arearevue)s( n°17

art - jeu - massacre : été 2008
Parution
Arts plastiques
Arearevue)s( - 75010 Paris 10
En ouverture de ce 17e numéro, Jean-Marie Lhôte, maître des jeux et auteur de l'incontournable “Histoire des jeux de société”, commence par un historique de la relation art et jeu, où il apparaît que le jeu dans l'art est l'ennemi du sacré. Du sacré, il n'en est pas question avec les Incohérents, cette bande qui autour d'Alphonse Allais en 1895, fit régner en mode le non-sens. Quant au Grand Jeu, il est irrémédiable, il ne se joue qu'une fois mais à tous les instants de la vie. Que penser de ces quatre jeunes gens (Vailland, Daumal, Gilbert-Lecomte et Meyrat) qui élevèrent leurs exigences spirituelles jusqu'au meilleur et pour le rire ? Eclipsés par le Surréalisme, leur pouvoir de subversion est évoqué par Jean-Philippe Tonnas. Gilles Brougère, sociologue, replace le jeu dans le “faire semblant”, le combat ludique qui ressemble à un combat qui n'en est pas un. Illusoire moyen de réenchanter le monde, le psychiatre Marc Valleur nous éclaire sur les notions d'addiction et de compulsion. Frank Beau, spécialiste de la mutation des médias à l'heure du numérique, nous annonce la naissance d'une nouvelle culture dont le jeu vidéo serait l'embryon. Si le jeu fait entrer en scène la réflexion, la rapidité, l'adresse, la mémoire, l'invention, la stratégie, nous avons voulu partager ces qualités humaines avec Daniel Herrero, écrivain et homme de rugby toulonnais, avant de rencontrer Jean-Paul Favand, créateur du Musée des Arts Forains, temple des jeux de massacres avec lesquels Octave Mirbeau ouvre son délicieux Jardin des délices. “S'inventer acteur”, le rêve de Denis Podalydès ne serait-il pas celui de tout joueur d'échecs ? Arrabal, poète, cinéaste et auteur dramatique, organise ses pièces avec la rigueur des mathématiques et du jeu d'échecs, quand Milshtein, peintre, écrivain et excellent joueur, se réjouit du gambit de la dame. Yves Marek, qui publiera Art, Echecs et Mat en septembre 2008, voit dans l'artiste contemporain celui qui échappe à toutes les conventions et règles du jeu. Si le casino, roi des jeux, nous promet la martingale, Michel Aubry s'appuie sur la pataphysique de Jarry pour développer une oeuvre où la limite entre art et salles de jeux se fait toujours plus ténue, tandis que le Groupe Partouche transforme son établissement en Pasino pour la 2e Biennale d'art contemporain de la Ville du Havre cet été. Ger van Elk se fait commissaire au Musée Malraux, tandis que les “off” se multiplient dans la ville, du volcan au galeries havraises, jusqu'au Docks. Tarot, poker, bridge, belote, manille, huit américain et autres patiences… le Musée de la Carte à Jouer d'Issy-les-Moulineaux en a une des plus belles collections au monde. Jean-Jacques Salvador y a déposé son jeu de tarot. Yves Reynier, quant à lui, utilise les cartes et les plie, les colle, les coupe ou les assemble. Jean Verame crée des jeux de cartes en reprenant ses dessins qu'il pose dans le désert, tandis que Louttre.B publie les siens qu'il vend comme des gauffres. Jeux de l'amour avec le cinéaste Eric Rohmer, jeux de l'impuissance avec le performeur Tetsumi Kudo, jeux de la mort avec l'artiste Michel Journiac, jeux de bagarres avec Paula Rego, Isabelle Tournoud, Thierry Sigg et Horacio Cassinelli, mais là, c'est pour rire. Et aussi : Catherine Kelly, César Domela, Bridget Riley, Wei Leih Lee, Space Invader, Teresa Petersen, Dominique Fury, Eliane Larus, Jim Dine, Anthony Caro, Richard Serra, Guillaume Linard-Osorio, Gérard Collin-Thiébault, Chris Dimino, Augustin Pineau, Burlingue, Silvia Minni, Maro Avradou, Dimitri Xenakis… Quant à Daniel Dezeuze, le pape de Supports/Surfaces, il se détend en faisant des pistolets, sans doute parce que le combat continue. Pour Christian Zeimert, c'est l'arrière-garde qui est aux avant postes. Quant à Anish Kapoor, il dresse de grands signes d'infini, réflexion sur le temps… Robert Filliou, auquel Pierre Tilman consacre un livre, est aussi un artiste qui a fait de sa vie un jeu, mais pas comme Henry Darger qui imaginait des jeux effrayants de violence. Cependant dans un bien autre style que Bruno Richard et Pascal Doury avec leur groupe “Elles sont de sortie”. On appréciera les ours en peluche de Timothée Mahuzier, les petits soldats d'Antoni Miralda, les tracteurs de Wim Delvoye ou les petites voitures de Rosemarie Trockel, mais tous ces jeux n'arrivent pas à cacher l'impression menaçante d'un massacre qui se prépare. Le noir est joyeux !

Accès mobilité réduite

Oui

Adresse

Arearevue)s( - 75010 50 rue d'Hauteville 75010 Paris 10 France
Dernière mise à jour le 13 octobre 2022