Ce n'est pas du sang, c'est du rouge
Shilpa Gupta, Blame, 2002-04, installation interactive, bouteilles en plastique, colorant, vidéo. 340 x 300 x 130 cm éd de 5.L’exposition tire son titre de la célèbre formule que Jean-Luc Godard opposa à la critique de la violence démesurée de son film Weekend. La série photographique Slow Decay (2010) de Gohar Dashti met en scène des personnes ordinaires évoluant dans un contexte domestique insignifiant. Un liquide rouge, du sang, vient cependant perturber l’apparente quiétude des protagonistes et crée une tension qui les suspend dans le temps, le silence et l’absence. Ils sont désormais plongés dans le mutisme de leurs histoires intérieures dont les objets qui saignent seraient les narrateurs. Dans la vidéo qui accompagne les photographies, Gohar Dashti semble vouloir panser les souffrances et les âmes. En vain, la toile est absorbée et entièrement recouverte du rouge sentencieux. L’installation interactive Blame (2002-2004) de Shilpa Gupta scelle dans des flacons le sang versé par l’intolérance, les préjugés et la haine moteurs des violences identitaires qui ont frappé l’Inde et sa région au début des années 2000. Qu’ils soient vendus par l’artiste dans les gares et trains de Mumbai, ou exposés sur des étagères alignés tels des produits pharmaceutiques baignés d’une lumière écarlate, les flacons contenant le sang diviseur proclament qu’ils nous sauveront de tous nos maux : Blaming you makes me feel good. L’exposition “C’est n’est pas du sang, c’est du rouge” déploie autant de nuances cruelles de rouge composant la grande fresque monochrome de nos stigmates identitaires et politiques, de nos frustrations et de nos douleurs.