COME AND PLAY INSIDE

Perception Park Paris 05

Invité à se glisser dans la programmation de la galerie Perception Park pour un temps donné, le collectif ABOUT : BLANK convie à son tour des artistes à entrer avec leur œuvre dans l’espace d’exposition. Come and play inside se propose de jouer d'une situation d'entre-deux, en questionnant l'œuvre au sens traditionnel pour en souligner les zones d'ombre. Les artistes jouent avec le concept même d’œuvre et d'exposition ; en ouvrant des brèches et en occupant les interstices, ils mettent en avant ce que l'on ne voit pas au premier abord, mais qui sert à la fluidité de la pensée et de la vision. L'objet du jeu des artistes est le regard du spectateur, qui se trouve court-circuité, modifié, annulé ou même augmenté.

Timothée Dufresne cherche à se fondre dans ses tableaux pour mettre les formes en mouvement. Au cours de ses performances filmées, il adopte différentes postures, agençant les formes et les couleurs pour raconter leur vie dans le tableau, et tente de s'y inclure, conscient de sa propre inadéquation. L'entre-deux est montré ici dans un aspect physique et ludique, la présence du corps faisant référence à l’interstice de manière visuelle et symbolique. Il est aussi question de se glisser à l'intérieur de l’œuvre dans Poussière, Poème Déployé, pièce sonore dans laquelle Raphaël Tiberghien creuse le texte, quitte à forcer le passage dans les mots. A l'image de la poussière dont il est ici question, l’artiste se glisse avec une douce rudesse dans la structure du langage pour en tester les résistances et les potentialités plus que pour l'annuler.

Les compositions de Mara Fortunatović prennent appui sur le mur, la blancheur et la lumière. Sous des airs inoffensifs, les jeux de transparence et les nuances du papier peuvent être rapprochés de la manière dont Lina Ben Rejeb creuse dans la toile à « la recherche d’une peinture à minima ». Il s'agirait ici d'un geste similaire mais inversé. Lina Ben Rejeb explore l'intérieur de la matière picturale en décollant une à une les couches picturales pour les assembler en une nouvelle œuvre. Les pièces de Mara Fortunatović quant à elles occupent un volume ténu, frôlant l'inframince, mais saturé de nuances, reflets et irisations qui dilatent l'espace perceptif et accentuent les angles de vue.

Audrey Martin adopte une même discrétion en jouant avec une reproduction tirée d'un catalogue d'exposition. La photographie qu'elle en fait aplanit la sculpture d'origine, tandis que son interprétation donne une densité supplémentaire mais impalpable à l’œuvre. L'interstice ouvert ici est avant tout de l'ordre de la mémoire et conduit à « manipuler les dispositifs du regard, avec l’idée que chaque image génère sa propre lecture. Le spectateur n’est pas en face de l’œuvre qu’il croit voir. »[1]. Alessandro di Pietro pose lui aussi la question de l'appropriation, de la reproduction et de la mémoire. Son livre donne à voir son parcours dans l'immense dOCUMENTA 13 et n'en conserve que cette trace. A l'image de la mémoire parfois déformante, les œuvres sont photographiées avec un scanner à main qui provoque des distorsions et des déformations.

[1]Audrey Martin, à propos de Sans Titre (Hommage à Marc Couturier) : www.audreymartin.eu

Commissaires d'exposition

Adresse

Perception Park 20 rue Domat 75005 Paris 05 France
Dernière mise à jour le 27 octobre 2020