Camille Girard et Paul Brunet
CG + PB = 4He + n + 17.6MeV
Une bombe à hydrogène – ou bombe thermonucléaire – comprend basiquement deux éléments : un détonateur, c’est-à-dire une première bombe à fission, dont l’explosion crée les conditions de température et de compression entraînant la fusion du second élément, le combustible thermonucléaire. Phénomène au cœur de ce processus, la fusion de deux noyaux atomiques en un noyau plus lourd dégage une énergie colossale. L’unité utilisée pour mesurer la puissance d’un tel engin est la mégatonne, soit un million de tonnes de TNT.
Quelle est l’unité appropriée à la mesure du travail de Camille et Paul ? Centimètres carrés de papier patiemment recouverts ? Litres d’aquarelle ? Heures, jours, semaines, mois d’intimité laborieuse ?
La symbiose de leurs talents respectifs en une entité autonome libère une énergie créatrice elle aussi gigantesque. Mais elle ne peut être quantifiée qu’à l’aune de l’effet produit sur leurs cibles consentantes : l’addition CG + PB atomise délicieusement le regard, confisque tendrement sa vigueur afin de pulvériser délicatement son échelle. Une œuvre qui déploie une mosaïque d’affects si dense qu’elle dissuade ainsi toute nostalgie pantouflarde.
Terroristes pacifiques armés d’un quotidien jubilatoire, Camille et Paul sont les « bombes-détonateurs » d’une joyeuse apocalypse, destruction/reconstruction qui accule œil, cerveau, cœur, pour leur plus grand plaisir, à une gymnastique hystérique. Qu’on se rassure, les éventuels rayons ionisants auront désormais un goût acidulé.
Vincent Lozachmeur.