Cuesta Verde, Rémi Groussin

Dans le cadre du Festival international d'art de Toulouse
Exposition
Arts plastiques
Pavillon Blanc Henri Molina Médiathèque | Centre d’art de Colomiers Colomiers
Vues de l'exposition Cuesta Verde, Rémi Groussin. Photo Y Gachet Ville de Colomiers

L'exposition Cuesta Verde de Rémi Groussin est l'une des étapes d'A comme Anaconda, parcours associé au Festival international d'art de Toulouse. Cinq lieux de l'agglomération et de la région proposent une programmation complémentaire au Festival, prospective et inattendue. Au Pavillon blanc, Rémi Groussin transforme la salle d'exposition en décor et en lieu de projection. 

CINÉMA, SÉRIES TV ET CULTURES POPULAIRES

La première exposition personnelle de Rémi Groussin manifeste dès son titre l’intérêt qu’il porte au cinéma et plus largement à la culture populaire. Cuesta verde, c’est le nom de la banlieue californienne dans laquelle se déroule l’action du film Poltergeist co-écrit par Tobe Hooper et Steven Spielberg en 1982. Il nomme ainsi certaines de ses oeuvres d’après des films et des séries télévisées, empruntant au cinéma son décorum et ses procédés. Pour La guerre des étoiles, l’oeuvre et le positionnement des rivets croisent la célèbre sixtologie dont l’artiste emprunte le titre, avec la géographie des étoiles d’une carte céleste issue des archives de l’Académie des sciences de 1907. De cet intérêt pour les cultures populaires témoigne le répertoire de motifs et de situations qu’il a exploré par le passé : univers de l’automobile (Pimp my Crashing Car, 2011, Rétro, 2013), de la moto (Les Motos, 2010), du sport (Le Furiani, 2012, I Saw the Sign, 2012), de la musique (La Batteuse, 2010), de la fête (Déca’Dance, 2012). C’est le potentiel de fiction de tels dispositifs qui l’intéresse au premier chef. L’univers de la science-fiction et de la magie y participent qui, à partir de lieux réels, de matériaux standards et de situations connues, ouvrent le champ libre à l’imagination, au récit. Ainsi pourrait-on voir ses oeuvres comme des « dispositifs d’évasion programmée », suivant la description qu’il donnait de l’une de ses créations Prison Break.

UN LIEU D’EXPOSITION RESSEMBLANT À UN PLATEAU DE TOURNAGE

Le visiteur est accueilli par Lost in Jin Ling : un panneau suspendu par des poulies comme un fond d’incrustation cinématographique en cours d’installation. Les motifs dessinés au briquet reprennent ceux des paquets de cigarette Jin Ling, une marque sino-russe vendue principalement en contrebande et qui imite les paquets de Camel. L’ artiste a laissé en réserve l’espace où une chèvre apparaissait à la manière des chameaux. Là aussi, le cinéma croise un décor pauvre dans un dispositif narratif en suspens, le titre pouvant faire écho aux films Lost in la Mancha et Lost in translation. Cette oeuvre donne le ton à l’exposition : des motifs pauvres, des installations placées dans l’espace comme les éléments d’un plateau de tournage à l’arrêt, les fils d’histoires décomposées.

SCULPTURE, SCÉNOGRAPHIE, VIDÉO COMME INDICES DE NARRATION

Plutôt que d’écrire des histoires, Rémi Groussin conçoit des sculptures et des installations. L’exposition se présente comme la scène d’un crime, les oeuvres constituant une série d’indices qui permettent de reconstituer des scénarios. On trouve ainsi un fond de scène, des éléments de décors telle cette forêt de néons en forme de cactus (Désert, 2014), des semblants de personnages – comme ces petits tas de pierres aux allures comiques de bonhommes de neige intitulés L’âge de pierre. Les oeuvres se manifestent comme les signes précurseurs ou les étranges restes d’un tournage. L’exposition fait apparaître les ingrédients de la fiction cinématographique avec les décors, les sculptures-personnages mobiles sur supports à roulettes et le drapé de la salle de projection. La scénographie – qui permet de croiser différentes strates narratives, est partie prenante de la création. Au coeur de l’exposition, la vidéo SL’ALOM met ainsi en boucle une série de souvenirs captés par l’artiste durant ses voyages. En travaillant les images avec le procédé de la nuit américaine (qui permet d’obtenir une apparence nocturne avec des images tournées en plein jour), il entraine alors ses souvenirs vers la fiction.

ART ET MAGIE

Parmi les lieux dont on ne sait plus s’ils appartiennent au monde réel ou à la fiction on compte Cuesta Verde, banlieue périurbaine où fut tourné Poltergeist. Dans ce film d’horreur, la réalité a parfois rattrapé la fiction. Ancien lieu de culte supposé, les événements survenus à certains acteurs ont ajouté au mystère, faisant se rencontrer le scénario du film et les petites histoires. Cuesta Verde résonne comme un dépassement de la fiction par la réalité. Rémi Groussin s’empare de ces références cinématographiques pour tisser des liens entre l’art, la magie et le cinéma. Ses oeuvres manifestent une parenté entre ces trois fragiles machines à rêve : trois domaines où l’illusion côtoie le bricolage et où l’artifice est roi. Principalement imaginée durant une résidence à Hendaye dans un lieu isolé, les sculptures intitulées L’ âge de pierre sont pour certaines issues de petits tours de magie que l’artiste réalisait pour passer le temps. Un temps qui s’étire, appelle des souvenirs, se prête à des tours de passe-passe… En reproduisant ces tours à une échelle monumentale avec des matériaux standardisés (béton, bouteilles, bocks de bières), l’artiste confronte le spectateur à des objets comiques et trop réels pour avoir conservé leur magie. Comme Désert, forêt de néons au statut trouble : s’agit t-il de décors ou de fantômes ?

DES ARTIFICES À DÉCOUVERT

Rémi Groussin crée des moulins à vents, des histoires qu’il démembre, des illusions dont il dévoile les trucs. Tantôt il pousse l’illusion à la sophistication en travaillant des procédés de trompe l’oeil – telles les pierres qui constituent L’ âge de pierre II. Tantôt il laisse les poulies de Lost in Jin Ling et les prises électriques de Désert apparentes. Ici comme ailleurs dans son oeuvre, le spectacle et les procédés d’illusion sont omniprésents. Ces indices se jouent à double face : côté pile comme les parfaites machineries de l’artifice et du rêve; côté face comme une chaine de montage à l’arrêt dont on nous montrerait les rouages et les mécanismes. L’ art, la magie et le cinéma apparaissent ici sous des traits volontairement décevants. Comme si la machine à illusion ne fonctionnait plus. La critique d’art Audrey Teichmann écrit ainsi à propos de la vidéo SL’ALOM : « les lieux filmés sont plongés dans un bain de nuit américaine, procédé daté au double mérite de faire disparaître des éléments et d’en révéler d’autres.

Commissaires d'exposition

Artistes

Adresse

Pavillon Blanc Henri Molina Médiathèque | Centre d’art de Colomiers 1 place Alex Raymond 31770 Colomiers France

Comment s'y rendre

Bus Tisséo :

Ligne 21 – arrêt Lauragais – Pavillon Blanc

TAD 118 – arrêt montel

Linéo 2 - arrêt Pavillon Blanc

Lignes 150 et 32 – arrêt Pavillon Blanc

Train ligne C :

Depuis gare des Arènes Toulouse : arrêt Colomiers. Tarif Tisseo

Voiture :

N124 sortie 4, parking gratuit de 190 places, place Alex Raymond face à la Mairie

Dernière mise à jour le 5 mai 2021