Chants d'Amour

Arts plastiques
Galerie Dix9 Paris 03

L’amour entre deux êtres a toujours été un thème de prédilection dans l’histoire de l’art au sens large, qu’il s’agisse des arts plastiques, de la littérature, de la musique ou du cinéma. Nombre d’artistes de la Galerie Dix9 ont eux aussi abordé ce thème sous diverses facettes, qu’enfin il paraissait opportun de confronter dans une même exposition. En tant que concept général, omniprésent dans les sociétés humaines, l’amour renvoie la plupart du temps à un profond sentiment de tendresse et d’empathie envers une personne. Le terme est générique et revêt des caractéristiques propres aux diverses relations auxquelles il s’applique. Le propos de l’exposition se limite aux relations de couple entre deux êtres adultes. Sous le titre « Chants d’amour», inspiré du film de Jean Genet, elle ambitionne d’illustrer l’universalité de l’amour et de ses dérives à travers des oeuvres d’artistes contemporains venus d’horizons différents. Elle questionne par ce biais l’état de nos sociétés dans leur rapport aux libertés individuelles, à la justice sociale et à l’égalité entre les genres.

La vidéo Love de Tracey Moffatt pourrait servir de canevas au propos développé. Montage subversif à partir d’extraits de films hollywoodiens, l’oeuvre de l’artiste australienne est conçu comme un hommage à la gloire du cinéma. Mais le « happy end » est ici le début d’une narration où les relations entre un homme et une femme dégénèrent progressivement jusqu’à une fin tragique et brutale. Les Love Drawings ou la video Kiss du Serbe Nemanja Nikolic relèvent du même registre cinématographique et représentent image par image des scènes de baiser passionnel issus de films américains. Les bouquets de roses, peintures obsessionnelles de Niyaz Najafov, célèbrent un chant d’amour bucolique à travers un mode de séduction atemporel entre deux êtres quand les photographies de Nina Kovacheva rendent compte des ébats de ses Mille et une Nuits. C’est dans un dénouement heureux avec Demande en mariage que se termine la fiction documentaire Ekaterina de Romain Mader, même s’il tire son origine d’un aboutissement prédéterminé du tourisme sexuel en Ukraine.

Sans l’amour, l’Homme se sent seul. Aussi se nourrit-il de rêves, surtout quand l’être cher est absent. Dans leur cellule, les prisonniers gravent leur déclarations désespérées dans la pierre, dessins que magnifie Esmeralda Kosmatopoulos par leur représentation en néon sur fond d’or. D’autres trouvent des stratagèmes pour communiquer à travers les murs, ainsi que l’a si admirablement filmé Jean Genet dans Un chant d’amour, où chacun des deux hommes tente d’être présent à l’autre. Et comme le rappelle la peinture de Karine Hoffman, même Narcisse, selon la version rapportée par Pausanias, se console de la mort de sa soeur jumelle qu’il adorait, en passant son temps à se contempler dans l’eau de la source, son propre visage lui rappelant les traits de sa soeur.
Mais comme le veut une idée banale, l’amour ne dure pas toujours et, sans doute lié à d’autres éléments psychologiques, engendre parfois des comportements à l’issue dramatique. Les femmes battues par leur conjoint sont encore un phénomène fréquent dans nos sociétés modernes, quel que soit le milieu social. Leur statut de victime n’est pas facilement reconnu, ici comme ailleurs. Et leur défense pour se sauver se heurte encore aux préjugés de sociétés inégalitaires. En témoigne Anila Rubiku dans son projet réalisé dans une prison de Tirana auprès de femmes ayant tué leur mari. Ses portraits sont l’illustration d’un emprisonnement arbitraire, sans aucune forme de procès. Les agressions sont souvent accompagnées de violences verbales, comme en témoigne la vidéo Iconography of Silence, où Debora Hirsch retranscrit les phrases des agresseurs qu’elle a recueillies auprès d’une association de femmes battues. La vidéo est transmise à travers un miroir où le spectateur se retrouve intégré
dans cette dénonciation.
Mais laissons le dernier mot à Illan Vogt et à son tissage en papier d’Ulysse de Joyce. Hommage à un chef d’oeuvre de la littérature moderne qui détruit le mythe de la fidèle Pénélope attendant inlassablement le retour d’un époux disparu.

Autres artistes présentés

Esmeralda Kosmatopoulos, Nina Kovacheva, Romain Mader, Niyaz Najafov, Anila Rubiku et Illan Vogt

Partenaires

Un dimanche à la galerie le 15 septembre, projet soutenu par le Comité des galeries d'art et la Ville de Paris

Horaires

mardi - vendredi 14h - 19h, samedi 11h - 19h

Accès mobilité réduite

Oui

Adresse

Galerie Dix9 19 rue des Filles du calvaire 75003 Paris 03 France

Comment s'y rendre

metro Filles du Calvaire

Dernière mise à jour le 13 octobre 2022