Céret
Céret,
Mon intention en arrivant à Céret était de mêler photographies de rue et vues intérieures.
Je voulais mettre en relation deux manières de photographier la ville : l’une est
de photographier dans la rue au gré des rencontres, des scènes vues, des architectures,
des lumières ; l’autre est de faire poser des gens chez eux et, de ce fait, mettre un pied
dans la fiction.
Lorsque je photographie dans la rue, j’affectionne ces instants où tout semble posé, installé
comme sur un plateau de cinéma où comme le dit Jean-Luc Godard, il faut « essayer
de retrouver dans tous ces mouvements de foule le départ de la fiction ». À l’inverse,
photographier les gens chez eux, c’est inévitablement leur demander de poser,
les installer, les faire « jouer “. En même temps, il faut réussir à leur rendre leur mouvement
intérieur. Mon temps s’est donc partagé entre les longues ballades dans la ville et
les visites chez les cérétans. J’ai arpenté les ruelles et les sentiers qui les prolongent, les
canaux qui traversent de part en part la ville et irriguent les jardins potagers qui sont partout.
J’ai passé beaucoup de temps avec certains habitants, retournant parfois plusieurs
fois chez eux pour les photographier. Mais il est difficile de venir avec une intention et
qu’elle se mette en place exactement comme vous l’aviez prévue. La réalité des lieux
bouleverse vos plans. J’ai donc gardé peu de portraits pris chez les habitants et privilégié
les rencontres faites dans ces aller-retours entre intérieur et extérieur. Céret m’est lentement apparue comme un lieu d’une douce étrangeté, parfois frôlant la fantasmagorie, ce que j’ai essayé de retranscrire ici.
Géraldine Lay, octobre 2015