivre la bipolarité ville haute / ville basse à la base de la dynamique du film de Fritz Lang dans une Pékin aux allures de monstre se nourrissant de l’énergie des ouvriers et renvoyant aux mêmes modèles de développement démiurgique. La vidéo Silberhöhe est inspirée par la scène finale de L'Eclipse, d'Antonioni et met en scène un quartier abandonné dans une ville d’Allemagne de l’Est. La vidéo de Mathieu Abonnenc Cayenne est faite de la juxtaposition de scènes de film d’anticipation qui dépeignent un monde ravagé par les conflits. Thème récurrent de la littérature et du cinéma de science-fiction, l’apocalypse, ou la post apocalypse hante les œuvres de cette fin de 20e siècle et ce début de 21e siècle. Si l’exploitation par un cinéma “populaire” de ces scénarios catastrophes créent des tensions dramatiques extrêmement efficaces, leur utilisation en tant que motifs répétés jusqu’à l’absurde reporte l’attention sur les dispositifs à l’œuvre au sein de ces films.

Horaires

Ouverte du lundi au vendredi de 15h à 19h, et le samedi de 14h à 18h. Pendant les vacances d'hiver (9 au 20 février) : ouverte du lundi au vendredi de 14h à 18h, fermée le samedi.

Accès mobilité réduite

Oui

Adresse

École européenne supérieure d'art de Bretagne-site de Rennes 34, rue Hoche 35000 Rennes France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020