Atom cities

Les films d'Éléonore de Montesquiou sont presque toujours fondés sur des enregistrements, interviews et autres formes de conversation à propos de vécus intimes, singuliers. Ces enregistrements dont différents fragments sont retravaillés ensuite, associés ou pas à d'autres éléments sonores (bruits bruts, ambiants ou trouvés, musiques originales...), constituent la matière première d’une bande-son sur laquelle les images vont venir "se greffer" au montage, sans jamais coïncider réellement avec elle. Ce souci du décalage entre l’image et le son, l’une pouvant fonctionner indépendamment de l’autre, n'est pas sans rappeler le dosage cher à Johan Van der Keuken, "entre cinéma synchrone et non-synchrone, entre chose arrangée et chose trouvée". Les sujets de prédilection d'Éléonore de Montesquiou portent sur les relations que les individus entretiennent avec le lieu où ils vivent. Qu’il s'agisse de leur maison, leur ville, leur pays, voire leur corps. Dans Atom cities, vaste projet réalisé en 2005-2006, l'artiste interroge ainsi l’habitat et des habitants de Sillamäe et Paldiski, deux étonnantes villes d'Estonie qui à l’époque soviétique (1944 à 1991) furent rayées de la carte et interdites aux Estoniens eux-mêmes, du fait de leurs activités exclusivement liées à la recherche nucléaire... Deux villes ouvertes depuis 1991, depuis l’indépendance de l’Estonie, à la culture du libéral-capitalisme et à l’économie de marché... Deux pôles urbains "désaffectés", qui se cherchent une raison d’être encore, aujourd’hui, au-delà de la fermeture des usines et du départ des Russes... Atom Cities est un portrait de ces deux villes en pleine mutation.