Collection moderne
Maurice Denis, Dans les hortensias, 1914 (FNAC 5355). Dépôt à La Cour d'Or - Musées d'art et d'histoire, Metz.
Un nouveau marché de l’art
En témoin des réalités artistiques diverses, la collection révèle de grandes étapes dans l’évolution de la création artistique et sa définition même. Importants au XIXe siècle, les achats par commande et en Salon se font désormais moins nombreux. De nouveaux modes d’acquisition s’imposent peu à peu, et notamment l’achat direct aux artistes.
Si le tournant du siècle est encore dominé par le système académique des concours, des Salons et des commandes d'État, quelques artistes majeurs font leur entrée dans la collection comme Camille Claudel réalisant sa Niobide Blessée en 1907, aujourd’hui déposée au musée Sainte-Croix à Poitiers.
Othon Friesz, La Guerre (1914), 1915 (FNAC 15238). Dépôt au Musée de Grenoble.
Représentation des nombreux courants artistiques
L’État se montre particulièrement attentif des années 1910 aux années 1940 au foisonnement artistique des différents courants stylistiques qui marquent les débats de cette période : Nabi, fauvisme, cubisme, expressionnisme, surréalisme, Art déco ou retour à l’Ordre.
Des artistes reconnus de la collection comme Suzanne Valadon, Pierre Bonnard, Maximilien Luce, Emile Henri Bernard, Charles Camoin ou encore Marie Laurencin côtoient des personnalités plus atypiques comme l’artiste brésilienne Tamara do Amaral ou plus tard, dans les années 1940, l’artiste naïf Louis-Auguste Déchelette.
Le fonds accompagne naturellement le développement de l’avant-garde avec l’achat de peintures d’Othon Friesz comme l’immense tableau La Guerre (1914) acquis en 1915 ou encore Le guéridon, 1938, tapisserie de Marie Cuttoli d’après un carton de Georges Braque, œuvres en dépôt au Musée de Grenoble. Les artistes étrangers sont aussi représentés comme le peintre cubiste brésilien Vicente Do Rego Monteiro dont Le buveur (1925) est aujourd’hui exposé au musée Géo-Charles d’Echirolles.
Vincente do Nero, Le buveur, 1925 (FNAC 28427). Achat en 1964, dépôt au Musée Géo-Charles, Echirolles.
Parallèlement, de nombreux achats et commandes de l’État sont effectués dans le cadre du Front populaire mais aussi de l’Exposition internationale de 1937 qui permet la naissance d’œuvres monumentales comme Le Transport des forces de Fernand Léger en dépôt au Musée national Fernand Léger de Biot ou Air, fer, eau de Robert Delaunay.
De même, l’État va encourager le renouveau de l’art religieux dès les années 1930 en soutenant l’acquisition d’œuvres d’artistes comme Georges Desvallières (les panneaux de La Résurrection et de La Nativité commandés en 1939 à la cathédrale Saint-Vaast d’Arras).
Cette période prolonge également le renouveau de la commande dans le cadre de la statuaire et du décor public.
Robert Delaunay, Air, force, eau, 1937 (FNAC 15274).
Le cas spécifique de transfert de propriété d’œuvres de l’avant-garde
Pour mieux rendre-compte de l’effervescence liée à la communauté artistique multinationale installée à Paris, l’Etat acquiert dès les années 1930 des œuvres d’avant-garde, attribuées au musée du Jeu de Paume, dédié aux écoles étrangères contemporaines. La Nouvelle Objectivité est représentée par l’achat de deux œuvres de Max Beckmann en 1931 et 1932, l’abstraction avec František Kupka en 1935 et Vassily Kandinsky en 1936 ; le surréalisme avec Salvador Dalí en 1938.
Suite à l’inauguration du musée national d’art moderne en 1947, de nombreux achats rétrospectifs sont effectués par l’Etat pour le compte du musée comme Udnie (1913) de Francis Picabia en 1949 ou Le Bal Bullier de Sonia Delaunay (1913) en 1953. Des œuvres contemporaines majeures sont par ailleurs acquises par l’Etat dont la grande gouache découpée d’Henri Matisse La Tristesse du Roi (1952) en 1954.
Louis-Auguste Déchelette, Arrivée des chars, 1939 (FNAC 28796). Dépôt au musée municipal de Noyers.
L’après-guerre
Au sortir de la Seconde guerre mondiale, l’État crée le Bureau des Travaux d’art afin de mener à bien une politique de commande qui s’inscrit esthétiquement dans la lignée d’une tradition entamée sous la IIIe République et poursuivie sous le régime de Vichy, tout en renouvellement les thèmes iconographiques : représentations de la résistance, de la déportation, de la Libération et de la reconstruction. En statuaire, les sujets et formes choisis reprennent les codes de la sculpture monumentale, alors que les programmes décoratifs d’intérieur, qui viennent orner mairies, salle des fêtes, écoles publiques ou églises, gardent la forme de fresques ou de panneaux peints développant des sujets allégoriques, historiques ou religieux. Quelques œuvres se démarquent cependant de ces codes, à l’instar du Coureur de Germaine Richier, commandé en 1955 pour le stade de Saint-Ouen, et dont le corps décharné tranche avec les musculatures idéales associées à ce type de commandes.
Jean Amblard, Les maquis de France (détail), 1948, huile sur toile (FNAC 20100). Dépôt à la mairie de Saint-Denis.
Le soutien de l’Etat dans le mouvement de renouveau de l’art sacré se manifeste via la commande du Christ (1950-1954) d’Ossip Zadkine pour l’église paroissiale de Caylus dans le Tarn-et-Garonne, et surtout par sa participation à des chantiers emblématiques comme celui de Notre-Dame-de-Toute-Grâce sur le plateau d’Assy, avec la production de la tapisserie monumentale L’Apocalypse de Jean Lurçat (1947-1950).
Jean Lurçat, L’Apocalypse, 1947-1950, laine (FNAC 327). Dépôt à l’église Notre-Dame-de-Toute-Grâce du plateau d'Assy, Passy.
Si une peinture figurative de facture classique domine les achats en vue de décorer les nouvelles institutions de la IVe République, la Nouvelle École de Paris est parallèlement repérée et suivie au cours des années 1950 avec l’achat d’œuvres de ses principaux représentants (Pierre Soulages, Hans Hartung, Zao Wou Ki, Maria Elena Viera da Silva, Camille Bryen, Serge Poliakoff, Alfred Mannessier, Nicolas de Staël…).
Serge Poliakoff, Composition, vers 1960, huile sur toile (FNAC 27252). Dépôt au Musée d'art et d'histoire de Meudon.
Quelques chiffres
La collection moderne représente 25 600 œuvres de 7 900 artistes acquises depuis le tournant du XXe siècle jusqu’à 1960. Cette collection se répartit entre la peinture (12 500 œuvres), la sculpture, les arts graphiques (4 000 dessins environ et
3 100 estampes) et enfin les arts décoratifs.