Alfred Manessier, Dations et Dons aux collections nationales

Exposition
Arts plastiques
Centre Pompidou Paris 04
L'oeuvre du peintre Alfred Manessier (1911-1993), souvent qualifié de « mystique », tend vers une dimension intemporelle et universelle. Intériorisant le spectacle du monde, observant la richesse de la lumière qui baigne les paysages, Manessier invente et approfondit un langage pictural abstrait intense et dépouillé, proche de l'essentiel et du mystère présent dans les êtres et les choses. Le Centre Pompidou, Musée national d'art moderne possède désormais un ensemble conséquent d'oeuvres de Manessier. Cette collection, constituée grâce à des achats de l'État et à des dons faits par l'artiste lui-même et par sa famille, a été complétée en 1994 et 2003 par deux dations provenant des héritiers du peintre. L'entrée dans les collections du Musée national d'art moderne de ces deux dations, comportant au total douze peintures, représentatives des différentes périodes de l'artiste, permet de retracer le parcours pictural d'Alfred Manessier. Lui est ainsi rendue la place qui lui revient, celle d'un artiste ayant fortement contribué au renouvellement de l'École de Paris et de l'abstraction dans la période de l'après-guerre. La plus ancienne des oeuvres de la dation, Dieux marins, 1935, correspond aux années de formation de l'artiste à Paris, à l'École des beaux-arts, puis à l'académie Ranson. Une stylisation hardie, venue du cubisme de Braque, mais aussi de l'art des fresquistes romans, marque cette oeuvre. Manessier l'a toujours considérée comme fondatrice de son oeuvre future et l'a présentée dans ses rétrospectives successives. D'inspiration très différente, Les Pèlerins d'Emmaüs, 1944, présenté au Salon d'Automne de 1944 appartient à une problématique qui va définir l'itinéraire artistique de Manessier : celle de la réconciliation de l'art moderne et de la foi chrétienne. Au cours du séjour qu'il effectue à la Trappe de Soligny en 1943, l'artiste, se découvrant une foi revivifiée au contact des moines, donne pour objectif à sa peinture de parvenir à une nouvelle expression du Sacré. Angelus Domini nuntiavit Mariae, 1947, s'inscrit dans cette continuité mais s'oriente vers ce que l'artiste dénomme la « non-figuration », c'est-à-dire la traduction du message chrétien à l'aide de signes picturaux débarrassés de tout naturalisme. Au cours des années 1950, les références religieuses continuent à dominer son travail, notamment dans la réalisation d'une série de grands formats comme Recueillement nocturne II, 1952. L'Offrande de la terre ou Hommage à Teilhard de Chardin, 1961-1962, qu'il présente à la Biennale de Venise de 1962, appartient à cette veine. Par son format hors normes, qui rappelle un vitrail, comme par la symbolique suggérée, celle d'une flamme immense unissant la terre au ciel, cet hommage au philosophe et théologien Teilhard de Chardin se présente comme une expression picturale de l'inspiration. Parallèlement à ces oeuvres qui engagent plus précisément sa foi, Manessier, tout au long de sa carrière, travaille le registre du paysage. Ainsi, Morte-eau, 1954, appartient à une importante série qui évoque les paysages de la baie de Somme, dont le peintre est originaire ; Fishe's Sanctuary, 1969, est lié à la découverte par l'artiste des paysages et des lacs canadiens en 1967. Les dimensions exceptionnelles et la fluidité de cette composition rappellent les oeuvres d'autres artistes inspirés par la nature, tels Jean-Paul Riopelle ou Joan Mitchell. En 1959 et 1963, les voyages d'Alfred Manessier en Provence et en Espagne sont l'occasion d'une nouvelle expérience de la lumière et constituent un tournant dans l'approche de ses compositions. La nature torturée des paysages méditerranéens impose des diagonales et des couleurs intenses, contribuant à la dramatisation d'une peinture qui se veut aussi le reflet du caractère tragique de l'Histoire. Ainsi, Le Torrent vert (Hommage à Miguel de Unamuno), 1965, et Terre assoiffée, 1966, sont à la fois une vision de la terre espagnole et un rappel des de ses déchirements politiques. Cette même inspiration aboutira plus tard à la réalisation de l'Hommage à Martin Luther King, 1968 et de Pour la mère d'un condamné à mort, 1975, qui évoque l'exécution de l'anarchiste catalan Puig Antich par le régime franquiste en 1974. Dans ces deux cas, les peintures renvoient à la Passion du Christ, où l'innocence est en butte à l'injustice. Paysage et oeuvre politique, Favellas III, 1980, appartient à une série de six toiles de même format réalisées entre 1979 et 1983, dont Favelas I, donné par l'artiste au Musée national d'art moderne en 1993 ; cette oeuvre rend aussi hommage à l'archevêque de Rio de Janeiro, Dom Helder Camara. Dans la perspective de cette présentation des oeuvres d'Alfred Manessier, les enfants de l'artiste ont tout récemment fait au Musée national d'art moderne un don de seize oeuvres sur papier qui appartiennent pour l'essentiel aux années 1950 jusque là absentes de la collection du Musée. Elles viennent compléter un ensemble de vingt-quatre dessins déjà réunis dans la collection et provenant également des dons successifs du peintre et de sa famille.

Accès mobilité réduite

Oui

Adresse

Centre Pompidou 19 rue Beaubourg 75004 Paris 04 France
Dernière mise à jour le 2 mars 2020